BMW M1 : la matrice Motorsport !
Les années 70 ne furent pas de grandes années pour les automobiles puissantes et dotées de gros moteurs. Avec deux graves crises du pétroles en 1973 et 1979, cette décennie tua bien des initiatives. Aujourd’hui, la mode est à la supercar, et c’est le créneau premium qui s’en sort le mieux. Dans les seventies au contraire, on assista à un effondrement des grosses cylindrées et à l’explosion des berlines populaires !
Bien des voitures de l’époque n’eurent pas le succès qu’elles méritaient. Je pense à la Monica qui aurait pu devenir la « Jaguar » française, ou à la Citroën SM, mais il n’y eurent pas qu’elles. Chez nos amis allemands, il y eut aussi quelques bides dus à ces satanées crises pétrolières, même si là-bas, les gros moteurs s’en sortirent mieux. C’est ainsi que la superbe BMW M1, et son fabuleux 6 cylindres « M88 », née entre les deux crises, resta très confidentielle malgré son dessin superbe et ses performances étonnantes pour l’époque.
Dans les années 70, BMW est clairement en train de monter en gamme, avec dans le viseur son compatriote Mercedes. Béhème dans les seventies, c’est un peu Audi dans les nineties. La série 3 (lire aussi : E21) révolutionne le segment des berlines compactes, tandis que les Série 5 (E12), série 6 (E24) et 7 (E23) installent durablement la marque sur le marché des berlines et coupés de luxe. Mais la marque munichoise ne veut pas s’arrêter là et veut se différencier de Mercedes en s’inscrivant dans une tendance plus sportive et moins bourgeoise.
C’est ainsi que naîtra le département Motorsport, destiné à mener la politique sportive de BMW mais aussi à construire les modèles les plus sportifs de la gamme. Aujourd’hui, chacun sait bien ce que ce M collé sur la calandre veut dire, mais à l’époque, il s’agissait de marquer les esprits et de démontrer les capacités sportives de BMW. Si Motorsport aujourd’hui ne fait que travailler sur des modèles existants de la gamme (M3 pour la Série 3, M5 pour la série 5 etc), il fallait pour lancer la machine frapper un grand coup avec un modèle spécifique.
C’est ainsi que naquit la M1 (pour Motorsport 1) en 1978. Alors que BMW jouait sur le mimétisme du reste de sa gamme (une 3 ressemblait à une 5 qui ressemblait à une 7), la M1 jouait la carte de la différence malgré un petit double haricot sur la calandre. Dessinée par Giugiaro, elle est d’une criante modernité encore aujourd’hui, et sa ligne inspira pour longtemps les designers (les Ferrari des années 80 ont un petit air, tandis que la Venturi française lui ressemble beaucoup). Il n’y a pas à dire, c’est une belle voiture.
La M1 est un ovni dans la gamme : châssis tubulaire réalisée en Italie (Lamborghini travailla un temps sur le projet avant que les allemands ne récupère le bébé), carrosserie en fibre de verre, et surtout un moteur spécifique placé en position central arrière. Ce fameux M88 (qui équipera d’autres modèles par la suite) est un 6 cylindres en ligne 24 soupapes, de 3,5 litres de cylindrée développant la bagatelle de 277 chevaux (une puissance très respectable à l’époque pour un poids de 1300 kg). Mine de rien, la M1 pouvait atteindre 262 km/h.
Hélas, il ne suffit pas de proposer une technologie de pointe et un superbe design. La M1 eut à subir plusieurs handicaps : tout d’abord le manque d’image de BMW pour cette catégorie à l’époque, et ce malgré l’engagement des M1 en Groupe 4 (endurance) ; ensuite, un tarif stratosphérique de 330 000 F de l’époque (là où une Ferrari BB512 dotée d’un V12 de 360 ch coûtait 295 000 F) ; enfin cette deuxième crise pétrolière un an après sa naissance qui réduisit les ambitions à néant. Seuls 399 exemplaires seront produits jusqu’en 1981 (sans compter les modèles destinés à la course, une soixantaine environ).
Alors oui, la M1 fut un échec commercial et coûta cher à BMW ! Mais la marque à l’hélice était prête à payer pour apprendre. Cette M1 marqua tout de même les esprits, et installa BMW dans le monde de la performance. Toutes les M qui suivirent trouvent leur légitimité dans cette M1 originelle, matrice des sportives béhèmes ! Elle est aujourd’hui très recherchée (le prix de sa rareté sans doute) et il vous faudra disposer d’un sacré paquet d’euros pour l’acquérir (plus cher qu’une Ferrari Testarossa!) : c’est une petite revanche pour la mamie de chez Motorsport.