Ford Mustang VI: un héritage bien géré !
En juin dernier, Ford France organisait un petit road trip aux alentours de Deauville pour présenter sa nouvelle Mustang aux journalistes et blogueurs français. Boîtier Rouge était bien évidemment de la partie grâce à Jean, qui n’a pas mis longtemps à accepter ma proposition d’aller tester et photographier la belle sur les lieux même du tournage d’un Homme et une femme, de Claude Lelouch, en 1966. Un clin d’oeil à la fameuse scène où Jean Louis, pilote automobile, roule sur la plage au volant d’une Mustang en train de devenir mythique aux Etats-Unis par son succès fulgurant.
Pour Ford, cette Mustang VI présentée en fanfare est une première : alors que la lignée de cette pony car a débuté en 1964, c’est la première fois, 51 ans après, qu’elle est officiellement vendue en Europe. L’occasion pour nous de se remémorer la saga Mustang, et de se rappeler que cette voiture révolutionna l’automobile. Avec 8 570 704 exemplaires vendus entre 1964 et 2014, la Mustang obtient haut la main le droit de rejoindre au panthéon automobile les Porsche 911, Volkswagen Cox, Citroën 2CV, Mini ou Fiat 500.
Revenons à sa genèse. Au début des années 60, Lee Iacocca, alors directeur général de la firme à l’ovale bleu, se pose la question d’offrir une voiture accessible et sportive à destination d’un public jeune. Après avoir motorisé les familles dans les années 50, il faut désormais élargir le marché et toucher de nouveaux consommateurs. En cette période faste des années 50, les jeunes deviennent une cible particulièrement intéressante pour les constructeurs automobiles américains.
L’idée principale de Iacocca est d’une simplicité enfantine, encore fallait-il y penser : proposer une voiture au design moderne et attachant, polyvalente, facile à développer et à construire, capable de séduire le plus grand nombre et d’en offrir beaucoup pour un prix d’achat accessible ! La solution : produire et vendre beaucoup. Proposée en coupé, cabriolet et fastback, avec des moteurs L6 ou V8, la Mustang fait sensation et séduit rapidement une clientèle avide de liberté et d’American Way of Life : lancée le 17 avril 1964, elle se vend le premier jour à 22 000 exemplaires. C’est cependant en 1966 que la Mustang se vendra le plus : cette année-là, Ford en vendra 607 568 exemplaires. Cette année-là sera bien sûr une année record comme il ne s’en reproduira plus jamais. Mais cela donne une idée du succès qu’a pu rencontrer cette voiture en si peu de temps, devenant mythique de son vivant.
La Mustang II, dans un style plus bourgeois !Le problème d’un best-seller, c’est d’en réussir les suites. Si la Mustang s’est toujours plutôt pas mal vendu, le succès de celle qu’on appelle Mustang I (1964-1973, avec 2 981 259 exemplaires) ne se reproduira plus jamais. Il faut dire que Ford n’a pas toujours eu la main heureuse pour la descendance de sa pony car. La Mustang II, apparue en 1974, s’assagit stylistiquement, s’embourgeoise et pour tout dire rentre dans le rang. Déjà depuis 1971 la Mustang I s’était vue affublée d’une nouvelle calandre pas forcément heureuse. Avec le nouveau design de 1974, on tombe dans la banalité qui n’empêcher pas le modèle de se vendre à 1 107 718 exemplaires entre 1974 et 1978. Dotée de mécaniques venues d’Europe, la Mustang II perd en sex-appeal à tous points de vue. Il faut dire qu’entre temps, la Mustang a changé de philosophie, perdant son côté « muscle car » des dernières années de la Mustang I, et s’affirmant volontairement plus consensuelle dans un contexte d’après crise pétrolière. Si les fans de la première heure sont déçus, ils finiront par la regretter tant la Mustang III enfonce le clou dans le mauvais sens en 1979.
La Mustang III, terriblement eightie’s !Avec la Mustang III, on rentre de plain pied dans les années 80 : ses lignes anguleuses et somme toute très banales s’éloignent encore plus de la Mustang originelle. Pourtant, cette 3ème génération sera la plus diffusée après la Mustang I : 2 362 074 exemplaires. Bon, pour relativiser ce score, c’est aussi la Mustang qui restera le plus longtemps au catalogue, 15 ans de 1979 à 1994 . Comme toute américaine qui se respecte (et c’est particulièrement vrai pour les Mustang), elle évoluera chaque année tant en finition, équipements, séries spéciales ou motorisations. Un vrai casse-tête pour l’amateur : comment s’y retrouver dans les multiples versions lancées depuis 1964 ? Rassurez-vous, je vous décrirais plus tard en détail certains modèles plus spécifiques.
La Mustang III évoluera un peu durant sa longue carrière !En 1995, c’est au tour de la Mustang IV d’entrer dans la danse. La ligne est remise au goût du jour, sans pour autant révolutionner le monde du design. Vendue jusqu’en 2004, elle va redorer un peu le blason « Mustang » et redresser des ventes qui étaient tombées sous la barre des 100 000 exemplaires en 1991 et 1992. En tout, 1 468 645 exemplaires seront vendus ! Sans atteindre les records de la toute première Mustang, elle réussit à tenir son rang et à maintenir les ventes à un niveau acceptable pour ce type de véhicule (coupé ou cabriolet).
La Mustang IV, plus consensuelle !Celle qui aura le moins de succès sera étonnamment la Mustang V : lancée en 2005 et vendue jusqu’en 2014, elle ne sera diffusée qu’à 1 006 975 exemplaires. Pourtant, c’est à mon sens la plus jolie des Mustang moderne, celle qui rappelle le plus l’ancêtre de 1964 tout en conservant l’héritage « muscle car » de la fin des 60’s et du début des 70’s. Mais à bien y réfléchir, en satisfaisant les puristes, elle s’éloignait de son marché naturel : trop brutale dans ses traits comme dans ses motorisations, elle perdait tout une frange d’acheteur désireux de cruiser « à l’américaine » plutôt que de drifter sur le parking d’un mall. Ce qui est bon pour l’image n’est pas toujours bon pour les ventes.
La Mustang V, toute en muscles, ma préférée !C’est ainsi que nous arrivons à notre Mustang VI. Vous me direz qu’il était temps que j’en parle depuis juin, et je vous répondrais que je n’aime pas trop écrire un article en même temps que tout le monde. Il perd alors en force et en intérêt. Le lecteur se lasse vite, et je le comprends. Gavé de Mustang en juin et en juillet, il peut à nouveau s’y intéresser en septembre. Mon fidèle Jean, envoyé en éclaireur à Deauville est revenu époustouflé de sa rencontre avec la bête. Ne cherchez pas à comparer la nouvelle venue avec ce qui existe en Europe : malgré la rigueur accrue et l’efficacité de la Mustang VI, il reste en elle un parfum d’Amérique incomparable. Disponible en 4 cylindres (2,3 litres et 317 ch) ou V8 (5 litres 421 ch), elle concilie enfin les deux cibles de la Mustang : les amateurs de cruising se rabattront sur le 4 cylindres Ecoboost largement suffisant avec plus de 300 bourrins, tandis que les forcenés du big block sauteront sur le V8 of course. Le tout pour un prix d’attaque à 38 000 et 48 000 euros.
Attention, voici la Mustang VI !Sur ce coup là, je ne peux que féliciter Ford : quelle bonne idée d’enfin proposer sa mythique voiture à une clientèle européenne, surtout qu’il semblerait qu’elle soit à la hauteur en terme de tenue de route, tout en dépaysant son conducteur. Pourtant je ne suis pas le dernier à critiquer hein (lire aussi : Ford prend un virage et s’embourbe avec Carla Bruni), mais autant la campagne virale de Ford était ratée, autant l’offre produit, notamment sur le versant sportif (Mustang, Focus RS), est une réussite. Reste à le faire savoir un peu mieux (même si la campagne TV rattrape un peu le coup avec un humour sympa).
La Mustang VI existe en coupé ou cabriolet, en 4 cylindres ou V8 !Bref, pour résumer ce long pavé, Ford réussit avec sa Mustang VI à faire la synthèse des 5 générations précédentes, sans tomber dans les écueils du « trop » ou du « pas assez », grâce à un design équilibré et alléchant (même si personnellement, je suis assez attaché au look bestial de la précédente Mustang), une offre moteur intéressante et des tarifs canons pour ce type de véhicule. N’attendez pas cependant une finition à l’Aston Martin : malgré ses performances, la Mustang garde en elle ses gênes populaires, et ce n’est peut-être pas un défaut !
Juste pour le plaisir des yeux et des oreilles:
Merci à Jean Barbier pour avoir remplacé Boîtier Rouge et pour ses photos