Bentley Val d'Isère by Jankel : un vrai conte de Noël !
Vous n’avez vraiment pas eu de chance. Petit, vous rêviez de la Volvo 240 Break, le must à vos yeux d’enfant. Mais dans votre richissime famille, rouler dans d’aussi roturières voitures n’était pas concevable. « Un break ? De chasse à la rigueur » disait votre Lord de père qui ne roulait, bien entendu, que dans des voitures de luxe britanniques, Bristol, Bentley, Rolls Royce ou bien Aston Martin. En 1989, vous avez enfin 20 ans, l’âge de conduire et de dépenser l’héritage comme bon vous semble pourvu que cela soit cher. Vous auriez pu inventer le slogan de Renault « pas assez cher mon fils », mais comme vous ne travaillez pas, on ne risquait pas de vous voir phosphorer dans une boîte de pub à la mode !
Heureusement pour vous, Robert Jankel, héritier comme vous d’une famille fortunée, est doué pour savoir ce que vous et vos semblables attendiez ! Passionné de voitures, le petit Bob avait déjà fait ses armes dans l’industrie automobile en fondant la marque Panther (lire aussi : Panther Lima et Kallista). Après avoir revendu son affaire à des coréens, il s’était consacré à ce qu’on pourrait appeler un sacerdoce : satisfaire les désirs les plus fous de tous les excentriques lords britanniques, mais aussi (et surtout) ceux des princes, émirs, cheiks et autres sultans des monarchies pétrolières du Golfe et d’ailleurs.
Malin comme un singe, Jankel renouvelait le genre de la carrosserie, faisant fi du bon goût et ne se fiant qu’au compte en banque. Pour vous donc, Bob réalisa ce que vous attendiez depuis longtemps : un break Bentley Turbo R aux allures de Volvo 240 (ou l’inverse on ne sait plus très bien). Enfin, vous alliez goûter aux joies de la plèbe tout en maintenant votre rang. A vous et à 10 autres congénères (car seuls 11 exemplaires seront fabriqués), Robert Jankel proposera la « Val d’Isère ». Sur la liste des bons de commandes, des fous comme vous, ne sachant que faire de leur pognon, et en particulier ce rigolo de Sultan de Brunei, qui ne pouvait pas s’empêcher d’acheter tout ce qui sortait de l’ordinaire et qui coûtait cher. Un exemplaire fut construit en 1989, 2 en 1990, 7 en 1991 et un seul en 1992. Vous faisiez partie des « Happy few », ouf !
Peu importe que votre Bentley Val d’Isère siglée Jankel soit moche, quel bonheur d’aller chez Harrods faire vous course avec. Peu importe qu’elle coûte une blinde, puisque vous ne saviez pas à l’époque comment dépenser votre argent, et de toute façon, ce qui vous importait en descendant Regent Street, c’est que chacun puisse voir combien vous en aviez, de l’argent, pour vous offrir un si drôle de caprice.
Aujourd’hui, vous avez vendu votre Val d’Isère à un amateur de bizarreries, sans doute lecteur de Boîtier Rouge. Vous avez d’ailleurs tout vendu, car à force d’accumuler les résidences, les voitures, les mauvais investissements, les soirées à St Trop’ à boire du Dom Pérignon à 15 000 la bouteille, vous avez fini par tout perdre. Mais malgré tout vous êtes heureux : vous pouvez désormais rouler en Volvo 240, la vraie, l’unique, celle qui vous faisait réellement rêver ! Un vrai conte de Noël !