Ça ne vous aura sans doute pas échappé si vous suivez l’actualité automobile : la VW Golf est désormais quinquagénaire ! Lancé en 1974, le modèle emblématique de la firme allemande en est à sa huitième génération (et pas la dernière, puisque Wolfsburg a récemment annoncé qu’une neuvième série était en cours de développement). Bien sûr, l’auto a beaucoup changé en cinquante ans, tout en demeurant fidèle à son concept de base : proposer le meilleur compromis possible entre encombrement et habitabilité, performances et économie d’usage, confort et praticité. En somme, la définition de la compacte idéale dont, rappelons-le, la Golf a inauguré le concept en Europe… Il y a déjà longtemps que les collectionneurs ont commencé de s’intéresser à l’engin, tout d’abord dans ses variantes les plus sportives ou les plus récréatives – nous songeons bien sûr aux GTI et aux cabriolets – mais, à présent, même les Golf les plus humblement présentées et les plus modestement motorisées retiennent l’attention, aussi bien en raison de leur grande rareté que de leur dépouillement.
Golf I : il n’y a pas que les GTI !
Comme toujours s’agissant d’une voiture qui fut extrêmement populaire en son temps (6,7 millions de Golf de première génération ont été construites jusqu’en 1983, auxquelles il faudrait ajouter les exemplaires produits par la suite, de longues années durant, en dehors de l’Europe), ce sont les versions les plus sportives et/ou les plus exclusives qui ont, en premier lieu, suscité l’intérêt des collectionneurs. Si la Golf, dans ses variantes « civiles » a, à elle seule, créé le segment des compactes européennes, la GTI a pour sa part donné son nom à une sous-catégorie à part entière – celle des compactes sportives, ou hot hatches comme on dit outre-Manche – dont elle sera la reine incontestée jusqu’à la fin de sa carrière, même si sa suprématie aura été fréquemment attaquée par la quasi-totalité des constructeurs du Vieux Continent. De nos jours, ce sont les toutes premières GTI (boîte 4, petits pare-chocs, petits feux) qui sont les plus recherchées, pouvant prétendre à plus de 25 000 euros pour les plus beaux exemplaires sur le marché allemand. Les autres déclinaisons (1600 boîte 5 et 1800) suivent le mouvement à distance plus ou moins respectable, la rarissime Oettinger à culasse 16 soupapes, développée à la demande de VAG France, atteignant évidemment d’autres altitudes… Pour leur part, les cabriolets – y compris les exemplaires animés par les moteurs 110 ou 112 ch de la GTI – incitent naturellement plus à la balade qu’à l’arsouille. Souvent vilipendés en raison d’un arceau de sécurité critiqué par les puristes, c’est sans doute à ce même arceau qu’ils doivent une bonne partie de leur charme aujourd’hui ! Enfin, les Golf « normales », déclinées en de nombreux niveaux d’équipement et motorisations sont paradoxalement devenues beaucoup plus rares que les GTI et s’avèrent à présent très recherchées outre-Rhin. Une piste à ne pas négliger pour ceux qui ne craignent pas l’austérité et recherchent un daily driver aussi charmant que décalé…
Golf II : un autre monde
« On a tout changé sauf son nom » clament les publicités françaises lors du lancement de la Golf II, en septembre 1983. Ce qui n’est pas tout à fait vrai, la plupart des moteurs provenant en droite ligne de sa devancière… Pour autant, l’auto n’est pas seulement nouvelle ; elle ratifie définitivement son appartenance au clan des compactes en grossissant, de façon spectaculaire, dans toutes les directions – ce qui lui vaudra d’ailleurs des critiques acerbes de la part de la presse française. Fini le temps où certains magazines spécialisés comparaient encore le modèle à des Renault 5 ou à des Citroën Visa : la nouvelle Golf se mesure désormais exclusivement aux Ford Escort, Opel Kadett, Fiat Ritmo ou Renault 11, qu’elle domine de la tête et des épaules à tous égards ! Et, pour faire face à une concurrence de plus en plus affûtée, VW ne refuse rien à son fer de lance, dont les évolutions techniques seront incessantes durant ses huit ans de carrière. Ainsi, c’est avec la Golf II qu’apparaissent, entre autres, la première GTI « usine » à moteur 16 soupapes, le compresseur « G » et la transmission aux quatre roues. La plus rare des Golf II n’est autre que la Limited de 210 ch – la seule à combiner le moteur à compresseur aux quatre soupapes par cylindre et aux quatre roues motrices –, dont seuls 71 exemplaires seront construits. Indisponible en cabriolet – la Golf I décapotable poursuivra sa route jusqu’en 1993 ! –, c’est dans ses exécutions les mieux motorisées que la deuxième génération est la plus recherchée à l’heure actuelle, sauf sur le marché allemand où, comme pour la Golf I, les finitions et motorisations les plus modestes deviennent à leur tour très convoitées. Toutes les GTI ainsi que la décevante Rallye sont désirables dans une optique « collection » mais, si beaucoup d’amateurs traquent en priorité les 16 soupapes et les G60, nous avouons un faible pour la variante à 8 soupapes, injustement critiquée en début de carrière en raison de son embonpoint mais dont la mécanique distille un agrément de tout premier ordre… Les amateurs de bizarreries pourront toujours essayer de dénicher une Country, improbable version surélevée à quatre roues motrices restée sans lendemain et dont l’accastillage semble, dans une certaine mesure, préfigurer les SUV d’aujourd’hui…
Golf III : l’avènement du VR6
À l’automne de 1991, Volkswagen renouvelle sa Golf pour la deuxième fois et – c’est historique – renonce aux projecteurs ronds ! Rondouillarde, alourdie, mieux équipée et plus confortable que le modèle sortant, la Golf III semble s’inscrire dans la tendance du bio design alors en vogue. Elle reste avant tout une Golf et en préserve les vertus cardinales mais présente néanmoins quelques faiblesses en matière de finition et de durabilité – les cost killers sont passés par là… Si les versions courantes s’orientent vers un embourgeoisement dont le modèle ne s’éloignera plus par la suite, la GTI « 8 soupapes » déçoit en se dépouillant de la sportivité qu’incarne son blason ; les amateurs se tournent plus volontiers vers la GTI 16V, dotée d’un 2 litres de 150 ch qui se révèle à la hauteur de sa tâche, bien que l’engin se fasse tailler des croupières par une certaine Peugeot 309 dès que la route se met à tourner… Et puis, bien sûr, il y a la VR6 ! Première compacte à moteur six-cylindres, l’auto reprend ses distances par rapport aux plébéiens « quatre pattes » de la concurrence avec une mécanique aussi originale – le VR6 présente en effet un angle de seulement 15 degrés, d’où la présence d’une seule culasse – que mélodieuse et performante. Avec ses 174 ch (voire même 190 pour les VR6 Syncro), la Golf ainsi gréée ne joue plus dans la cour des GTI, mais se rapproche des chronos d’une BMW 325i… La Golf III se déclinera aussi en cabriolet, certes moins délicieusement vintage mais bien plus moderne que son prédécesseur et qui commence d’intéresser les collectionneurs – les premiers exemplaires ont déjà plus de trente ans – et en break, dont la version VR6 Syncro, produite uniquement de 1995 à 1997, fait à notre sens figure de collector ultime !
Golf IV : montée en gamme
Lors de l’IAA 1997, VW frappe un grand coup en dévoilant la quatrième génération de sa Golf. Si l’esthétique de l’auto se contente d’actualiser les thèmes retenus par la Golf III, la plateforme inédite – c’est celle de l’Audi A3 « 8L » présentée l’année précédente – un très large éventail de motorisations et la qualité de finition du nouveau modèle assomment littéralement la concurrence généraliste, cruellement distancée par celle qui fera figure de benchmark absolu dans sa catégorie. C’est à ce moment-là, et grâce à cette seule voiture, que Volkswagen change insensiblement de statut ; pour une grande partie du public, la firme n’est alors plus perçue comme un constructeur généraliste, mais évolue dorénavant dans un territoire inédit, à mi-chemin entre les labels populaciers et les marques premium – ce dont témoignent des tarifs supérieurs à ceux de ses rivales. Hormis une qualité d’amortissement discutable et des sièges aussi confortables que des parpaings, il n’y a objectivement pas grand-chose à reprocher à la Golf IV, dont la réputation s’édifiera principalement sur la base des moteurs TDI qui, fièvre du Diesel aidant, vont littéralement envahir le marché, en particulier en France, reléguant de la sorte les versions essence au second plan. Quant aux sportives de la gamme, les voici en proie aux affres de la marginalité : la GTI, à présent dotée d’un 1,8 litre turbocompressé à cinq soupapes par cylindre, souffre de mécaniques certes honorables mais sans grand caractère – et ne parlons pas de la version Diesel dont elle sera affublée en fin de parcours… à tel point que le très original moteur V5 (un VR6 privé d’un cylindre) semble plus intéressant en collection. La V6 a pour sa part perdu son « R » pour des motifs obscurs mais a gagné une culasse à 24 soupapes et une transmission intégrale de série, à présent équipée d’un coupleur Haldex et baptisée 4Motion – une version que vous ne croiserez que rarement, à moins de vivre en Suisse ou en Autriche. Le VR6 servira de base à la Golf IV la plus désirable ; il s’agit bien sûr de la R32, première du nom, dont les 241 ch sont malheureusement desservis par un châssis peu efficace en conduite sportive. Anorak fact : en mai 2005, une Golf IV 1,6 litre ayant appartenu au cardinal Joseph Ratzinger fut vendue via eBay, quelques jours après que son ancien propriétaire eut été élu pape sous le nom de Benoît XVI, pour la modique somme de 189 000 euros !
Golf V : l’âge de la maturité
Quand la Golf V apparaît, à l’été 2003, Le Moniteur Automobile égratigne la nouvelle venue en écrivant : « Pour la première fois, ça pourrait être n’importe quoi d’autre ». Même si le design est devenu moins prescripteur et si la qualité perçue semble en léger recul par rapport à la Golf IV, avec le recul du temps, ce jugement semble quelque peu excessif, notamment si l’on compare l’auto à ses concurrentes… Indéniablement, le modèle a mieux vieilli que les Focus, Astra, Mégane ou 307 contemporaines. Et puis, surtout, la Golf de cinquième génération a servi de réceptacle à la renaissance de la GTI, redevenue pleinement compétitive après les errements de sa devancière. À présent animée par un 2 litres turbo de 200 ch, la première GTI du XXIe siècle a retrouvé un brio digne de son appellation, d’autant plus que son châssis a nettement progressé par rapport à la quatrième génération. Avec des amortisseurs enfin efficaces, la Golf V se montre bien plus enthousiasmante à mener, y compris sur les itinéraires les plus sélectifs – à tel point que la R32, elle aussi réincarnée et disposant de 250 ch, ne semble pas indispensable, sauf si vous tenez absolument à disposer de quatre roues motrices ; son surcroît de puissance est en effet en grande partie annihilé par un poids en hausse par rapport à la GTI. Celle-ci, qui plus est nantie d’attributs nostalgiques avec sa sellerie en tissu écossais, est sans conteste la version à collectionner en priorité. Il ne lui manque, à la vérité, que la tessiture très particulière de l’inusable VR6 pour recueillir tous les suffrages. À peine âgée de vingt ans pour les exemplaires les plus anciens, elle peut devenir votre compagne du quotidien, où elle vous ravira par une polyvalence exemplaire et un niveau de confort qui lui permet aussi de jouer les autoroutières. Une future grande classique, à n’en pas douter !
Texte : Nicolas Fourny