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Renault Clio Williams : 30 ans, rien que du bonheur

Par Nicolas Fourny - 28/03/2023

Explorez l’héritage emblématique de la Renault Clio Williams, la mère spirituelle des Clio R.S. 2 et 3. Découvrez pourquoi cette voiture demeure éternellement désirable, symbolisant de manière exceptionnelle une ère automobile inoubliable. Plongez dans l’histoire de la passion automobile avec notre article dédié à la Renault Clio Williams.

Les GTi des années 80 et 90 reviennent de loin : nombre d’entre elles ont très mal fini, entre les pilotes du dimanche, les affres d’une maintenance misérable et les consternantes obscénités du tuning. À présent le marché est mature — c’est-à-dire que la plupart des « merguez » ont disparu, par la grâce d’une sélection naturelle qui, comme toujours, ne laisse de la place qu’aux survivantes full stock, préservées de longues années durant par des amateurs éclairés et respectueux. Et les youngtimers du XXIe siècle reproduisent fidèlement la hiérarchie de jadis : comme hier, ce sont les têtes d’affiche que les collectionneurs s’arrachent. Parmi celles-ci, la Clio Williams occupe une place à part, à mi-chemin entre le bolide de grande série et l’objet dont la production (relativement) limitée suscite une convoitise qui, dans certains cas, ne se situe plus très loin de la frénésie…

Trop chère, mon fils !

En juin dernier, la maison Aguttes adjugeait un exemplaire de Clio Williams pour la modique somme de 75 880 euros (hors frais). Ou plutôt orfraie, comme les cris que ne manquèrent pas de pousser la cohorte habituelle de grincheux, de va-nu-pieds et de radins qui, en pareil cas, se répandent sans vergogne sur les réseaux sociaux afin de fustiger les horribles spéculateurs, à leurs yeux seuls responsables de la flambée des prix. Il suffit pourtant d’examiner objectivement le pedigree de l’auto pour comprendre l’inéluctabilité d’une inflation qui n’a rien de scandaleux, tant la Williams incarne dans une sorte de perfection le climax de son temps — une époque dont chacun a compris qu’elle ne reviendra plus jamais, qui plus est au moment où certains constructeurs élaborent des bousins électriques de plus de deux tonnes en les présentant sans rire comme des voitures de sport. Oh, bien sûr, dans l’absolu Renault n’a rien inventé de particulièrement innovant en concevant sa Clio sommitale : la combinaison « petite caisse & gros moteur » remonte au moins à la Sunbeam Lotus apparue une quinzaine d’années auparavant et, d’autre part, quand on détaille le processus de création de la Williams, on découvre avant tout une série d’habiles bricolages accomplis par des ingénieurs contraints d’aller prélever des composants préexistants sur les étagères généreusement fournies de Billancourt…

 

16 soupapes, sinon rien

Comme chacun sait, aux prolégomènes de la Williams on trouve la Clio 16s, nantie du premier moteur à quatre soupapes par cylindres (type F7P) dessiné par les motoristes de l’ex-Régie et apparu primitivement sur la R19. Un groupe certes valeureux mais dont les 140 ch initiaux — puis 137 avec le catalyseur — ne parvenaient pas à compenser un indéniable creux à bas régime, unanimement dénoncé par les essayeurs de l’époque. Dépourvu de tout dispositif de calage variable tel que le VTEC commercialisé par Honda dès 1989, le F7P ne pouvait rivaliser avec les meilleures réalisations de son temps mais cela n’empêcha pas la Clio ainsi gréée de remporter un grand succès dans son segment de marché, en raison de qualités routières de très haut niveau associées à une physionomie conforme aux attentes d’une clientèle qui n’était déjà plus celle de la décennie précédente. Avec ses ailes élargies abritant des pneus de 185 et son bossage sur le capot (indispensable pour ménager l’espace nécessaire au collecteur d’admission), la 16s annonçait la couleur (impossible de la confondre avec une Clio « civile ») mais avait toutefois renoncé au tapage esthétique que l’on avait tant reproché à feue la Supercinq GT Turbo… Il n’empêche que, pour une auto survenant cinq ans après une Peugeot 205 GTi 1.9 aux prestations directement comparables, l’équipage fut jugé un peu trop édulcoré pour pouvoir réellement enterrer la sochalienne.

La première Clio 2 litres

Il fallait impérativement réagir, ce d’autant plus que Renault Sport désirait pouvoir homologuer la Clio en groupe A afin de pouvoir défendre les couleurs de la firme en rallye. D’autre part, il convenait d’exploiter commercialement la présence de Renault en Formule 1 en célébrant comme il se devait le triomphe des Williams FW14B animées par le V10 conçu à Viry-Châtillon et qui avaient raflé les deux titres du championnat 1992 grâce, entre autres, aux neuf victoires de Nigel Mansell. L’idée d’une 16s améliorée prenait donc tout son sens et c’est ainsi qu’au printemps 1993 naquit la Williams dont, comme on l’a vu, la conception s’appuya au moins autant sur la mise en œuvre de recettes éprouvées que d’idées originales trahissant un empirisme échevelé. De la sorte, pour aboutir au groupe F7R, la cylindrée passa de 1764 à 1998 cm3 par allongement de la course (93 vs 83,5 mm) — le vilebrequin étant celui de la Clio Diesel… —, tandis que le groupe s’octroyait les services de pistons forgés, d’arbres à cames et de soupapes spécifiques, d’un collecteur d’échappement 4-en-1 ou encore d’un carter d’huile anti-déjaugeage. Avec, à la clé, d’incontestables progrès, modérés si l’on considérait l’augmentation puissance (treize chevaux de gagnés, ce n’était tout de même pas le Pérou), mais sensiblement plus convaincants lorsque l’on s’intéressait à la souplesse de l’ensemble, 85 % du couple maxi (fixé à 179 Nm au lieu de 162 sur la 16s) étant atteints dès 2500 tours. De leur côté, les trains roulants résultaient d’une agrégation d’éléments provenant tantôt de la Clio Cup, tantôt de la 19 16s, en toute logique étant donné l’étroite parenté technique entre les deux modèles. Comme on pouvait s’y attendre, le gain en performances pures n’était pas bouleversant — la Williams améliorant à peine les chronos de la 16s non catalysée — mais l’essentiel se situait ailleurs, le châssis ayant encore gagné en efficacité et ne péchant, en définitive, que par un freinage devenu franchement sous-dimensionné par rapport aux capacités de la mécanique !

Le grand bleu

Dans ces conditions, la Williams — tarifée seulement 12 % plus cher que la 16s — combla instantanément le déficit de charisme que d’aucuns reprochaient à sa matrice, d’autant plus que l’accastillage des deux versions n’avait pas grand-chose à voir. À l’encontre de la discrétion étudiée de la 16s, la Williams préférait en effet des atours nettement plus suggestifs, la combinaison d’un bleu tonitruant et de jantes Speedline dorées (censée rappeler la livrée des monoplaces construites à Didcot) bannissant d’emblée tout espoir de tempérance esthétique. Le festival se poursuivait à l’intérieur, la moquette, les fonds de compteurs, la grille du levier de vitesses et les ceintures de sécurité arborant eux aussi un bleu électrisant que l’on retrouvait par surcroît sur le « W » floqué sur les sièges. Renault avait de plus songé aux amateurs d’exclusivité, avec — sur les Williams phase 1 de façon systématique et sur demande pour les phase 2 — une petite plaque numérotée fixée sur la planche de bord et jouxtant les aérateurs centraux ! Malheureusement, à l’instar de la Citroën Visa Chrono, le chiffre indiqué ne correspondait pas au numéro de châssis… Mais peu importe après tout, car la rareté de la Williams est bel et bien avérée : seuls 12100 exemplaires sont sortis d’usine de 1993 à 1996 (excédant largement les prévisions de Renault) alors que, pour sa part, la 16s (puis 16v) a trouvé 35000 acheteurs. De fait, de nos jours il n’est pas évident de trouver une Williams en état strictement d’origine : les « optimisations » furent légion, sans parler des voitures ayant étrangement perdu leur F7R au profit d’un F7P ou de celles qui ont « tapé », les châssis les plus talentueux ne pouvant pas grand-chose contre les excès d’enthousiasme de conducteurs n’ayant pas tous le coup de volant de Jean Ragnotti… Mère spirituelle des Clio R.S. 2 et 3, la Williams demeurera éminemment désirable à l’avenir parce qu’elle personnifie presque idéalement une ère : celle des gros moulins atmosphériques greffés dans des caisses dont la légèreté (990 kg à vide !) n’a pas fini de nous faire rêver. Si vous aimez conduire (et si vous adorez le bleu), vous savez ce qu’il vous reste à faire…





Texte : Nicolas Fourny

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