BMW Série 7 E38 : le summum de la perfection ?
En 1994, BMW sortait sa superbe série 7 E38. À la façon de la marque bavaroise à l’époque, elle faisait évoluer le design de la série 7 E32 de façon subtile, mais plus marquée qu’on ne pourrait le croire, faisant rentrer la grande berline à l’hélice dans le 21ème siècle sans en avoir l’air. Il suffit de voir qu’aujourd’hui, en 2020, l’E38 paraît encore totalement dans le coup pour saisir la force classique de son dessin. Un an plus tard, la série 5 E39 faisait de même en remplaçant habilement l’E34. En 1997, série 3 E36 laissait la place à l’E46 (1997) : BMW présentait sans doute l’une des gammes les plus cohérentes, en termes de style comme de performance, qui n’ait jamais existé. Retour son initiatrice, l’impériale Série 7 E38.
La précédente série 7 (E32), lancée en 1986, était déjà une réussite esthétique, signée Ercole Spada sous la direction de Claus Luthe. Statutaire et imposante, elle rivalisait sans mal avec l’ennemie à l’étoile, la Mercedes Classe S W126. Le programme de remplacement du navire amiral de BMW est lancé dès 1988 : il n’y a pas de répit dans le monde automobile. Il faut dire que Mercedes travaille déjà sur la W140 tandis que Audi a fait une incursion remarquée dans le monde des grandes berlines haut de gamme avec sa V8. Si elle ne rencontre pas le succès escompté, le monde de l’automobile n’est pas dupe : la marque à l’anneau ne se loupera pas deux fois et prépare d’ailleurs déjà (elle aussi) la remplaçante, l’A8.
La classe dans la continuité
Pour l’E38, BMW va jouer la carte de la continuité, comme elle sait si bien le faire depuis qu’elle a trouvé son style avec la Série 5 E12 et E28, et surtout la Série 7 E23. Sous la direction toujours de Claus Luthe, le designer autrichien Boyke Boyer va reprendre le dessin d’Ercole Spada comme base d’inspiration et faire ce qu’il y a de plus difficile : tout changer sans brusquer. La ligne générale semble identique à l’E32, les “tics” stylistiques de BMW sont bien là, mais l’E38 devient visuellement plus légère, plus fine et plus aérodynamique malgré un gabarit identique. Une prouesse qui se confirmera même sur les versions à châssis long. Avec l’E38, c’est l’heure de la subtilité. Une stratégie suivie par Audi dont l’A8 sort au même moment, en mars 1994, mais tout l’inverse de Mercedes qui, avec sa W140, a joué la carte contraire avec une voiture massive en rupture avec sa devancière.
Au moment de son lancement, l’E38 fait confiance aux moteurs largement éprouvés par l’E32 : un V8 de 3 litres et 218 chevaux en entrée de gamme (730i), un autre de 4 litres et 286 chevaux en haut de gamme (740i, qui passera à 4.4 litres en 1996 pour la même puissance). Les deux versions étant disponibles en châssis court ou long (730iL et 740iL). En 1995, la gamme s’élargit avec un 6 cylindres en ligne de 193 chevaux (728i), un V12 de 326 chevaux (750i) et un L6 diesel de 143 chevaux (725tds). C’est la première fois qu’une série 7 reçoit un moteur diesel. En 1996, la gamme des V8 s’élargit avec la 735i développant 235 chevaux. Du côté des diesels, l’année 1998 verra l’arrivée d’un nouveau L6 de 193 chevaux (730d) et d’un V8 biturbo de 245 chevaux (740d). Du côté des préparateurs, on s’en donnera à coeur joie avec des versions survitaminées, notamment chez Alpina, nous y reviendrons.
Débauche technologique
BMW est un motoriste, et de ce côté-là, le client est gâté avec une offre pléthorique et adaptée, mais la marque ne va pas se contenter de cela. Sa Série 7 qui va devenir un véritable démonstrateur technologique : la boîte de vitesse auto-adaptative AGS avec passages de vitesses manuels (Steptronic) ; l’apparition, dès 1996, du GPS (en option), une première pour l’époque même si cela paraît tellement évident aujourd’hui ; la télévision et le téléphone (en options là aussi) ; l’amortissement piloté (EDC) ; l’assistance de direction Servotronic ; les rétroviseurs électrochromes … Et la liste est longue, une débauche de luxe et de technologie dans une voiture belle à se damner.
Succès commercial
La Série 7 va vite devenir la plus désirable des grandes berlines. La W140 paie son look pachydermique, tandis que l’Audi A8 séduit, certes, mais n’a pas encore l’aura des deux marques précédemment citées. Un petit lifting fin 1998 apportera un peu de jeunesse à l’E38 qui va continuer sa carrière jusqu’en 2001 avant d’être remplacée par l’étrange E65 signée Chris Bangle. Comme si l’E38 avait atteint une perfection impossible à dépasser, et qu’il fallait tout changer pour repartir de l’avant (lire aussi : la controverse Bangle) ! Voiture de James Bond (Demain ne meurt jamais) comme de Tupac ou Karl Lagerfeld, partageant son V8 avec Bentley et son V12 avec les Rolls-Royce, la BMW Série 7 E38 aura marqué la fin des années 90.
Entre 1994 et 2001, 340 242 exemplaires sont sortis de l’usine de Dingolfing, soit plus que l’E32 (311 068) sur une durée comparable. Aujourd’hui, cette grande berline est encore considérée comme de l’occasion et, comme sa petite soeur E39, permet de faire d’excellentes affaires, de profiter de moteurs enchanteurs et d’équipements de luxe comme les grands de ce monde à leur époque. Attention, si cette BMW bourrée d’électronique est fiable à ce niveau là (peut-être même l’une des plus fiables), comme mécaniquement d’ailleurs, elle nécessite, comme toute voiture de cet acabit, un entretien rigoureux et donc parfois onéreux. En contrepartie, elle vous en offrira beaucoup tout en restant tout à fait dans le coup : qui peut dire en la voyant aujourd’hui que son dessin date d’il y a plus de 25 ans ? Personne, alors foncez !