Volkswagen Karmann-Ghia Typ 14 : quand la Beetle se transforme en Pussycat
La Volkswagen Typ 14 Karmann-Ghia est un drôle de petit canard, ou plutôt de minou, puisqu’aux USA on l’appelait Pussycat. Chef d’oeuvre à collectionner pour les uns, ersatz de sportive aux lignes molles pour les autres, elle ne laisse en tout cas pas indifférent et, surtout, elle fut un succès commercial inattendu pour Volkswagen qui voyait en elle un dérivé éphémère de sa petite Cox. Elle restera pourtant en production pendant presque 20 ans, dépassant largement les 400 000 exemplaires produits.
Tout commence au début des années 50. Depuis 1948 et la relance de la production de la Käfer (Coccinelle chez nous) grâce au Major Hirst et à la reprise en main de l’entreprise par Heinrich Nordhoff, Volkswagen est remise sur les rails du succès commercial et s’offre même deux cabriolets pour conquérir le marché des loisirs (et des Etats-Unis), l’un à 4 places produit par Karmann, l’autre à 2 places produit par Hebmuller. Forcément, on s’intéresse en haut lieu à la diversification et le succès de Porsche et de sa 356 dérivée de la Cox attise les désirs d’un dérivé sportif.
Karmann flaire le bon coup
Nordhoff n’est pas totalement convaincu du bien fondé de la démarche, mais finit par donner son aval pour étudier la question. Chez Karmann, qui désormais produit seul le cabriolet après l’incendie des locaux de Hebmuller, on voit l’occasion de conforter ses relations avec Volkswagen et d’augmenter les volumes de production. L’idée du carrossier est simple : proposer un coupé alliant l’élégance italienne à la rigueur germanique. Il va donc faire appel au styliste italien Ghia pour élaborer une ligne suffisamment séduisante pour convaincre Nordhoff.
La ligne un peu molle pour nos yeux d’hommes du XXIème siècle séduit. De toute façon, en partant du châssis et de la mécanique de la Cox, il ne fallait pas s’attendre à beaucoup mieux. Karmann sera même obligée d’élargir la base initiale pour atteindre son but : un petit coupé rondouillard, certes, mais d’allure élégante (selon les critères de l’époque) et sportive (ce qui s’avère moins évident si l’on considère la mécanique).
Une mécanique de Cox
Mécaniquement, justement, on se contente d’utiliser le 1 200 de la Cox tel quel. Avec 30 chevaux, difficile de faire passer la Karmann-Ghia pour une réelle sportive. Présentée en 1955, elle remporte pourtant d’entrée de jeu un franc succès, notamment aux USA, friands de ce genre de petit coupé européen. Là-bas, Volkswagen a repris en main sa distribution après être passée par Max Hoffman et entreprend de s’établir définitivement avec ce modèle, surnommé “Pussycat”.
Dès lors, il faut une version cabriolet, une évidence pour qui veut conquérir l’Amérique en général et la Californie en particulier. Ce sera fait en 1957 pour le plus grand bonheur de la clientèle qui semble se satisfaire de la maigre puissance pourvu qu’il y ait du style et pour tout dire du plaisir. Le coupé a déjà conquis l’état-major de VW : prévu pour être vendu en tout et pour tout à 10 000 exemplaires, il atteint ce chiffre sur une seule année en 1956 (11 566 ex). Une aubaine pour Karmann, un bonus pour Volkswagen. Dès 1958, la production du coupé Karmann-Ghia va aussi débuter au Brésil, lancée par la filiale brésilienne de Karmann (une version spécifique « TC » dessinée par Giugiaro y sera également produite à partir de 1970).
Succès commercial
Petit à petit, le coupé comme le cabriolet vont évoluer : le 1 200 gagne 4 chevaux en 1961 (34) puis un 1 300 de 40 chevaux vient l’épauler en 1966. En 1967, on passe au 1 500 de 44 chevaux, disponible en boîte “semi-automatique” en option puis en 1971, la Karmann-Ghia passe au 1 600 pour la bagatelle de 50 canassons : il aura fallu plus de 15 années pour gagner 20 chevaux.
Cela n’aura pas empêché le duo de solidement s’ancrer durant les années 60, avec des ventes stables : mieux, le record de vente s’établira plus de dix ans après son lancement, en 1966. Autant dire que la Karmann-Ghia se bonifie avec le temps. Jusqu’à la fin des années 60, tout roule pour elle. Mais en 1970, afin de respecter les nouvelles réglementations de son principal marché, les USA, le petit “KG” doit passer par la case ravalement : entre autres petites modifications, on notera l’ajout de pare-chocs enlaidissant la ligne. Rajoutez-y le poids des ans et vous obtenez une baisse des ventes qui se sent dès 1971, pour finir par devenir anecdotiques en 1974.
De toute façon, Volkswagen est en train de faire sa révolution : adieu le tout à l’arrière si cher à la marque, place à la traction, et un Scirocco puisant l’inspiration chez NSU. Pour le sport, Volkswagen s’allie avec Porsche pour lancer la 914. Le Karmann-Ghia, lui, tire sa révérence, mais aujourd’hui, c’est devenu une référence dans le monde de la collection. Vous laisserez-vous tenter ?