SPORTS CARS
ITALIENNE
MASERATI

Maserati Quattroporte V : le renouveau du trident

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 02/03/2018

Depuis 1963, Maserati a toujours maintenu sa présence sur le marché des grandes berlines à tendance sportive, avec plus ou moins de réussite selon les générations. Et pour bien marquer leur différences avec les autres Maserati, la marques au trident n’est pas aller chercher loin en les appelant Quattroporte, tout simplement (je ne vous fais pas l’affront de traduire). En 2003, Maserati devenue totalement la propriété de Fiat, et sous l’égide de Ferrari, nous pondait un chef d’oeuvre pour 5ème génération, continuant l’oeuvre de rupture d’avec l’ère Biturbo initiée par la 3200 GT, et faisant subtilement appel au meilleur du passé des Quattroporte sans tomber dans le néo-rétro. Chapeau.

La Quattroporte I (en haut) et la rarissime Quattroporte II (en bas) sont toutes les deux signées Frua

Les Quattroporte font partie intégrante de l’histoire de Maserati. La première de la lignée, so 60’s, avait le mérite de lancer la série, et connut un succès d’estime pour une voiture artisanale : avec 776 exemplaires produits en 7 années et 2 séries, cette première génération montrait tout l’intérêt d’une telle exécution dans la gamme d’un petit constructeur de voitures de sport. Auparavant, on roulait en GT ou en limousine quand on avait de l’argent. Avec la Quattoporte, on pouvait concilier les deux mondes, et c’était une nouveauté. Avec 260 chevaux puis 290 chevaux tirés d’un V8 de 4.7 litres, on dépassait les 230 km/h allégrement !

La Quattroporte III (en haut) inaugure le style « biturbo » que la Quattroporte IV (en bas) clôturera

Ce premier succès fut suffisamment convaincant pour que le nouveau maître de l’officine de Modène, Citroën, lui donne une descendante. La Quattroporte II était novatrice sur bien des points (lire aussi : Quattroporte II), profitant de l’expérience de Citroën en matière de traction et de suspension. Mais avec un simple V6, et seulement 190 puis 200 chevaux, le concept de la voiture sportive était revu à la baisse. Dès lors, il ne s’agissait plus que d’une grande berline confortable et luxueuse. Et puis, les malheurs de Citroën ne permirent pas à cette Quattroporte II de s’imposer, ni même de se vendre : avec seulement 13 exemplaires, il s’agissait du bide le plus retentissant de la généalogie Quattroporte.

La Quattroporte V offre un nouveau style, pour des records de vente !

Le rachat par Alejandro de Tomaso avait de toute façon déjà enterré la Quattroporte II. Dès le départ, le flamboyant argentin avait rêvé de sa propre vision, qui prendra le nom de Quattroporte III (lire aussi : Quattroporte III). Un rêve qui ne prendra corps qu’en 1979. Son design carré et assez peu sportif (visuellement) n’empêchera pas la belle de rencontrer un certain succès, avec 2141 exemplaires produits jusqu’en 1990. Il faut dire qu’entre temps, la Biturbo avait renouvelé l’offre Maserati, et pour la première fois, d’autres 4 portes voisinaient avec la grande Quattroporte : les 425, 420, 422 et autres 430 se vendront à 6651 entre 1983 et 1994, soit 3 fois plus (lire aussi : les berlines Biturbo). Des Quattroporte qui n’en portaient pas le nom, et qu’on aurait pu comparer aujourd’hui à la Ghibli III (lire aussi : Ghibli III).

Etrangement, lorsqu’il fallut donner une descendante à la Quattroporte III, Maserati et Gandini s’inspirèrent plutôt de la lignée Biturbo 4 portes et proposèrent une charmante Quattroporte IV (lire aussi : Quattroporte IV). Particulièrement réussie, surtout dans sa dernière version « revue » par Ferrari appelée Evoluzione, elle réussira à séduire 2883 clients, clôturant l’ère Biturbo avec brio. Mais dès lors, Maserati, sous l’égide de Ferrari, souhaitait solder l’héritage De Tomaso, et revenir en force sur le marché des grandes berlines sportives.

La Quattroporte V de Pininfarina s’inspire de la I de 1963, signée Frua, surtout pour sa face avant

Cette fois-ci, c’est à Pininfarina que Maserati va faire appel. Et le réputé centre de style italien va aller piocher aux origines de la Quattroporte pour ce 5ème opus. Voyez notamment cette face avant, comme elle rappelle celle de la QP originelle ? Ces phares aux doubles optiques encadrant une calandre légèrement plongeante et proéminente. Bien sûr, les progrès de la carrosserie permette à la V de faire saillir les muscles, de faire onduler les lignes, et la mode est à la malle arrière moins marquée, mais de profil, la I et la V sont sans doute les plus proches stylistiquement. Adieu l’ère de Tomaso, oubliée l’ère Citroën, retour aux origines sans en faire des caisses, et la nouvelle Quattroporte, qui ne sortira que deux ans après la fin de la précédente, s’offre une légitimité tout en imposant son propre style, original, sportif et statutaire, à tel point que le restylage de 2008 restera très léger.

La sortie de la V est aussi l’occasion de d’un renouveau mécanique. La 3200 GT (lire aussi : 3200 GT) avait abandonné le V8 3.2 Maserati pour un 4.2 Ferrari, devenant 4200 GT ? Il en sera de même pour la Quattroporte, avec le même moteur offrant 400 chevaux ! Grâce à cela, la belle italienne récupérera le record de la berline la plus rapide du monde, avec 275 km/h ! Pas mal. Avec le restylage de 2008, la Quattroporte de base passe à 405 chevaux, tandis que la S s’offre un 4.7 porté à 430 chevaux, et la GTS le même moteur mais développant, lui, 440 chevaux ! Le tout pour un poids oscillant entre 1860 et 1990 kg tout de même.

A l’intérieur, on retrouve le luxe à l’italienne, si chaleureux, mais édulcoré des tendances baroques de ses devancières. Ce qu’on trouve charmant sur une Maserati des 70’s et 80’s devient vite kitsch sur une voiture des 00’s. Taillée pour faire renaître Maserati, la Quattroporte V va réellement relancer la machine : avec 25 256 exemplaires entre 2003 et 2012, elle va faire exploser les records des 4 portes au trident, dépassant le cumul de toutes les 4 portes produites jusque là à Modène ! A noter que Touring Superlegera en créera un dérivé break Bellagio (lire aussi : Maserati Bellagio).

Surtout, alors que les précédentes générations cherchaient leurs clients parmi une clientèle un peu excentrique, bien que riche, et adepte du décalage autant que du passage au garage, la Quattroporte V, elle, allait offrir l’originalité au plus grand nombre : rouler en Maserati n’était plus désormais une lubie, mais une marque de goût et de distinction, le tout avec une garantie de fabrication « à la Ferrari ». Mieux, une telle production durant dix ans permet aujourd’hui de trouver son bonheur parmi toute une gamme de prix, dont les plus faibles commencent à 15 000 euros (au 02/03/2018). Adieu les (gros) caprices mécaniques, les caractères trop pointus, les design trop baroques, place à une voiture de caractère sans être caractérielle. Attention cependant, les petits prix cachent tout de même l’obligation d’un entretien rigoureux : il s’agit quand même d’une « presque Ferrari » !

Cette « Maset’ » du renouveau a désormais été remplacée par la 6ème génération que Boîtier Rouge est allé tester en Italie récemment dans sa version la plus puissante, la GTS, équipée du fameux V8 (alors que les autres modèles se contentent d’un V6 Biturbo) développant 530 chevaux. Un essai à paraître très prochainement !

CarJager recommends

undefined
Maserati MC12 : ne l’appelez pas Ferrari !
« Bien plus rare qu’une Enzo construite à 400 exemplaires, la supercar de chez Maserati n’a, contrairement à sa cousine, connu aucune descendance »
Nicolas Fourny - 25/12/2022
Read more
undefined
Maserati Coupé et Spyder (4200) : le compromis grâce à Ferrari
La firme au Trident, passée des mains de Fiat à celles, plus expérimentées et adroites, de Ferrari, avait pu retrouver un peu de lustre en revisitant les dernières générations de Biturbo (Ghibli II et Quattroporte IV), puis accéder enfin à un peu de modernité avec la 3200 GT à la superbe plastique. Pourtant, il restait encore un peu de l’héritage “De Tomaso” qu’il fallait définitivement faire disparaître. La Maserati Coupé (et son dérivé spyder), notamment appelée 4200 GT, conserve la ligne générale de la 3200 et se « ferrarise ». Cet élan permettait à la marque à la fois de sortir de l’anonymat et de pousser les portes du marché américain.
Paul Clément-Collin - 22/07/2022
Read more
undefined
Maserati GranTurismo : un long dimanche de fiançailles
La carrière des Maserati GranTurismo et GranCabrio est symptomatique de la période incertaine et troublée que traverse l’industrie automobile italienne depuis de longues années déjà. Hormis Ferrari, dont la santé s’avère continûment éblouissante, les autres marques transalpines se sont souvent vues contraintes, faute de moyens, de prolonger au-delà du raisonnable la carrière de modèles souvent attachants mais frappés d’une cruelle et injuste obsolescence. Ce fut, entre autres, le sort de ces deux machines au positionnement baroque et aux ambitions floues — ce qui ne les empêche pas, aujourd’hui encore, de dispenser bien des joies à leurs conducteurs. À présent qu’elles ont quitté la férocité des comparaisons et des jugements, à présent qu’elles ont rejoint les rivages plus tranquilles d’une certaine forme d’hédonisme routier, penchons-nous, avec bienveillance et lucidité, sur les dernières machines de grand tourisme à moteur avant que la firme au Trident ait offertes au monde.
Nicolas Fourny - 30/10/2020
Read more

Selling with CarJager?