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Volkswagen Type 181 : la drôle de « chose »

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 29/01/2019

Dans les années 60, Volkswagen n’est pas encore le mastodonte que l’on connaît. Encore totalement dédiée au “tout à l’arrière”, la firme allemande n’en finit pas de décliner à toutes les sauces la bonne vielle Cox (ou Käfer en RFA). L’heure n’est pas encore tout à fait au rachat de NSU et au passage au “tout à l’avant” qui en découlera (avec succès). Pour répondre à l’appel d’offre de la Bundeswehr, VW se contente d’une énième mouture de la Coccinelle déguisée en baroudeuse : la Type 181, appelé Kurierwagen en Allemagne, The Thing (la chose) aux Etats-Unis, Trekker en Grande Bretagne ou bien Safari au Mexique et en Amérique du Sud.

La 181 était un modèle d’économie comme savait si bien le faire Volkswagen dans ses années-là, répondant en cela parfaitement au cahier des charges de l’armée allemande, désireuse d’un véhicule de liaison économique et rustique. Reprenant dans les grandes lignes le design de la célèbre Kübelwagen de la dernière guerre, véritable patchwork de tout le catalogue de pièce détachée de la marque, la 181 va remporter l’appel d’offre et remplacer les DKW Munga vieillissantes dans les régiments et tenter de s’offrir une image paradoxale de voiture cool sur le marché civil.

Du marché militaire à celui des loisirs

Côté moteur, on retrouve donc à l’arrière le flat four de 1.5 litres et 44 chevaux de la Cox (ou du Kombi), ainsi que son train avant. A l’arrière, on trouve le train des Kombi à réducteurs permettant le transport de charges. Pour le plancher, c’est le Karmann-Ghia qui s’y colle grâce à une plus grande largeur que la Cox. Un vrai patchwork cette 181, lui permettant de remporter le marché militaire haut la main et dont la production commence en 1968.

Malgré ses origines militaires, la 181 va tenter de conquérir le marché de la coolitude, comme ses contemporaines Citroën Méhari ou Mini Moke. En cette année 1968, l’air du temps est au power flower et aux véhicules de loisirs. Il semble tout à fait opportun d’en décliner une version civile aux couleurs acidulées, orange, vert pomme ou bleu azur. Les publicités, communiqués de presse ou catalogues n’hésitent pas à mettre en scène la 181 avec de jeunes filles en maillot de bain, tendance hippie, surfant sur l’image que commence à véhiculer le Kombi.

A la conquête de l’Amérique avec « The Thing »

Heureusement que la Bundeswehr absorbe une bonne partie de la production, car en réalité, cette “chose”, plus baroudeuse que tout terrain, pas vraiment moderne et sensible à la rouille, pas vraiment jolie non plus (même si avec le temps, sa bouille de Cox carrée finira par faire son effet), n’arrivera pas vraiment à séduire les foules. Cela n’était pas forcément de sa faute : toutes les voitures de loisirs de cette époque là (Rodéo chez Renault, Méhari, Moke) ont compensé par le temps de production des ventes annuelles relativement faibles : qu’elles soient mythiques aujourd’hui n’en fait pas des succès d’hier. D’ailleurs, toutes les tentatives d’incursion sur ce créneau (Moretti dans les années 70 sur base Fiat, Méga dans les années 90 sur base Citroën et tant d’autres) se sont soldées par des échecs.

Pourtant, dès 1970, Volkswagen s’imagine conquérir le monde avec son Kurierwagen et lance la production dans son usine de Mexico produisant aussi la Cox. En 1971, la 181 espère réitérer dans son domaine le succès de la Cox aux USA et débarque sur la côte Ouest avec l’espoir de conquérir le cœur des surfeurs et des hippies à guitare. Si en Amérique Latine, elle connaîtra un succès d’estime (avec 20 364 exemplaires produits au Mexique), au-delà du Rio Grande, l’affaire sera beaucoup plus compliquée. Certes, la nouvelle législation américaine contraindra la marque allemande à retirer “The Thing” de sa gamme US en 1975, mais de toute façon, elle n’avait pas vraiment réussi à convaincre un large public.

Une renaissance grâce à la collection

En Europe, la 181 rencontrera un certain succès auprès d’une clientèle rurale ou d’artisans, sans pour autant casser la baraque : en Angleterre, la Trekker ne restera au catalogue qu’une seule petite année. Entre 1968 et 1983, date de fin de fabrication, la 181 aura eu pour principal client les forces de l’OTAN, avec presque 50 000 exemplaires livrés aux forces occidentales, sur une production totale de 90 883 unités (dont quelques-unes fabriquées en CKD – c’est-à-dire en kit – à Djakarta, en Indonésie). La dernière version militaire fut livrée en 1979 à l’armée allemande : la 181 n’était que transitoire pour la Bundeswehr qui, dès le début des années 70, avait lancé un appel d’offre pour un vrai véhicule de liaison doté de capacités tout-terrain. Mercedes (avec Puch) et son Classe G croisa alors le fer avec Volkswagen et son Iltis pour remplacer le 181 : VW remporta à nouveau le contrat.

Aujourd’hui, la 181 connaît un regain d’intérêt. Idéal pour les stations balnéaires (malgré sa tendance à la rouille) comme alternative plus virile à la Méhari, elle se négocie aux alentours de 12 000 euros selon LVA (2018), soit un peu moins cher que la petite Citroën dont les prix ne cessent de s’envoler.

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