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Fiat 127 : le best-seller de Turin

Par Aurélien Charle - 08/04/2020

Jusqu’à la fin des années 1960, Fiat rechigna assez longtemps à proposer des solutions techniques modernes sur sa gamme. Il fallut toutefois réagir au plus vite pour remplacer des modèles tout à l’arrière devenus obsolètes. Avec la Fiat 127, le constructeur turinois propose une idée moderne de l’automobile populaire. Un retour en force qui lui fera prendre la tête des ventes européennes !

Reculer pour mieux sauter. 

Dans les années 1960, alors que les constructeurs européens généralisent la traction avant, le moteur transversal ou le hayon arrière sur leurs berlines, Fiat ne propose encore que des solutions traditionnelles. La gamme basse du constructeur italien est même franchement à la traîne car elle ne se compose que des Fiat 500 et 600, modèles certes à succès, mais désormais techniquement archaïques et manquant cruellement de polyvalence. Le segment supérieur fait à peine mieux avec une Fiat 850 aux dimensions plus généreuses, mais également équipée d’un moteur situé à l’arrière. 

Afin de remédier à tout cela, Fiat démarre le projet d’un futur modèle populaire pourvu des derniers progrès techniques sous le nom de code X 1/4. Techniquement, rien de bien difficile puisque les procédés existent et qu’ils ont déjà été expérimentés sur l’Autobianchi A112. Il va donc de soi que le moteur transversal, la traction et les freins à disques avant seront mis à l’honneur et que la même mécanique de 903 cc, héritée de la Fiat 850 Coupé et ramenée à 47 chevaux, prendra place sous le capot. Au-delà de la technique, l’ambition de ce projet était de révolutionner le concept de la voiture populaire et de devenir un référent mondial de la production des années 1970. 

Ce sera donc dans le domaine du design que la future Fiat devra tirer son épingle du jeu. Le style est confié à Rodolfo Bonetto, ancien designer de chez Pininfarina désormais à son compte, et Pio Manzù ayant notamment collaboré avec Glas et NSU. Le principal défi consiste à dédier aux passagers un minimum de 80% de la surface disponible et ce, bien évidemment, dans des dimensions contenues. Au mois de mai 1969, la maquette définitive est déjà prête, mais Pio Manzù ne pourra jamais voir le fruit de ses travaux. Il décède en effet d’un accident de la circulation au volant de la Fiat 500 de sa femme alors qu’il se rendait justement à la présentation de cette même maquette. Malgré ce triste événement, l’industrialisation est lancée et la Fiat 127 est présentée au printemps 1971.

En plein dans le mille !

Fiat a vu juste et le succès est immédiat ! La Fiat 127 était celle qu’une Europe moderne, à l’urbanisation galopante et au réseau routier rapide tout neuf, attendait. La 127 est à l’aise en ville comme sur route et affiche une vitesse de pointe honorable de plus de 140 km/h atteinte par de belles reprises. Son habitacle est étonnamment spacieux et lumineux et son coffre de 325 dm3 est logeable et profond. En résumé, Fiat vient de lancer l’un des premiers modèles polyvalents, concept qui ne tardera pas à faire école. La consécration arrive très vite lorsque la 127 se voit récompensée du titre de Voiture Européenne de l’année 1972. Il ne s’agit cependant pas de s’endormir sur ses lauriers. La petite Fiat doit encore progresser au niveau de son confort, de sa finition perfectible ou de sa dotation de série plutôt pingre. Fiat n’a également pas le monopole de la clairvoyance et ses principaux concurrents planchent également sur un nouveau modèle tout aussi versatile. L’offensive commence déjà en janvier 1972 lorsqu’arrive une fringante Renault 5 bien décidée à lui mettre une bonne raclée !

La Fiat 127 commence rapidement à évoluer. Dès le mois d’avril 1972, elle devient disponible en version 3 portes, équipée d’un hayon. La marque Seat, commercialisant la 127 sous son propre label, développe également une version quatre portes présentée au salon de l’automobile de Paris 1973. Cette version sera commercialisée dès le printemps suivant sur le marché ibérique puis exportée dans le reste de l’Europe sous l’insigne Fiat quelques mois plus tard. L’Italie attendra néanmoins jusqu’à l’été 1976 pour l’intégrer à son catalogue. 

La Seat 127 (en haut) et la Fiat 127 4 portes (en bas) dérivée de la Seat 4 portes (vous suivez ?)

1973 est une année malheureusement connue pour la sévère crise pétrolière qui survient en octobre. Là encore, la polyvalence de la Fiat 127 va jouer en sa faveur et attirer vers elle une clientèle devant revoir son standing automobile à la baisse sans vouloir perdre un certain agrément pour autant. Les chiffres de vente n’en sont que favorisés et, à partir de cette année maudite, la 127 se hisse à la tête des ventes européennes pour une période ininterrompue de cinq années ! 

On s’embourgeoise, on se relooke, on s’encanaille !

La modernité, tout comme les temps modernes, sont donc favorables à une Fiat 127 qui franchit le million d’exemplaires assemblés en novembre 1974. Au cours du millésime 1975, une nouvelle finition Spécial est ajoutée à la gamme. Plus cossue, elle se distingue notamment par son tableau de bord et sa sellerie spécifiques, ses renforts de caoutchouc sur les pare-chocs et sa calandre à mailles rectangulaires. Les ventes sont toujours au beau fixe et rien ne parvient à faire descendre la 127 de la première marche du podium. 

En tant que citoyenne d’une Europe sans frontière, il devient nécessaire de la mettre en conformité aux normes anti-pollution qui ne font que commencer à sévir. La puissance du moteur de 903 cc est donc ramenée de 47 à 45 chevaux. Pour maintenir son succès, la petite italienne reçoit son premier coup de bistouri au printemps 1977. Les faces avant et arrière ainsi que l’habitacle ont été remis au goût du jour. Un nouveau moteur de 1 049 cc développant 50 chevaux originaire du Brésil vient épauler le petit 903 cc. La gamme se compose désormais de trois niveaux de finition baptisés, du plus dépouillé au plus raffiné, L, C et CL. 

La Fiat 127 CL

En cette fin des années 1970 la tendance des constructeurs automobiles européens est de gonfler la mécanique de leurs petits modèles tout en les munissant d’une présentation sportive flattant l’âme de pilote de son conducteur. Fiat présente alors sa 127 Sport en septembre 1978. Le 1 049 cc a été poussé à 70 chevaux ce qui, pour un poids plume de 775 kg, permet d’amusantes sensations de conduite pour atteindre une vitesse de pointe de 155 km/h. Ces performances restent malgré cela en deçà de ce que propose la concurrence. La 127 Sport s’en distingue toutefois par un prix d’achat nettement inférieur et peut tout de même revendiquer une présentation sportive attrayante et une dotation de série généreuse. 

La Fiat 127 Sport et son intérieur

Les ventes commencent à tendre à la baisse et la remplaçante de la 127 n’est prévue que pour dans quelques années. La version 5 portes arrive enfin en 1980 tandis que, l’année suivante, elle est proposée en version diesel, animée par un moteur de 1 301 cc développant 45 chevaux, et accompagnée d’une version break baptisée Panorama. En 1982, un dernier restylage intervient à coup de plastique abondant et apporte avec lui une boîte de vitesse à 5 rapports qui n’avait jamais été proposée auparavant. Quant à la Sport, elle reçoit un moteur 1 301 cc d’une puissance de 75 chevaux. Ces modifications redonnent un coup de fouet aux ventes qui, malgré cela retombent comme un soufflet début 1983 lors de la présentation de la Fiat Uno

La Fiat 127 Panorama (en haut) et la Fiat 127 CL 5 portes (en bas)

Le glas n’a cependant pas encore sonné car la 127, ultra-amortie, représente une alternative à bas prix encore intéressante. Elle est de nouveau remodelée pour aboutir à la Fiat 127 dite « Unificata » qui est en fait une harmonisation esthétique entre les modèles produits en Europe et en Amérique du sud. Elle tombe ensuite de plus en plus en désuétude, se retirant du marché français en 1985 et quittant les chaînes de production en 1987.  

Utilitaire, plagiste et latine.

Fiable et économique, la Fiat 127 constituait une excellente base pour élaborer des dérivés de tous types. Le plus diffusé fut sa variante utilitaire : le Fiorino, présenté en 1977. Esthétiquement il s’agissait d’une Fiat 127 amputée de sa partie arrière à la place de laquelle un fourgon avait été greffé. Il fut proposé avec les différentes motorisations de la 127 berline et fabriqué en Italie et au Brésil. Certains marchés eurent même droit à une version Panorama vitrée et munie d’une banquette arrière. Sa carrière s’arrêta en 1987 lorsqu’il fut remplacé par son équivalent basé cette fois-ci sur la Fiat Uno. 

La Fiat 127 Fiorino, version utilitaire de la 127

Plusieurs versions cheveux au vent, reprenant l’esprit de la Citroën Méhari, ont même été fabriquées. L’une des plus connues fut le Scout, carrossé par Fissore. D’abord réalisé en fibre de verre, il fut ensuite fabriqué en tôle. Le seul élément encore reconnaissable de la Fiat 127 était la face avant dont l’évolution suivait celle du modèle de série. 

En Espagne la Seat 127 s’éclipsa du marché en 1981 alors que les accords conclus avec Fiat touchaient à leur fin. Malgré cela, un copié/collé du nom de Seat Fura continua d’y être vendu jusqu’en 1986. Enfin, la Fiat 127 sud-américaine, vendue sous le nom de Fiat 147, connut la plus longue carrière. Fabriquée au Brésil et en Argentine, le dernier exemplaire tomba des chaînes de production en 1996. Fait insolite : une version de la 147 fonctionnant à l’éthanol fut lancée en 1979. Produite jusqu’en 1987, elle fut la toute première voiture au monde commercialisée avec cette spécificité. 

La Seat Fura, qui sera produite après la rupture des accords Fiat/Seat

Au terme de ces longues années de vie, la Fiat 127 fut produite à 5 124 289 exemplaires. Un chiffre plus qu’éloquent quant au succès qu’elle a pu rencontrer. Fiable et économique, il reste encore facile d’en trouver en bon état de nos jours bien que les modèles les plus anciens aient la corrosion comme talon d’Achille. 


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