Panhard Dyna X : la berline bien commode
Dans l’esprit populaire, la relance de l’automobile française s’est faite grâce à deux populaires, la Renault 4CV et la Citroën 2CV. On oublie pourtant l’importance de la Panhard Dyna X qui, elle aussi, connut son heure de gloire malgré les moyens plus limités de son constructeur. Avec son style si particulier et étudiée par l’ingénieur Albert Grégoire, elle avait pourtant de grandes qualités, mais peut-être était-elle trop baroque et, comme souvent par la suite chez Panhard, trop pointue ? Retour sur cette étonnante petite berline française.
L’histoire de la Dyna X ne commence pas chez Panhard. C’est à partir de 1943 qu’Albert Grégoire étudie une petite voiture révolutionnaire, associé à l’Aluminium Français (qui deviendra plus tard Péchiney). C’est ainsi qu’il conçoit le prototype AFG (Aluminium Français – Grégoire) pour vanter aussi bien ses propres solutions techniques que l’utilisation de l’aluminium produit par son partenaire. Même pendant l’occupation, on prépare “l’après” ! Avec son bicylindre à plat et à refroidissement par air et sa carrosserie alu, l’AFG ne pèse que 400 kg et atteint les 100 km/h. Grégoire maîtrise la traction et les joints homocinétiques depuis son passage chez Tracta et, bien entendu, son AFG est une “tout à l’avant”.
Grégoire et Panhard font affaire
À la libération, Grégoire prend son bâton de pèlerin pour convaincre un constructeur de produire sa voiture. La plupart ne sont pas intéressés, mais Panhard voit en l’AFG un bon moyen de développer rapidement une voiture qui correspond au créneau qui lui a été attribué par le Plan Pons : celui des “petites” 4CV. Un secteur que la marque de l’avenue d’Ivry connaît mal : avant-guerre, elle produisait plutôt des voitures de luxe, comme la Dynamic ! Le projet de Grégoire est donc une aubaine.
La Dyna X est présentée en 1946 au Salon de Paris, en même temps que sa principale rivale, la Renault 4CV. Les deux voitures diffèrent radicalement. Si le dessin de Grégoire, retravaillé par Louis Bionier et Louis Delagarde, hésitant entre l’ancien et le moderne, heurte une frange de la clientèle, pour le reste, il s’agit d’une voiture d’avant-garde. Bien entendu, il s’agit d’une traction, une technologie encore rare sur une petite voiture. En outre, elle conserve l’idée de l’Aluminium Français en proposant une carrosserie en aluminium contribuant à la légèreté de l’engin (même si elle prend 75 kg d’embonpoint par rapport à l’AFG). Elle offre aussi une suspension à 4 roues indépendantes ainsi qu’une boîte de vitesses à 4 rapports.
Flat twin pointu et gamme complète
Sous le capot, on trouve une toute nouvelle mécanique qui conserve l’architecture “flat twin” qui deviendra la marque de fabrique de Panhard jusqu’à la fin, en 1967. Ce moteur de seulement 610 cc développe 22 chevaux, mais pour l’époque, son rendement associé à la légèreté de la Dyna X suffit à en faire une voiture performante. En 1949, ce moteur gagnera 6 chevaux tandis qu’un 745 cc de 33 chevaux complète la gamme. Enfin, en 1952, le 745 passe à 40 chevaux tandis qu’un 851 cc de 38 chevaux vient enrichir l’offre moteur. Le bicylindre s’avère performant, mais aussi particulièrement difficile à régler, lui conférant une image de “voiture de spécialiste”.
La production commence en octobre 1947. Pour les carrosseries, Panhard va sous-traiter la production à Facel-Métallon tandis que l’assemblage final se fait dans l’usine parisienne du 13ème arrondissement. En 1948, une version fourgonnette est lancée pour répondre à une demande croissante dans l’utilitaire. En 1949, cette version se voit déclinée en break et en “commerciale”, alors qu’en 1950, la berline peut devenir découvrable et qu’un cabriolet est proposé à la clientèle. Un an plus tard, la firme tente de séduire la jeunesse dorée, mais aussi les États-Unis en lançant un dérivé de la Dyna X prénommé Junior. Ce roadster minimaliste sera un échec, mais inspirera Nissan bien des années plus tard pour créer sa Figaro.
La Dyna X se décline en Cabriolet (en haut) ou en Roadster Junior (en bas)Succès commercial certes, mais insuffisant
La production de la berline s’arrête en 1953, et celle des breaks et fourgonnettes en 1954. Car la maison Panhard a désormais une remplaçante, la Dyna Z qui évoluera ensuite en PL17. Au total, 47 049 exemplaires auront été produits : cela peut paraître peu par rapport à la concurrence, mais il faut rappeler que Panhard ne dispose ni des mêmes ressources, ni des mêmes capacités industrielles, sans compter un réseau commercial beaucoup plus restreint. Remise dans le contexte, la Dyna X est une véritable aubaine pour Panhard en cette fin des années 40. Malheureusement, cela ne sera jamais suffisant pour permettre à la marque de se développer. Elle devra accepter l’entrée au capital de Citroën et la production en son sein des 2CV fourgonnettes, puis l’absorption complète, avant la fin de toute activité automobile en 1967.
Une chose est sûre : il faut être un amateur de Panhard pour désirer une telle voiture, on n’achète pas une Dyna X par hasard. Son profil est – soyons gentil – étrange et tarabiscoté, au point de ressembler à une commode Louix XV. C’est d’ailleurs ainsi qu’elle est souvent surnommée. Il faut aimer aussi le bicylindre à plat et sa sonorité particulière. Mais pour le reste, la Dyna X est étonnante, moderne, et son comportement sans reproche ! Si sa mécanique est plus pointue, pour le reste, elle n’a rien à envier à sa célèbre concurrence.