Peugeot 404 Diesel Record : la compétition à la rescousse du commercial
Peugeot fait partie (avec Mercedes) des pionniers du Diesel. Aujourd’hui, cela peut faire sourire tant ce type de motorisation a pris une place prépondérante dans le parc automobile, même si son avenir s’annonce bien sombre, mais à l’époque, il était très compliqué de vendre une telle technologie jusqu’alors dédiée aux utilitaires et à l’industrie. Malgré une prudence légendaire, la marque sochalienne allait s’engager dans cette voie et tenter de convaincre les clients que sa 404 ainsi motorisée valait autant, voire plus, qu’une 404 marchant à l’essence ordinaire. Pour cela, rien de tel qu’une série de records grâce à une sympathique voiture bleue : la 404 Diesel des records !
Lorsque cette 404 si spéciale se lance à l’assaut de près de 40 records, Peugeot n’est plus un débutant en matière de moteurs Diesel. Dès l’avant-guerre, la marque a commencé à étudier cette technologie, et les études de la filiale Compagnie Générale des Moteurs (rebaptisée plus tard Indenor) continuent après-guerre : la direction de l’entreprise sent qu’un marché existe d’autant plus qu’en 1953, les taxes sur ce type de carburant sont considérablement allégées, offrant une raison aux entreprises (pour leurs VRP ou leurs flottes utilitaires) d’utiliser ce fameux Diesel que les particuliers boudent (pour l’instant). Les taxis, eux aussi, sont particulièrement intéressés par les économies engendrées, malgré le bruit et l’inconfort des moteurs de l’époque.
Un carburant économique
En réalité, la baisse des taxes n’était pas tellement due à une volonté de promouvoir le Diesel, mais plutôt d’aider à la reconstruction de la France, tant ce carburant servait, alors, essentiellement aux camions, tracteurs et engins de chantier nécessaires au redressement du pays. Il fallait être assez visionnaire pour comprendre qu’on pouvait aussi pousser le client particulier à changer de technologie en échange d’économies. En ce temps-là, les questions liées à la pollution n’existaient pas : seuls l’économie d’usage et/ou l’agrément comptaient aux yeux de l’acheteur. Pour le moteur Diesel, cette économie permettait de compenser ses vibrations, ses claquements à froid et sa moindre performance à cylindrée égale face à un moteur essence.
Dès la 403, Peugeot propose son moteur Indenor de 1 816 cc développant 48 chevaux. Les ventes restent encore marginales sur ce modèle, mais pas négligeables (notamment grâce à une grosse commande de la compagnie parisienne de taxis G7). Ce n’est qu’avec la 404 lancée en 1960 que le Diesel va prendre de l’ampleur dans les ventes. Deux versions du moteur XD seront proposées à la clientèle : le 1.8 déjà vu sur la 403, puis un 1 948 cc permettant d’obtenir 61 chevaux, soit presque autant que les moteurs essence les moins puissants de la gamme. L’écart se resserrait, mais il fallait accompagner la clientèle, désamorcer les craintes, éliminer les a priori.
Convaincre pour mieux vendre
C’est ainsi qu’en 1965 est lancé le programme 404 Diesel des Records. C’est au mois de juin (4, 5 et 6, puis 11, 12, 13 et 14 juin) que cette voiture de compétition va s’attaquer à toute une série (fastidieuse) de records, dont le plus parlant reste les 3 900 km en 24 heures à 161 km/h de moyenne. Pour cela, 5 pilotes se relaient sur le circuit de Montlhéry, assistés de 27 mécaniciens et ingénieurs.
La motorisation s’avère, au boulon près, la même que celle qui équipe la 404 à l’époque, à savoir le 1.9 litre de 61 chevaux DIN (soit 68 chevaux SAE) accolé à une boîte de vitesses à 4 rapports. En revanche, la voiture n’est pas tout à fait de série. La base n’est pas la berline, mais la version Cabriolet. Le poste de pilotage s’offre une verrière aérodynamique tandis que la place du passager est condamnée et recouverte de tôle, donnant à cette étonnante 404 un profil atypique. Grâce à ces modifications (et à l’absence de pare-chocs et d’enjoliveurs), cette 404 Diesel Record ne pèse plus que 1 135 kg sur la balance.
L’aventure du Diesel est lancée pour 50 ans
Grâce à cette série de records, Peugeot va prouver au monde entier les qualités du Diesel et les progrès réalisés. Le grand public se rend compte qu’on peut aller vite et loin en Diesel, tout en bénéficiant d’une grande fiabilité et d’une substantielle économie financière. Dès lors, les parts de marché de cette motorisation ne cesseront de grandir chez Peugeot, puis chez ses concurrents, tandis que l’État, voyant ses marques nationales devenir les champions du Diesel, ne remettra jamais en question (jusqu’à aujourd’hui) la plus faible taxation de ce carburant.
Aujourd’hui, cette 404 un peu particulière existe toujours et sort de temps en temps pour des exhibitions et manifestations diverses. Le reste du temps, elle est amoureusement entretenue par l’Aventure Peugeot à Sochaux. Une voiture historique à plus d’un titre, qu’il faudra d’autant plus conserver que le Diesel risque de disparaître bien avant l’essence !