Alpina B12 (E38) 5.7 et 6.0 : tuning de luxe
Oui, le titre de cet article peut paraître paradoxal. Comment peut-on oser parler de tuning et de luxe dans la même phrase, quand le premier mot peut sembler de mauvais goût et inutilement tapageur, et le deuxième synonyme de discrétion et de bienséance ? C’était oublier une clientèle en plein essor dans les années 80, une clientèle « bling-bling » de plus en plus riche et de plus en plus ostentatoire. Les améliorations apportées par Alpina, devenu constructeur à part entière au début des années 80, restaient certes relativement discrètes mais semblaient davantage convenir à une BMW Série 3 ou, au pire, à sa grande sœur la Série 5. Pourtant, à Buchloe, on n’hésita pas à s’attaquer à la grande Série 7 E32 dès 1988, plus limousine que sportive, pour en décliner une atypique version B12. Cette dernière sera déclinée par la suite dans sa version E38, celle qui nous intéresse aujourd’hui.
Aujourd’hui, le “bespoke” ne choque plus personne, et même Mansory a pignon sur rue. Dans les années 80 et au début des années 90, on parlait plutôt de tuning. Alpina échappait un peu, comme certains de ses confrères (Hartge par exemple), à cette appellation : vrai constructeur, il proposait des versions abouties et très différentes de la base BMW à laquelle elles se rattachaient. Paradoxalement, le caractère un peu plus bourgeois (du moins à partir du moment où BMW se lança véritablement dans le sport avec la M3 E30) des Alpina ne transpirait pas dans leurs décorations plutôt voyantes : jantes larges à bâtons de couleur blanche, liserés dorés et gros logos donnant à ces berlines des airs de bad boy.
Une limousine explosive
Plus bourgeois ? En réalité, ce typage un peu différent ne vint qu’à partir de la M3 E30, on l’a dit (avec les B6 E30 puis B6 E36), et de la M5 E34 (B10 chez Alpina). En revanche, un tout nouveau terrain de jeu s’offrait à la petite marque avec la Série 7 E32 : en devenant B12 (5 litres puis 5,7 litres), elle permettait à une certaine clientèle de marier statut social (limousine, V12) et sportivité affirmée : une clientèle réduite cependant à 97 clients pour la première, et 57 pour la seconde. Mais c’est oublier le côté artisanal de la petite firme allemande, pour laquelle ces faibles volumes ne sont pas un obstacle. Avec la sortie de la Série 7 E38 chez BMW, Alpina allait exploiter la même recette : celle d’une limousine vitaminée et grimée !
C’est en 1995 que fut présentée la B12 5.7 E38 : cette dernière s’offrait le tout nouveau V12 M73, mais dans une version revue à sa sauce. La cylindrée passait ainsi de 5.4 à 5.7 litres (comme son nom l’indique) et le bloc recevait de nouvelles culasses, de nouveaux pistons, ainsi qu’un système d’admission d’air modifié : résultat, plus de 60 petits canassons s’ajoutaient aux 322 du départ, pour une somme coquette de 382, le tout transmis via la « Switch Tronic » à 5 vitesses ! La base restait celle de la 750i/iL, mais la décoration extérieure devenait plus voyante, avec le traditionnel liseré et le lettrage dorés, un gros logo à l’arrière, les fameuses jantes de 20 pouces et un becquet arrière.
De plus en plus gros, de plus en plus puissant
Cette première mouture sera produite jusqu’en 1998 à 202 exemplaires (soit deux fois plus que les deux B12 E34 précédentes). Elle sera remplacée dès 1999 par la B12 6.0. Cette fois-ci, le M73 (dans sa version catalysée) passait donc à 6 litres, tandis que diverses nouvelles modifications lui permettaient de dépasser la barre symbolique des 400 chevaux (pour atteindre la puissance respectable de 424 chevaux, un chiffre encore peu courant sur des berlines, même dotées d’un V12). Elle sera produite jusqu’en 2001 à 94 unités avant d’être remplacée par la toute nouvelle B7 basée sur la Série 7 E65.
Le prix de la rareté
Avec une production aussi limitée, il sera de toute façon difficile d’en trouver un exemplaire à bas prix, la rareté se payant au prix fort (et encore plus concernant la B12 6 litres), mais sait-on jamais ? Une telle limousine, encore plus luxueusement équipée que la 750 donneuse et quasiment aussi performante que des berlines sportives de catégorie inférieure, s’avère particulièrement séduisante et reste, malgré tout, plus abordable qu’une supercar de la même époque, tout en conservant une fiabilité et une polyvalence bien plus intéressantes. Certes, il faudra supporter cette décoration un peu voyante (mais on finit par s’y habituer, et il serait même presque dommage de s’en passer) mais quel plaisir à son volant ! Et puis, un V12 c’est déjà pas courant, alors que dire d’un V12 passé chez Alpina ?