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Peugeot 203 : la berline prudente

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 09/04/2020

Quand on n’a qu’un seul modèle au catalogue, il ne faut pas se louper. Lorsqu’en octobre 1947 Peugeot présente sa première berline d’après-guerre, il est obligatoire de séduire la clientèle sous peine de disparaître rapidement. L’enjeu est donc crucial pour la 203 qui va logiquement jouer la carte du classicisme et de la fiabilité : des caractéristiques qui seront longtemps rattachées à Peugeot. Point de révolution à Sochaux, juste une voiture sérieuse comme un notaire de province, exactement ce qu’il fallait pour redémarrer prudemment.

La fin de la guerre en 1945 n’entraîne pas une reprise immédiate de la production automobile. Il faut remettre en état les usines parfois saccagées, et privilégier les utilitaires nécessaires à la reconstruction. Cela laisse le temps à Peugeot de peaufiner son projet dont les études ont déjà commencé durant la guerre : une berline de 10 CV suffisamment fiable, confortable et rassurante pour résister à la concurrence qui se dessine malgré le plan Pons, et capable de se décliner en une multitude de modèles afin de ratisser le plus large possible avec un seul et même investissement.

Un créneau unique : la voiture familiale

C’est là tout le génie de la gestion “à la Peugeot” : hors de question de partir tous azimuts tel un André Citroën, et sans le soutien de l’état comme Renault, il faut pouvoir rentabiliser l’investissement. En résulte une voiture très prudente, consensuelle, jamais la meilleure, mais toujours rassurante. En ligne de mire : le marché de la France provinciale, sérieuse et laborieuse, qui commence à avoir les moyens de s’offrir une automobile, mais qui désire la tranquillité d’esprit (une voiture fiable) et la tranquillité tout court (une voiture passe-partout). Elle doit en outre pouvoir transporter la famille sans souci.



L’autre bonne idée de Peugeot, c’est de choisir un créneau “central” : il s’agit d’une voiture intermédiaire, qui peut séduire une clientèle plus populaire ou plus haut de gamme. Alors que les autres constructeurs comme Panhard (avec sa Dyna X), Renault (avec sa 4CV) ou Citroën (avec sa 2CV) s’affrontent sur le créneau des petites voitures, Peugeot s’installe sur un secteur où seules des voitures d’avant-guerre lui sont opposées : Citroën Traction ou bien Simca 8.

La 203, une voiture qui assure

Du côté du style, la 203 vise juste aussi : elle s’inspire du style américain du début des années 40 alors que l’American Way of Life débarque en même temps que les GI’s, tout en conservant un certain classicisme, hésitant entre le style d’avant-guerre et le style Ponton. Les ailes sont encore bien présentes et rappellent un peu le monde d’avant, mais la carrosserie est monocoque, une première pour Peugeot !

Du côté du moteur, on trouve un 4 cylindres de 1.3 litres à culasse hémisphérique qui présente bien des qualités. Il est tout d’abord inusable et très fiable. Les 45 chevaux qu’il distille sont largement suffisants pour l’époque d’autant que ce bloc possède un autre avantage : une frugalité qui, en ces temps de restriction, s’avère décisive à l’heure du choix. Autant de petits détails qui font oublier une boîte de vitesse récalcitrante et peu agréable. On ne peut pas tout avoir.

La Découvrable 203 se veut plus luxueuse… Elle se vendra à plus de 11 000 exemplaires.

À l’intérieur, l’austérité règne, mais peu importe : 6 personnes peuvent prendre place sur les agréables banquettes, largement de quoi descendre toute la famille vers la Côte d’Azur pour les vacances, le tout sans risque de panne majeure. Descendre la Nationale 7 avec sérénité, c’est peut-être un détail pour vous, mais à l’époque ça voulait dire beaucoup. La voiture est lancée commercialement en 1948 et rencontre tout de suite le succès. Enfin, un succès limité par les approvisionnements, impliquant des listes d’attente. Il faudra attendre 1949 pour atteindre les 100 unités produites par jour, et 1950 pour atteindre les 200 alors que l’usine dispose d’une capacité de 300 exemplaires quotidiens.

La Familiale inaugure la série des breaks chez Peugeot !

La gamme se développe, succès commercial

Dès la fin des années 40, Peugeot va s’attacher à développer la gamme : berline découvrable en 1949, familiale (break) et fourgonnette tôlée en 1950, cabriolet et coupé (à la diffusion plus confidentielle il est vrai) en 1952, tandis qu’en 1953, la gamme reçoit quelques améliorations, dont 3 chevaux de plus. En 1955, Peugeot sort la 403, mais n’abandonne pas la 203 qui reste au catalogue jusqu’en février 1960.

Peugeot 203 Cabriolet (en haut) et coupé (en bas)

Avec cette politique de sérieux et de prudence, Peugeot attaque les années 60 avec sérénité (et notamment une nouvelle 404 séduisante). Certes, la marque n’a pas la flamboyance de Citroën qui lance une DS futuriste en 1955, ni les ambitions de Renault dont la nationalisation lui donne bien plus de moyens, ou l’ingéniosité de Simca sous la houlette d’un Henri Pigozzi roublard au possible, mais ses finances sont solides et sa clientèle fidèle. Elle peut alors imaginer élargir sa gamme tout en se laissant le temps de consolider ses acquis. Il faudra attendre 1965 et la 204 pour voir Peugeot proposer 2 modèles, c’est dire.

Une chose est sûre : la 203 aura été un vrai succès commercial. Avec 699 863 exemplaires produits entre 1948 et 1960, elle aura permis à Peugeot de survivre là où d’autres, comme Panhard, finiront par lâcher prise, faute de moyens. Reste aujourd’hui une voiture qui semble un peu démodée, mais qui conserve ses qualités d’antan : facilité et fiabilité. Une voiture idéale en somme pour se lancer dans une collection “populaire”.

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