Seat Panda “Papamobile” : une puce blanche pour Jean-Paul II
Le Pape Jean-Paul II, dont l’élection eut lieu le 18 octobre 1978, fut plus que tous ses prédécesseurs un globe-trotter, sillonnant le monde entier pour rencontrer ses fidèles. C’est sous son pontificat que s’est fait sentir le besoin d’un véhicule spécifique pour permettre au Saint-Père de traverser les foules tout en étant visible de tous et en accordant sa bénédiction. Certes, Paul VI avait inauguré les “papamobiles” avec un Toyota Land Cruiser, mais c’est bien Jean-Paul II qui leur donna l’essor et la visibilité qu’on leur connaît. Toutes sortes de modèles servirent la papauté lors des voyages officiels, mais le plus étonnant reste l’étrange Seat Panda “Papamobile” qui servit au Pape lors de son voyage en Espagne en 1982.
Jusqu’à présent, la voiture la plus utilisée par Jean-Paul II était sa fidèle Fiat Campagnola modifiée, offerte en 1980, mais il disposait aussi d’un Mercedes Classe G et d’un Range Rover pour ses apparitions notamment italiennes. Pour la fin de l’année 1982, un voyage était prévu en Espagne du 31 octobre au 9 novembre. Le Vatican avait tout prévu, en particulier la rencontre avec des milliers de fidèles dans les stades de Santiago Bernabeu (Madrid) ou du Camp Nou (Barcelone). Les moindres détails avaient été réglés sauf un, et pas des moindres : début octobre, à quelques jours du départ, on s’aperçut qu’aucune des voitures habituelles du Saint-Père ne pouvait accéder à l’intérieur des stades, trop larges de quelques centimètres.
Une papamobile en urgence
Catastrophe au Vatican car en aucun cas il ne fallait que le Pape soit à pied, tant pour des questions de standing que de sécurité. Il fallait pouvoir évacuer au plus vite Jean-Paul II en cas d’attentat d’autant que l’année précédente, le Pape avait failli y passer après la tentative d’assassinat d’un jeune Turc sans doute un peu illuminé. Il fallait donc trouver rapidement une solution.
C’est ainsi que le constructeur espagnol Seat, situé à Martorell à proximité de Barcelone, fut contacté par le service de sécurité du Pape à la mi-octobre. Il fallait en urgence réaliser une “Papamobile” suffisamment petite pour pouvoir conduire le Pape dans les enceintes sportives. Depuis 1980, la firme espagnole produisait sous licence Fiat la Panda. Voilà typiquement le genre d’automobile suffisamment petite pour circuler dans les étroites voies d’accès aux pelouses. Ce fut donc ce modèle que choisirent les ingénieurs de chez Seat.
La Seat Panda à la rescousse
Ce fut l’un des véhicules de pré-série jusqu’alors dédié au transport de pièces détachées au sein de l’usine qui fut prélevé en urgence. Les hommes de Seat firent ensuite marcher la disqueuse pour décapsuler la petite voiture dont il ne subsistait plus que le pare-brise, devenu rabattable par ailleurs. La Panda fut ensuite renforcée et reçut en outre des arceaux afin de permettre au Saint-Père de se tenir debout sans risquer la chute.
Cette Panda très spéciale reçut aussi des porte-drapeaux à l’avant, afin d’y glisser celui de l’Espagne d’un côté et celui du Vatican de l’autre. En moins de 15 jours, la voiture était prête à recevoir cet invité de marque qu’était Jean-Paul II. Étrangement, on ne prit pas la peine de concevoir la fameuse “cloche” blindée transparente protégeant le Pape des balles et devenue indispensable depuis l’attentat de mai 1981. À cela plusieurs explications : le temps manquait sans doute, mais plus sûrement, cette cloche aurait rendu la voiture trop haute pour traverser les tunnels menant aux stades. Enfin, la voiture aurait été trop lourde pour le modeste moteur de 35 chevaux de la petite espagnole.
Un incendie fit craindre pour la Panda
On prit donc le risque et le Pape put se rendre dans cet étrange équipage rencontrer ses fidèles. Le voyage terminé, la brave Seat Panda “papamobile” prit la direction des réserves de la marque espagnole, à Martorell. L’histoire ne s’arrêta pourtant pas là. Si la petite Panda n’eut pas à craindre un attentat en 1982, elle eut pourtant très chaud un jour de la fin février 2019. Alors qu’elle coulait une paisible retraite dans les locaux servant de remise aux véhicules historiques, un incendie se déclara. Le drame de Brown Lanes, l’usine Jaguar de Coventry, allait-il se reproduire en Espagne ?
Heureusement, les pompiers de la ville furent vite sur place pour maîtriser l’incendie, tandis que de nombreux employés du site avaient pris le risque de sortir une par une les voitures de la réserve, en particulier celle du Pape qui, de fait, fut sauvée des flammes ! Elle est désormais à nouveau en sûreté, et visible de temps en temps au “Museo Seat”.