BMW 2002 Tii : le sport s’affirme enfin
Dans les années 60, c’est plutôt Alfa Romeo qui s’affirme comme la marque sportive grand public avec ses Giulia, qu’elles soient berlines ou coupés “Bertone”. Du côté de Munich, on sent qu’il y a un coup à jouer sur ce créneau-là et BMW va y parvenir à la toute fin de la décennie en lançant la 2002, dont les dérivés sportifs Ti puis Tii vont marquer les esprits… Ces derniers vont vite devenir les idoles des jeunes cadres dynamiques avides de sensations comme de qualité toute germanique. Avec ce coup de maître, BMW prend le leadership des petites sportives compactes, un rôle qu’elle ne lâchera plus jamais par la suite. Retour sur la BMW 2002 Tii, l’incontournable compacte performante du début des années 70.
Revenons quelques années en arrière. À la fin des années 50, la vénérable firme allemande BMW n’est pas encore celle que l’on connaît aujourd’hui. Malgré de beaux produits (comme la superbe 507), sa gamme est totalement incohérente et peine à trouver sa clientèle, allant même jusqu’à produire la petite Isetta qui n’a pourtant rien à voir avec les autres modèles. La faillite est toute proche et il faut l’intervention d’un petit actionnaire jusqu’alors, Herbert Quandt, pour sauver l’entreprise. Pour renflouer les caisses, il prend la majorité des parts de l’entreprise, mettant la main sur une future pépite. Car l’homme n’est pas un philanthrope. En tant qu’actionnaire, il sait qu’une petite bombe se prépare en coulisse : la berline 1500, appelée “Neue Klasse”.
La Neue Klasse sauve BMW
Lancée en 1962, la 1500 va enfin permettre à BMW de s’affirmer et de retrouver le succès commercial. Dessinée par le designer italien Michelotti, c’est un équilibre d’élégance et de sobriété. Rapidement, la voiture va développer son offre moteur, devenant 1800 (1963), 1600 (1964) et 2000 (1966) selon les motorisations. Pour ratisser plus large mais aussi toucher une clientèle plus hédoniste et plus sportive, BMW lance la série des “02”, version coach deux portes : 1600-2 puis 1602, 1802, 2002 et 1502 en entrée de gamme. Avec son moteur 2 litres de 100 chevaux, la 2002 commence à envoyer du lourd, mais BMW, revigorée par son retour en grâce, décide d’en offrir une version encore plus performante, la 2002 Ti.
Jusqu’à présent, et depuis 1967, c’était la 1602 Ti qui assurait le rôle de sportive au sein de la gamme, avec son 1.6 litre porté à 105 chevaux. Mais avec la 2002 lancée en 1968, il semble possible d’aller encore plus loin. Six mois après son lancement, la 2002 Ti prend la place qui lui revient, avec une version améliorée du 2 litres à deux carburateurs double corps et ses 120 chevaux. Outre ce M10 gavé aux hormones, BMW s’attache à rendre l’ensemble de la caisse plus sportive, avec notamment un châssis plus rigide et un freinage revu à la hausse pour freiner une telle cavalerie. Produite jusqu’en 1971, cette 2002 Ti montre la voie à suivre : du sport, encore du sport. Avec 16 448 exemplaires écoulés, BMW tient la preuve du marché en train de naître, et veut profiter d’un certain déclin du rival italien Alfa Romeo.
Après la 2002 Ti, place à la Tii
Il n’en faut pas plus pour en remettre une couche. Si la 2002 Ti tire sa révérence en 1971, c’est pour laisser la place à une nouvelle petite bombe, la 2002 Tii… Un i supplémentaire qui a son importance puisqu’il signale la présence du M10, cette fois équipé d’une injection mécanique Kugelfischer : à la clé, 130 chevaux, une puissance vraiment respectable à cette époque sur une compacte, d’autant qu’elle est particulièrement légère. Avec seulement 990 kg, la 2002 Tii affiche des performances respectables : 186 km/h de vitesse de pointe et un 0 à 100 en 9,4 secondes. BMW prouve ainsi son talent de motoriste et l’image de la marque est désormais bien installée.
Le caractère sportif de la 2002 Tii et ses performances ne sont pas les seuls atouts de ce petit coach : malgré l’austérité d’un intérieur qui deviendra lui aussi une marque de fabrique, la voiture concilie ce qui semblait inconciliable avec une voiture sportive auparavant : plaisir de conduire et fiabilité. Car la voiture est sûre à tous points de vue (sauf sur le mouillé évidemment, mais c’est aussi une marque de fabrique) : elle ne laisse pas craindre la panne à son propriétaire et est construite pour durer. On peut même opter pour encore plus de sportivité avec une boîte 5 vitesses “sport” et un pont autobloquant.
Succès commercial et affirmation sportive de la marque
La 2002 Tii sera produite jusqu’en 1975 à 38 703 exemplaires : encore mieux que la 2002 Ti, preuve s’il en est d’un marché en pleine expansion. Cette année-là, BMW renouvelle sa gamme avec une E21 plus moderne étrennant l’appellation “Série 3”. Avec l’apparition de la Golf GTI et des petites sportives en général, BMW décide de s’embourgeoiser en préférant doter ses “sportives” d’un 6 cylindres en ligne. Il faudra attendre la M3 E30 pour revenir au concept d’une sportive 4 cylindres chez “Béhème”. Malgré son non-remplacement modèle pour modèle, la 2002 Tii a prouvé le talent de BMW tant en matière de construction durable que de talent mécanique. La marque peut dès lors s’installer confortablement dans son rôle de constructeur premium sportif.
Aujourd’hui comme à l’époque, la 2002 Tii est très recherchée. Forcément, elle garde les mêmes qualités dynamiques tout en démontrant les bienfaits d’un excellent assemblage, et la cote s’en ressent. Cependant, elle offrira à son nouveau propriétaire les joies d’une voiture performante et joueuse et lui permettra de découvrir les propulsions à l’ancienne, sans aide électronique corrigeant les tendances aux tête-à-queue, en particulier sur terrain gras. On pourrait croire que c’est un défaut alors qu’au contraire, c’est un vrai plaisir, et c’est bien ce qui fait la différence avec les sportives traction que sont les GTI. Et vous alors, quelle philosophie choisissez-vous ?