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Mercedes E36 AMG W124 : l’opportuniste

Par Paul Clément-Collin - 28/07/2022

Si AMG fait aujourd’hui partie de la galaxie Mercedes, il n’en a pas toujours été ainsi. Avant 1999, l’officine d’Affalterbach agissait comme un préparateur, mais adoubé par le constructeur qui, au début des années 90, lui donna enfin l’imprimatur nécessaire à son envol commercial. Cette association commerciale donnera d’abord lieu à une très officielle C36 AMG, vendue dans le réseau Mercedes, mais rapidement, chez AMG, on vit l’intérêt de pousser le bouchon un peu plus loin. Jusqu’à créer une drôle de voiture : la Mercedes E36 AMG W124.

Les accords signés avec Mercedes, qui finiront par voir AMG absorbée par la grande maison en 1999, sont une révolution pour le petit atelier. Certes, son image de marque était bien établie, notamment grâce à la fameuse 300 E 5.6 AMG surnommée “Hammer”, mais elle restait une petite firme, à la production relativement confidentielle tout juste tolérée par la toute puissante Mercedes-Benz. Une fois les liens resserrés, tous les espoirs étaient permis. Si la première W124 « monstrueuse » sera réalisée avec Porsche (la 500 E / E 500), désormais, ce serait avec AMG qu’il faudrait compter pour dévergonder les Mercos pour les clients avides de puissance (et de kits carrosserie).

La C36 donne des idées à AMG

Le premier projet “en commun” s’opère sur la nouvelle Classe C, qui prend la relève de la 190 (W201). BMW, le concurrent ouvertement déclaré, vient de lancer sa nouvelle Série 3 et les ingénieurs de sa filiale Motorsport ont oeuvré intelligemment pour accoucher d’une M3 E36 du feu de Dieu, sans réelle concurrence (à part une Maserati Ghibli II sans puissance industrielle ou commerciale ou une Peugeot 405 T16 à court de chevaux, en fin de carrière, fragile et chère). Mercedes répondra avec son partenaire AMG d’une façon moins frontale qu’au temps de la M3 E30 et des 190 2.3-16 / 2.5-16.

La C36 AMG n’était disponible qu’en carrosserie 4 portes et offrait les 280 chevaux du 6 en ligne de 3.6 litres tout en rondeur, douceur et couple, uniquement accouplé à une boîte automatique : face à une vraie sportive, Mercedes et AMG lançaient une dévoreuse d’autoroute d’un agrément total mais sans la folie de sa concurrente bavaroise. Côté W124, AMG lançait une E60 AMG encore plus séduisante que la 500 E, mais réservée à une élite fortunée.

Une AMG en trait d’union 

Fort de son expérience avec la C36 (et du développement du moteur 3.2 Mercedes réalésé à 3.6 litres), AMG décide donc d’élargir sa palette et d’offrir un compromis entre le look dévastateur de la E60 AMG et le moteur puissant mais sage de la C36. Cette fois-ci, il ne s’agit pas d’un accord commercial aussi large que celui signé avec la C36 justement. En réalité, il s’agit juste d’un kit proposé à tout client de Mercedes E320 W124 désireux d’offrir un peu de punch et un look plus sportif à sa paisible berline, son placide break, son classique coupé ou son cabriolet familial (4 places).

Avec 272 chevaux, la W124 ne se transforme pas en foudre de guerre. La C36 ne l’était déjà pas, sans avoir le même poids ni le même gabarit, mais le passage à une plus grosse cylindrée, et à une puissance respectable, permet de combler le gap entre la gamme classique de chez Mercedes et les E 500 et E60 AMG, tout en permettant aux propriétaires (souvent allemands ou japonais) de s’offrir du tuning de bon goût sur une berline somme toute très sage. Bien sûr, il fallait mettre la main au portefeuille mais à l’époque, le logo AMG n’était pas si courant que cela et valait bien de se saigner un peu, non ?

Rareté qui s’ignore

Surtout, ce “badge” AMG permettait de profiter de performances intéressantes sous toutes les carrosseries disponibles pour la W124. Les premiers kits furent livrés à partir de 1995 (certains disent 1994) ; l’option fut disponible chez AMG jusqu’en 1997 et la fin du modèle W124. Le nombre d’exemplaires transformés reste difficile à estimer (on sait que 171 breaks reçurent le badge E36, et le nombre total de modifications doit sans doute être inférieur à 1000, à comparer aux plus de 5 000 exemplaires de C36).

Si l’option E36 n’était pas forcément une bonne affaire à l’époque, elle peut l’être aujourd’hui. En fouinant (particulièrement en Allemagne), on trouvera sans doute son bonheur à un prix relativement abordable. La W124 est fiable, et le moteur 3.6 aussi (j’ai testé une C36 dont le moteur affichait 320 000 km et pétait la forme : seul un vol suivi d’un rodéo avec la police aura eu raison de la belle berline du beau-père de ma soeur après 20 ans de bons et loyaux services). Avec ces quelques chevaux supplémentaires, elle sera autant un daily driver qu’une pousse-au-crime, sans le côté bad boy d’une M3 E36 justement !

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