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Triumph GT6 : La Spitfire en plus méchante

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 16/01/2023

Depuis 1962, le swinging London s’éclate avec un petit roadster de chez Triumph dont le nom résonne de la gloire de la bataille d’Angleterre, le Spitfire. Malgré son nom guerrier, la Triumph Spitfire reste un jouet économique, rigolo, simple à entretenir, un vrai truc de jeune. Pourtant, il existe une certaine clientèle exigeant plus de watts et un vrai toit, bref plus de sportivité. Aussi, en 1966, Triumph présente sa GT6, une Spitfire fastback dont le 6 cylindres en ligne propose noblesse moteur et chevaux sous le capot.

Depuis les années 50 et le succès des petits roadsters à l’anglaise aux USA comme en Grande-Bretagne, les marques comme MG ou Triumph cartonnent. Mais dans les années 60, si le succès reste réel, il s’agit d’aller plus loin, et de toucher de nouveaux clients. Pour cela, il convient d’offrir des carrosseries “coupé” et de plus gros moteurs : une montée en gamme logique alors que le niveau de vie augmente, tout comme les exigences. Pour MG, ce sera la B GT d’abord, qui ensuite s’offrira un V8. Chez Triumph, ce sera la GT6.

Un 6 cylindres pour une Spit’ fastback

La version coupé de la Spitfire ne s’embarrasse pas de 4 cylindres et passe directement au 6 cylindres : une façon de scinder clairement la clientèle. A la jeunesse dorée la “Spit”, aux pilotes la GT6. Enfin, ce constat, réel, ne peut se faire qu’a posteriori car en réalité, l’idée de départ n’était pas aussi tranchée : on voulait juste créer un coupé sur base Spitfire 4 (comme 4 cylindres).

Dès 1963, une Spit 4 est envoyée en Italie, chez Michelotti, pour travailler sur ce fameux coupé manquant dans la gamme. L’homme de l’art s’exécute, mais le poids d’un toit en dur renforce l’embonpoint de la belle, rendant le 4 pattes un peu juste pour les prétentions sportives affichées par ce futur fastback. Pourtant, l’italien a tapé juste, le dessin plaît aux pontes de chez Triumph mais aussi aux ingénieurs du département course qui font réaliser des “toits” en fibre de verre pour les versions courses de la Spit’ sur le même modèle.

La Type E du pauvre ?

L’idée d’un toit en dur pour le roadster reste d’actualité mais il faut un peu plus de puissance pour compenser le poids… et accessoirement convaincre une clientèle plus huppée (sans avoir forcément les moyens de s’offrir une Jaguar Type E). L’idée est simple : passer du 4 au 6. Hop, on rentre au chausse-pieds le 6 en ligne de la Triumph Vitesse sous le capot de la Spitfire, obligeant au bossage. Avec 95 chevaux, ce Straight 6 de 2 litres peut emmener les 865 kg de la GT6 (c’est désormais son nom) à 172 km/h. Le bloc passera à 105 chevaux avec la version Mk2 pour encore plus de performance (177 km/h) malgré un poids supérieur (915 kg).

Lancée en 1966, la GT6 s’offre rapidement son petit succès malgré son surnom de “Type E du pauvre” : jusqu’en 1968, on en produira 15 818 exemplaires avant que la MkII fasse son apparition. Cette dernière évolue surtout par sa suspension arrière, quelques chevaux de plus, et quelques retouches esthétiques (pare-chocs notamment, prises d’air sur les ailes et jantes “Sport”). Après 12 066 unités jusqu’en 1970, elle laisse la place à la MkIII qui s’aligne sur le restylage de la Spitfire à la même époque. Un truc moins fin, beaucoup plus seventies, mais qui convient finalement pas mal à sa mécanique et à son côté plus brut et viril que la frêle Spitfire (pour un total de 13 042 exemplaires jusqu’en 1972).

L’intérieur « so british » d’une GT6 MkIII

Le charme des sixties, en mieux

Pour beaucoup, le charme des sixties c’est un petit roadster anglais, les Beatles à fond sur l’autoradio d’époque (ou presque) et cela ne s’apprécie que cheveux au vent. MG B et Spitfire seront toujours en haut de l’affiche grâce à leur puissance évocatrice que ne possèdent pas, à première vue, les MG B GT ou Triumph GT6. Mais cette dernière a pour elle une certaine confidentialité (relative tout de même vu le nombre d’exemplaires produits), un côté “spécialiste” qui distingue des roadsters plus mainstream.

Avec son L6 agréable, plutôt fiable (attention, cela reste une ancienne), son tableau de bord trop craquant, ses performances et surtout sa polyvalence grâce à son toit “en dur”, la GT6 est un choix presque plus rationnel qu’une Spitfire. Et si (comme à l’époque) vous n’avez pas les moyens d’une Type E, la GT6 est faite pour vous, d’autant qu’elle reste relativement abordable aujourd’hui. Alors ? Tentés ?

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