Seat Exeo : une allemande à Martorell
La semaine dernière, j’essayais pour la première fois une Seat, la Leon, dont l’article viendra bientôt. En essayant de m’éclaircir les idées, dans l’avion, sur ce que j’avais ressenti, mon esprit s’est alors évadé. Je me rendais compte que j’avais peu ou pas parlé de Seat, du moins dans sa période « Volkswagen ». J’avais certes évoqué la 800 (lire aussi : Seat 800), la Ronda (lire aussi : Seat Ronda) ou les rares coupés et HPE Beta produits sous licence Lancia (lire aussi : Seat Lancia Coupé et HPE). Mais à part le concept Seat-Vaillante (lire aussi : Seat Ibiza Vaillante Concept), rien, que dalle, nada sur les Seat « modernes ». C’est alors que, perdu dans les nuages entre Biarritz et Paris, m’est revenue en mémoire la Seat Exeo.
L’Exeo n’est pas si lointaine, puisqu’elle est apparue en 2009, mais aura connu une courte carrière, les derniers modèles tombant des chaînes en 2013. Un peu plus de 4 ans dans la gamme, comme un cheveu sur la soupe à l’époque où le style Seat se cherchait un poil : quelle différence entre une Seat Leon II toute molle contemporaine, et ce pur style germanique tout juste retouché à l’avant comme à l’arrière. Volkswagen employait là une méthode éprouvée (mais d’habitude plutôt en Afrique, Amérique Latine ou Chine) : refourguer un modèle déjà retiré du marché allemand (en l’occurrence l’Audi A4 B7, remplacée en 2008) sur un marché moins riche ou moins porteur. A la différence ici qu’il s’agissait de l’Europe. Une façon de combler un vide dans la gamme Seat d’une berline à coffre (ou d’un grand break familial) à moindre coût, en amortissant encore plus s’il en était besoin des produits d’ores et déjà largement rentabilisés.
La Police italienne aura droit à des Exeo Estate ST, juste retour des chosesCela dit, là où les marques occidentales n’hésitaient pas à refourguer des modèles plutôt antiques dans les pays en voie de développement (comme Peugeot en Chine avec sa 505, lire aussi : Gangzhou-Peugeot 505 mais aussi dans ce même pays Audi, avec sa 100 devenue Drapeau Rouge, lire aussi : Hongqi CA 7200), pour Seat, on fit un effort en prenant « seulement » la précédente génération d’A4. Sûrement pour ne pas faire d’ombre à la nouvelle, la B8. Car tandis que sort l’Exeo B7 en Espagne, l’A4 B8 pointe le bout de son nez : on est à deux doigts du low cost.
Pourtant, l’Exeo n’est pas à proprement parlé une A4 au rabais : son style « latinisé » n’est pas dégueulasse, au contraire, gommant un peu le côté trop lisse de la marque aux anneaux avec un visage plus expressif. Hasard ou coïncidence, j’en ai croisé une ce matin dans mon Berry natal : il faut avouer qu’elle a encore de la gueule en 2017. Côté moteur, on récupère quasiment toute la gamme disponible sur l’Audi, du 1.6 de 102 ch, en passant par le 1.8 (120, 150 ou 160 ch), jusqu’au 2 litres (200 et 211 ch). En diesel, elle récupère les diesels de la B8 (2 litres TDI de 120, 143 et 170 ch). D’une teutonne un poil dépassée (mais il faut être pointu pour le remarquer) on passe à une ibère plutôt aguichante, à des tarifs forcément attrayants, point fort de Seat à l’époque, et encore aujourd’hui.
Cette voiture a quelque chose de très Boîtier Rouge : c’est une Audi sans l’être, une resucée pas désagréable avec un style bien à elle, des moteurs punchy parfois sans pour autant verser dans la sportivité (même si le haut de gamme ST offre une puissance déjà bien suffisante), un tarif plutôt sympa à l’époque (et encore plus sympa en occasion, une Exeo se revend mal versus une A4 B7). Surtout, elle a un petit parfum de rareté, puisque seuls 76 871 exemplaires seront fabriqués entre fin 2008 et 2012… Si l’on excepte 2008 et ses 383 ex, cela nous fait une moyenne d’un peu moins de 20 000 bagnoles par an. Dans la production de masse d’aujourd’hui, c’est une goutte d’eau. On ne peut d’ailleurs pas parler d’accident industriel à ce niveau là. Audi à refiler l’outil industriel à Seat qui l’a installé à Martorell pour produire sur place un véhicule qui ne coûtait pas cher tout en comblant un trou dans la gamme. In fine, l’Exeo sera remplacé par deux produits « maisons », la Toledo pour la berline et la Leon Estate pour le break. Pas sûr qu’on y ait gagné au change !