Renault Express : Super Cinq en bleu de travail !
Si la C15 peuple encore les routes de ma campagne berrichonne (lire aussi : Citroën C15), la Renault Express, sa principale concurrente, se fait plus rare. Pourtant, la camionnette au losange, produite de 1985 à 1997 (soit moins longtemps que la Citroën) se vendra à plus d’1,7 millions d’exemplaires, soit près de 500 000 unités de plus que la C15. J’ai une idée pour expliquer cela : la C15 était une voiture des champs passe-partout, vendue dans toutes les campagnes, tandis que l’Express était une voiture des villes, adepte de la livraison de proximité !
C’est d’ailleurs dans ces conditions que j’ai connu l’Express. Parisien de naissance, mes copains d’enfance du quartier Latin ne m’ont plus jamais quitté, de la maternelle jusqu’à aujourd’hui. Jeunes adultes, c’est dans la Renault Express du magasin de photo tenu par l’un de ces potes (Odéon Photo, alors situé Carrefour de l’Odéon) que nous avons écumé la capitale de soirées en soirées, ou direction la province pour des week-ends entre amis. Je me souviens de ce petit moteur nerveux, de son inconfort à l’avant, et de l’avantage d’un grand matelas à l’arrière pour s’éviter de la route sous l’emprise de l’alcool : en bref, une voiture de jeunes, capable de transporter 6 copains (sans ceintures, allongés à l’arrière, autre époque) et de servir de camping car, et qui le lundi retrouvait sa fonction première de camionnette de livraison.
Vous le voyez, mes souvenirs de C15 sont ruraux, et mes souvenirs d’Express sont urbains. De là à penser que leurs marchés respectifs correspondaient, il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement de façon absolument pas scientifique ! Si je pense que la C15 a aujourd’hui un potentiel de collection, à l’instar des AZU et Acadyane quelques années auparavant, je suis persuadé qu’il en sera de même pour l’Express, en digne successeur des Renault 4 Fourgonnettes et F4. La raison ? Un fort pouvoir nostalgique, une robustesse et une simplicité mécanique !
L’Express, comme avant elle la F4, fut la bête de somme de La Poste !Malgré une face avant spécifique qui la distingue totalement de sa donneuse, l’Express est dérivée de la petite citadine de Renault, la Super Cinq. Dérivée certes, mais pas copiée/collée puisque, outre son arrière rehaussé et tôlé (une version vitrée « civile » 5 places est aussi proposée dès son lancement), elle dispose d’un empattement plus grand, et, pour l’anecdote, d’un train arrière dérivé de ceux des sportives de la Régie, la Super Cinq GT Turbo (lire aussi : Renault Supercinq GT Turbo) et des 9 et 11 Turbo ! On trouvera aussi des version pick-up réalisés par des carrossiers, comme Durisotti, ou Gruau…
Côté moteur, on trouve 3 types de moteurs : en essence, l’offre commence avec les bons vieux Cléon-fonte, de 956 cm3 à 1397 cm3, et de 37 ch (ouch!) à 60 ch, mais à partir de 1991 (lors du restylage), le moteur Energy 1.4 litres et 80 ch (qui perd ses moteurs de base de 37 et 47 ch, ne conservant que les Cléon 1.2 et 1.4 litre). Côté diesel, ce sont les moteurs F qui prennent place sous le capot, en 1.6D de 55 ch et 1.9D de 65 ch. Des mécaniques solides, mais sûrement pas des foudres de guerre, mais était-ce vraiment le but de l’Express ? Anecdotique (et très rare), mais intéressante à collectionner, une version électrique sera proposée, avec une puissance faramineuse de… 21 kW, soit 30 ch environ !
Si l’Express, malgré sa plus grande diffusion, paraît plus rare aujourd’hui que les C15, c’est sans doute aussi parce que sa ligne est plus discrète, et pour tout dire, beaucoup plus élégante que sa concurrente aux chevrons (qui elle dérivait de la Visa). D’ailleurs, sa face avant spécifique la rendait même très différente de la Super Cinq… Autant dire que l’Express ne devait son succès qu’à elle-même, à une époque où chaque modèle de la gamme avait sa personnalité, contrairement à aujourd’hui (effet Volkswagen/Audi oblige) !
L’Express n’eut pas qu’une carrière franco-française. Fabriquée en France (à Maubeuge) et en Espagne (à Palencia ex-FASA), elle fut surtout exportée vers l’Allemagne, sous l’appellation Renault Rapid (un nom pourtant très Skoda), ou vers la Grande Bretagne, sous l’appellation Renault Extra (là-bas, le nom d’Express était déjà pris par… Talbot, lire aussi : Talbot Express). En 1997, l’Express laisse la place à la Kangoo, même si quelques versions de bases subsisteront le temps d’écouler les stocks.
Je sais que beaucoup de puristes regardent les utilitaires d’un mauvais œil, considérant bien souvent que la collection ou le mouvement « youngtimer » ne concerne que les voitures nobles, c’est à dire rares, sportives, exclusives ou luxueuses. Je fais quant à moi partie de ceux qui pensent que toute voiture est intéressante, pour peu qu’elle rappelle des souvenirs, et qu’elle permette de se faire plaisir. L’Express entre dans cette catégorie : elle a peuplé nos routes et nos rues durant des années, et mérite bien de retrouver un peu d’amour auprès de nostalgiques. En outre, sa simplicité mécanique permet de se faire la main pour qui voudrait se mettre à la mécanique. Enfin, cette voiture saura rendre encore bien des services, pour des petits déménagements ou pour aller à la déchetterie, devenu sport national aujourd’hui, le tout pour une bouchée de pain ! A vous de voir !