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Range Rover Classic : un classique intemporel

Par Paul Clément-Collin - 28/07/2022

Le Range Rover fait partie d’une caste particulière, dont les membres sont rares et conservent encore aujourd’hui un prestige qui les a fait passer du statut d’utilitaire amélioré à celui d’icône de plus en plus luxueuse. Si Land Rover avait dans l’idée, dès sa conception, d’offrir un 4×4 plus statutaire et plus confortable que ses congénères d’alors, il n’est pas sûr que ceux qui le conçurent imaginaient à l’époque le Range d’aujourd’hui, bardé de cuir, de boiseries et de délicates attentions, tout en conservant ses qualités en tout-terrain. Depuis 50 ans, le Range Rover fait partie du paysage, évoluant au gré des années. Mais nul doute que pour les amateurs, c’est le Range dit “Classic” qui garde l’aura la plus forte.

Le premier prototype de 1967

Une chose est certaine : en Europe, c’est au Range Rover que l’on doit l’émergence de 4×4 haut de gamme. Si, aux USA, le concept commençait déjà à se développer, notamment chez Jeep avec le Wagoneer, en Europe, les véhicules tout-terrain restaient encore cantonnés à un rôle utilitaire, voire agricole. Land Rover, division tout-terrain de Rover, restait avec succès sur ce créneau-là depuis 1948. Pourtant, au milieu des années 60, on constata à Solihull qu’un nouveau secteur se dessinait. Si le Land Rover Series (I, II et III), qui accouchera par la suite du Defender, gardait une image de marque forte, notamment au sein du Commonwealth, on remarqua qu’une nouvelle clientèle existait, à l’instar de ce qui se passait aux États-Unis.

A Car For All Reasons

On pensa d’abord à tous ces gentlemen farmers d’Angleterre, dont les énormes revenus provenaient de vastes étendues terriennes au sein même du Royaume-Uni, mais aussi à tous ceux qui, au sein de l’ex-Empire britannique, grimpaient l’échelle sociale tout en demeurant sur des territoires difficiles d’accès, étendues désertiques ou glaciales et désireux d’un peu plus de confort et de statut social, sans pour autant se couper de leurs activités. Le mouvement était apparu aux États-Unis, avec Jeep mais aussi International Harvester et son fameux Scout. Ailleurs, le marché restait balbutiant, mais suffisamment intéressant pour que Land Rover s’y colle (à raison, l’histoire le montrera).

Je vous passe l’histoire du développement du nouveau modèle (vous la trouverez en lisant l’article sur le prototype Velar, premier du nom). Toujours est-il que les premiers prototypes commencent à rouler dès 1967 sous le nom de Road Rover d’abord, puis Velar, sous la direction de Charles Spencer King (qui aura droit, bien des années plus tard, à une série spéciale à son nom, le Range Rover CSK). Certes, son look (figé dès cette année-là) reste très carré, mais semble tellement moderne par rapport à un Land Rover Series dont il reprenait sensiblement le châssis. Dès le départ, l’orientation est prise : malgré une utilisation plus civile qu’utilitaire, on décide de conserver une transmission intégrale permanente (issue du programme Land Rover 101 Forward Control). Pour plus de noblesse mécanique, on décide d’utiliser le moteur V8 Rover, un Buick dont les droits avaient été acquis au milieu des années 60 (et qu’on retrouve sur les Rover P5P6 ou SD1, entre autres). De quoi flatter l’ego des futurs propriétaires tout en rivalisant avec les productions américaines (Jeep, International Harvester ou Ford Bronco par exemple).

Une machine moderne et rustique à la fois

Face à un marché incertain, on préfère conserver l’idée d’une carrosserie 2 portes sans développer toute une gamme. Il ne s’agissait pas à l’époque d’offrir une routière, mais plutôt un véhicule passe-partout demeurant confortable pour les nobles fessiers de lords propriétaires ou de grands propriétaires terriens parvenus de tous les coins du Commonwealth. La suspension est à l’avenant, Spencer King privilégiant les ressorts hélicoïdaux aux traditionnels ressorts à lames. À l’intérieur, l’idée n’est pas encore au luxe, mais plutôt au confort, avec des sièges moelleux, du velours en veux-tu en voilà, et quelques petites attentions histoire de se différencier d’un “vulgaire” Land Rover.

La Police Britannique utilisera des Range pendant longtemps !

Bonne pioche : le Range Rover, lancé en 1970, rencontre rapidement sa clientèle, d’autant plus que, sur le marché européen, la concurrence n’existe pas, sauf parmi les petites officines telles que Monteverdi, en Suisse, qui tente de s’imposer avec son Safari et ses infrastructures très artisanales. Land Rover n’y verra jamais un concurrent. D’ailleurs, Monteverdi, associé à Fissore en Italie, fit une proposition de Range à 4 portes qui servira de test, puis de base à Land Rover pour élargir la gamme au début des années 80. Entre-temps, un nouveau concurrent était apparu : le Mercedes Classe G (et son frère Puch G) qui connaîtra le même genre de carrière.

Le Range Monteverdi-Fissore servira de laboratoire pour les versions 4 portes (puis 5 portes)

Une lente montée en gamme et en puissance

Dès 1980, le Range connaîtra un premier restylage, puis un deuxième en 1986 : dans l’intervalle, la lente montée en gamme avait commencé, avec notamment, dès 1984, l’arrivée du cuir et du bois pour satisfaire une clientèle de plus en plus exigeante et de moins en moins rurale. En 1985, c’était au tour du tableau de bord d’évoluer pour mieux répondre aux standards de l’époque. Le V8 de 3,5 litres évoluera en puissance : jusqu’en 1982, il produisait 135 chevaux, pour redescendre alors à 128. En 1985, le V8 EFI passait à 168 chevaux (une valeur déjà intéressante pour l’époque, qui descendait à 163 ch en boîte automatique). En 1990, la cylindrée passait à 3,9 litres (pour 182 chevaux) puis, en 1992, sortait la version 4.2 et ses 200 canassons.

En 1986, le Range accueillait aussi ses premiers Diesel, d’origine italienne : des VM d’abord en 2,3 litres (106 chevaux) puis 2,5 litres en 1988 (121). Ce n’est qu’à partir de 1992 qu’il récupèrera des moteurs britanniques : 2,4 litres (113 chevaux) puis 2,5 litres (même puissance) en 1994. En 1992, le Range héritait aussi d’un nouveau châssis long (108 pouces). La production continua jusqu’en 1996 avant que le “Classic” soit remplacé par un tout nouveau Range, connu sous le nom de code P38.

Succès commercial de long terme

Au total, ce sont 325 490 exemplaires de Range Rover Classic qui sortiront des chaînes entre 1970 et 1996. Dans les années 70, le temps que le concept rentre dans les esprits, la production annuelle tournait entre 10 et 12 000 exemplaires par an (à partir de 1975). C’est surtout à partir des années 80 que, tel un bon vin, le Range commença à décoller, pour culminer à 28 509 exemplaires en 1989. Par la suite, la production baissera lentement, compensée par un coût (et des marges) de plus en plus élevé. Elle reprendra en flèche avec le P38 (30 066 unités en 1997).

Comme le Classe G allemand, le Range est un véhicule à part, incomparable, toujours plus luxueux et performant sans jamais perdre ses qualités naturelles. Le Range Classic, quelle que soit sa version, est depuis longtemps entré en collection et il devient de plus en plus difficile d’en trouver dans leurs versions originales (plus roots) des années 70 et début 80, à tel point que Jaguar Land Rover propose aujourd’hui, à des tarifs prohibitifs, des revivals de ces machines à remonter dans le temps. Les versions Diesel VM sont évidemment moins prisées mais peuvent être un bon début dans l’univers du Range.

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