Alfa Romeo Arna : l'italienne aux yeux bridés
Il est des bonnes idées qui peuvent s’avérer des plus mauvaises. Au même moment où Saab produit sa 600 sur une base de Lancia Delta pour couvrir un segment du marché ou la marque est jusque là absente (lire : Saab 600), Alfa Romeo, qui ne fait pas encore partie du groupe Fiat et appartient au groupe industriel nationalisé IRI, cherche à proposer une voiture capable de riposter à Volkswagen et à sa Golf tout en limitant les frais de développement.
L’allié parfait pour Alfa sera Nissan, qui cherche à produire en Europe sa berline Pulsar (vendue à l’époque sous la marque Datsun). La bonne idée, ce sera donc de reprendre la Pulsar et de lui adjoindre un moteur d’Alfasud. Aussitôt dit aussitôt fait, une joint venture est créée (Alfa Romeo Nissan Automobili SpA), une usine construite, jusqu’à ce qu’on s’apercoive un peu tard qu’il faudra retravailler la carrosserie de la Pulsar pour y loger le moteur italien. Ce manque de préparation augmentera largement les coûts initialement prévus, et bien entendu, provoquera des retards dans la commercialisation du véhicule.
Evidemment, cela ne s’arrête pas là, et la poisse poursuit Alfa puisque l’Arna (c’est son nom), sera un bide commercial. En effet, la ligne empruntée à la japonaise (qui, elle, est commercialisée depuis 1978) n’est pas très novatrice lorsque l’Arna sort enfin pour la première fois des chaînes de production en 1983. Une carrosserie vieille de 5 ans donc, et surtout totalement décalée par rapport au style habituel des Alfa Romeo. La présence du boxer de l’Alfasud ne suffit pas à en faire une vraie Alfa.
Le projet est trop avancé pour être stoppé, mais Alfa sent bien que la mayonnaise ne prendra jamais, et en parallèle développe en urgence une remplaçante sur la base de l’Alfasud, l’Alfa 33. Difficile pour l’Arna d’exister entre une sœur plus attirante qu’elle visant le même public, des concurrentes bien plus séduisantes et performantes qu’elle, une ligne datée voire même passée, et une image floue.
Ce qui devait permettre à la marque au trèfle de sortir un modèle aux coûts de développement modérés devient un désastre industriel et précipite l’entreprise dans les difficultés. Alfa Romeo sera rachetée par Fiat en 1986. Dès 1987, les décideurs de Turin décident d’arrêter les frais avec l’Arna, qui ne se sera vendue qu’à 53 000 exemplaires.