Panhard PL17 : c'était le bon temps !
J’adore l’époque dans laquelle nous vivons, rassurez-vous, mais mon esprit rêveur me fait regretter aussi des époques que je n’ai pas connu. Les années soixante font partie de celles que j’aurai voulu vivre. J’envie mes parents, jeunes adultes à cette époque, d’avoir pu vivre cette décade riche en événements, en bouleversements mais aussi en découvertes et révolutions (et pas que politiques). J’aurais aimé découvrir le rock, vivre dans une certaine insouciance d’un plein emploi économique. Cette période n’était sans doute pas idéale, mais elle devait assurément être assez exaltante.
Dans ces années-là, l’automobile prenait une place encore plus grande dans la vie des français, et 5 marques françaises majeures existaient encore : Citroën l’ingénieuse, Renault la laborieuse, Peugeot la bourgeoise, Simca l’américaine et Panhard la doyenne. Difficile de qualifier Panhard d’ailleurs, car c’était en même temps la plus ancienne marque, la plus petite, et la plus difficilement « positionnable » sur un marché. Bourgeoise et familiale comme une Peugeot, innovatrice comme une Citroën, mais cantonnée à un rôle populaire de second plan, et sans grandes ressources financières (malgré l’entrée au capital de Citroën justement en 1955), la partie n’était pas gagnée pour Panhard en ce début des années 60.
Malgré le soutien de Citroën (qui apporta en dot la fabrication de la 2CV Fourgonnette), Panhard n’avait pas les moyens de se renouveler à l’aube des sixties, et devait, pour survivre, naviguer à vue sans rentrer en concurrence avec son puissant actionnaire, le tout sans dépenser trop d’argent. Et comme Citroën occupait le terrain du haut de gamme (ID et DS) et du bas de gamme (2CV), c’est entre les deux que Panhard va persister, en proposant une évolution de la Dyna plutôt qu’une réelle nouveauté en 1959 : la PL 17. PL pour Panhard et Levassor, et 17 pour 5CV + 6 places + 6 litres (de consommation aux 100 kilomètres) : faites le calcul, le compte est bon, 17.
Si la cellule centrale reste celle de la Dyna (avec ses portes avant dites « suicides », qui reprendront le sens normal en cours de carrière), l’avant et l’arrière sont remis au goût du jour par le styliste Louis Bionier, dans un style qui paraît kitsch aujourd’hui, mais qui rencontra son petit succès à l’époque. D’ailleurs, malgré ses petits bi-cylindres à plat de 851 cm3 de 42 ch SAE (voire 50 ch pour la fameuse version Tigre), la PL17 rencontre l’adhésion du public dès son lancement au Salon de Paris 1959.
Au fil des ans, le soufflet retombera petit à petit, malgré l’arrivée d’une version break (étudiée par le carrossier italien Panauto), cabriolet (d’abord réservé au marché américain), ou fourgonnette bachée. Il faut aussi dire que le réseau Citroën se désintéressait franchement de Panhard. Et Citroën elle-même se désintéressait de plus en plus de cette encombrante filiale, qui rentrait en concurrence avec son plan produit. L’Ami 6 (lire aussi : Citroën Ami 6) sortait en 1961, rentrant directement en concurrence avec la PL17, bien qu’un peu moins bourgeoise. En 1963, le lancement de la superbe 24 (lire aussi : Panhard 24), dont le lancement d’une version 4 portes semblait assurée, siphonna un peu plus la clientèle d’une voiture qui, malgré tout, commençait à accuser son âge (la Dyna Z dont elle dérive date déjà de 1954).
Et puis en 1965, c’est le drame ! Citroën met un terme à l’aventure Panhard, délaissant l’idée d’une 24 à 4 portes (entrant en concurrence avec son projet GS), et les dernières 17 (elles avaient délaissé le PL en 1964 pour être raccord avec la gamme 24) tombent des chaînes sans remplaçantes, laissant de nombreux panhardistes orphelins, après 166 192 exemplaires. Adieu moteur Tigre, tu nous manqueras malgré une fiabilité aléatoire ! Les années 60 sont à peine à leur moitié que la marque doyenne de l’automobile disparaît sur l’autel des réalités économiques : bienvenue dans le nouveau capitalisme.
Aujourd’hui comme à l’époque, rouler en Panhard est une profession de foi que je ne suis pas loin d’avoir prononcée (mais faute de moyens…) : elle a tout pour elle, l’ancien et le nouveau, l’originalité et le kitsch, un parfum de sixties particulier, un petit côté « innovation de bouts de chandelles, et un brin de sportivité grâce à ses moteurs Tigre. Le tout en proposant 6 places quand même, et pour un prix aujourd’hui raisonnable, sauf bien entendu le rare cabriolet dont je reparlerai plus tard et qui sérieusement à coter. Alors ? Ca vous dis ?