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BMW Z4M Coupé (E86) : « Que la force soit avec toi »

Par Jean-Jacques Lucas - 20/07/2022

En 1989, le petit roadster Z1 BMW inaugurait une lignée exclusive, vouée au design et à l’évocation d’un genre automobile en vogue dans les années 50 et 60. Les portières coulissantes et escamotables de cette auto renvoyaient au procédé des Kaiser Darrin 161 de 1954, dont les ailes avant avalaient l’huisserie. Une décennie plus loin, la Z8 de 1999 rappelait la légitimité de BMW à construire et industrialiser ce type de raffinement automobile voué à la plaisance routière de grand cru classé. La Z3 avait fait le sillon, les Z4, depuis 2003, ont fait la tradition et rempli leur office. Au cœur de la première décennie du siècle, un coupé trapu et plein comme un œuf, la Z4M, coiffa trois années durant cette petite gamme. BMW revenait, en 2009, au seul roadster pour la Z. La Z4M de 2020 n’existe plus qu’en roadster au 3 litres turbocompressé de 340 ch et à la caisse expansive, au maniérisme carrossier.

BMW Z4 M Coupé capot ouvert

Airs de famille entre BMW

Entre 2003 et 2005, le roadster Z4, successeur des Z3 de BMW, disposait dans sa première version de deux motorisations, un L4 de 2 litres (1 995 cm3) et trois L6, en 2,2 litres (2 171 cm3), 2,5 litres (2 494 cm3) et 3 litres (2 979 cm3). La deuxième version commercialisée de 2006 au printemps 2009 conservait le L4, perdait le L6 2,2 litres et se voyait amplifiée d’un échelon M de 3,2 litres (3 246 cm3), identifié par son nom de code E86 en coupé. L’initiatrice Z3, entre 1996 et 2002, avait eu sa version M, 3,2 litres, en deux niveaux de cylindrée successifs, 3 201 cm3 pour 321 ch entre 1998 et 2001, puis 3 246 cm3 pour 325 ch en 2001 et 2002. Le coupé Z3 connut ces deux nuances du 3,2 litres, dans une version abondamment vitrée, un peu à la façon de feue la MGB GT. Dans cette catégorie de petits coupés trapus et musculeux, compte non tenu des caractéristiques techniques, la Triumph GT 6 Mk2/Plus paraît être un ancêtre formel de la Z4 et, dans une toute hypothétique cousinerie ultérieure, une Ginetta G40, ou encore les TVR T350 et Griffith de 2018. On aurait pu regarder aussi du côté de la Tuscan, quasi contemporaine de cette Z4, ou des rares Wiesmann GT au V8 BMW.

La division bientôt quinquagénaire M Motorsport GmbH, née en 1972, avait commencé, dans la certes petite série routière, par la sommitale M1 de 1978. Dans sa série « futuriste », sans crainte du paradoxe, M, pas le chef de James Bond, avait conçu la néo-rétro Z8 justement « bondisée » (« Le monde ne suffit pas », 1999) et produite à 5 700 exemplaires tout de même. « Futuriste » parce que l’initiale Z énonce cette vection vers l’avenir, renvoyant au substantif « Zukunft », le futur en allemand. Qu’elle soit 3, 4 ou 8, une Z annonce alors l’avenir « béhemmevémien ». M’enfin, BMW Zukunft 4, ne sonne pas juste, alors que 4 consonnes à scrabbler font très technique, sérieux, martial. Après tout, il ne s’agit que d’une auto et, au nom de baptême, nul constructeur n’est soumis.

Voiture BMW Z4 M coupé vue de devant
Voiture BMW Z4 M coupé vue de derrière

Le modèle Z4M Coupé E86 est presque un haut lieu du répertoire BMW

Comme l’évoquaient les essayeurs de 2006, que ce soit Yves Bey-Rozet pour Sport Auto (n° 534, juillet 2006) ou Jean-François Marchet pour AUTOhebdo (n° 1548, 31 mai 2006), cette Z4 M a un côté GT « à l’ancienne », mais équilibrée. Le moteur à l’avant, le train arrière propulseur portant 50 % du poids de l’auto, le poste de pilotage reculé lui donnent une allure de dragster sur ses gros 255/40R18 à l’arrière, l‘avant étant muni de 225/45. La fadeur de la proue porte des relents du biodesign cher à la fin du siècle. En revanche, le répertoire formel choisi par l’équipe de Chris Bangle renvoie tout le modelé sur l’arrière, sitôt la portière, en contrepoint de l’allongement de l’avant. Le train arrière est repoussé à la limite, annulant le porte-à-faux par ailleurs peu prononcé à l’avant. La grammaire de cette Z4 M, appuyée sur ses gros pneus arrière, énonce la source du mouvement, celle de la puissance venant de l’avant allongé, châsse du L6. Les ailes enflées, débordantes, sur le train arrière confirment l’effet dragster, la puissance brutale. La R5 Turbo de 1980 ne s’y prenait pas autrement. La cellule s’achève comme posée sur ce bassin, et n’est pas étrangère au dessin de la poupe du coupé Laguna postérieur présenté, en 2007, au Salon de Francfort.

La sublimation de la série 3, c’était la M3, mais alors, la Z4M continuait la transfiguration

La mécanique de la M3 E46 (L6, 91×87, 3 246 cm3 et 343 ch) est enchâssée dans cette voiture râblée. C’est en fait celle de la E36, à peine augmentée en cylindrée mais plus forte d’une vingtaine de chevaux. La collection technique la dit munie d’un train arrière multibras, d’un contrôle de stabilité débrayable et d’un autobloquant fait d’un système multidisques hydraulique à pompe, ainsi que d’une boîte manuelle à 6 rapports. Le poids s’avère contenu, l’auto est agile malgré les 14 quintaux. Les journalistes-essayeurs regrettaient en 2006 le manque d’endurance des freins aux disques augmentés de la Z3 M (345 mm à l’avant et 328 à l’arrière). L’embrayage, à la course longue, était réputé ferme : « Levier de vitesses à débattement réduit et verrouillages bien marqués, petit décalage entre l’action sur la pédale et l’accélérateur (typique fly by wire), tout cela oblige à soigner la synchronisation de ses mouvements pour ne pas provoquer d’à-coups de transmission » (AUTOhebdo n° 1548, p. 45).

Le fameux bouton « Sport » de la Z4M Coupé

Le fameux bouton « Sport » change la donne : « En conduite sage à basse vitesse, sans pousser les régimes, l’exercice est plus délicat et peut se compliquer quand on opte pour la loi d’accélérateur sport à l’aide du bouton placé sur la console centrale » (idem). Ces testeurs relevaient la tendance au sous-virage mais louaient l’adhérence presque imperturbable en courbe, bref une voiture à piloter pour peu qu’on en ait l’aptitude. Au bout du compte, à quoi confronter ou comparer la Z4M ? L’architecture de la Porsche Cayman contemporaine (type 987) s’oppose au classicisme structurel de la BMW, avec son 3,4 litres (3 386 cm3) de 295 ch. Est-il raisonnable de la mettre en miroir de la 911 Type 997, aussi lourde et puissante (1 420 kg et 355 ch) et, tant qu’à faire, de la GT3 996 (360 ch) ? De même, la Z4 3.0Si, au L6 en magnésium et aluminium des 130i et 330i, n’était pas une Z4 de moindre registre, mais homogène et de belle facture, vendue à trois fois plus d’exemplaires que la superlative, soit plus de 12 000 à la 3 litres contre 4 275 au coupé M. Sur le terrain de la 3 litres croisaient les Cayman (987) 2,7 litres ou les Audi TT 3,2 litres.

Voiture BMW Z4 M coupé vue de l'intérieur sur le volant
5.1sec0 -100km/h
343cvPuissance moteur
3.2LCylindrée

Le coupé Z4M n’a duré qu’un tiers de décennie. Présenté au Salon de Francfort en septembre 2005, retrouvé au Salon de Genève en mars 2006, au moment de sa commercialisation, sa production cessa en 2009. Son successeur ne conservait que le roadster, qui se vend mieux. Mais en 2019, un type de coupé proche du Z4 M de 2006 semble assurer la descendance industrielle. Cependant, c’est chez Toyota qu’il faut considérer l’ouvrage, une Toyota motorisée par BMW. Le moteur de la Z4 habite la GR Supra, avec le 3 litres 340 ch de la Z4M actuelle ou le 2 litres turbo 258 ch de la Z4.

Voiture BMW Z4 M coupé vue de devant sur un arrière fond de mer
Voiture BMW Z4 M coupé vue de de côté sur un arrière fond de mer
Voiture BMW Z4 M coupé vue de de derrière sur un arrière fond de mer



Texte : Jean-Jacques Lucas

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