Pirelli "P Zero Experience" : Magny-Cours en Jaguar F-Type !
Jeudi 28 mai , 14h15, Porte Maillot, « terminus tout le monde descend » (petit clin d’oeil). Avec ma décontraction légendaire, je quitte la RATP sans regret pour aller dompter des félins d’une toute autre classe qu’un MP89, fut-il automatisé (les amateurs de matériels roulants parisiens comprendront). Car ce jour là, ce sont pas moins de 4 Jaguar F-Type qui m’attendent pour un périple en direction de la Nièvre, et d’un petit village qui résiste encore et toujours à l’électrique : Magny-Cours. Devant le palais des congrès, ça sent l’essence et la gomme neuve, des Pirelli P Zero of course. C’est en effet au manufacturier italien que je dois de me trouver là, prêt à embarquer dans une drôle de caravane. Notre mission ?: convoyer les 4 anglaises vers le circuit nivernais pour participer aux « P Zero Experience », rassemblement incroyable de belles voitures pour profiter de leurs performances sur un circuit de F1 !
A la vue des petites anglaises arrivant Porte Maillot, je mesure le chemin parcouru depuis ce jour de mars 2014, où je décidais de lancer ce blog comme une bouteille à la mer. En un an, je passais d’une vie pépère en Charente Maritime aux grandes joies des happy few de l’automobile. Jamais je n’aurais pensé conduire une voiture de 550 ch comme la Jaguar F-Type R dont les respirations du V8 réveilleraient un mort ! Cela dit, pour le V8, ce jour là, j’attendrais. C’est la version S et son V6 de 380 ch qui m’est attribué, mais en version cabrio! Largement suffisant sur route ouverte et limitée : j’ai pu suivre le rythme des autres V8 sans jamais être largué.
Croyez-moi si je vous dis que conduire ce genre de voitures est un moment d’exception. Quand 4 Jaguar de ce type-là (le F on vous dit!) circulent sur le périph’, ce sont des sourires et des pouces levés qui égrainent le trajet jusqu’à la Porte d’Orléans. Même les flics, en opération, doublent gyrophares en action et sirènes hurlantes, en brandissant les pouces par les vitres entrouvertes. Preuve en est qu’une telle voiture provoque une sympathie évidente, malgré son prix qui l’éloigne du commun des mortels. Le bruit du moteur et des échappements sous les tunnels, même à vitesse réduite, avertit tout de suite le conducteur lambda qu’un bolide pas banal se trouve derrière lui. Et rien que pour cela, c’est un « kiff » total.
Ce « kiff » justement, durera près de 3 heures, le temps de sortir de Paris, de rouler jusqu’à la Loire, de sortir prendre quelques photos au bord d’un canal, et de repartir direction Magny-Cours, le but de notre expédition. Mais il suffit de deux heures pour apprécier sa monture, et je vous promets qu’arrivé à l’hôtel, voir partir ces Jag’ vers le circuit pour qu’elles soient préparées pour la journée du lendemain (nettoyage notamment), fut un vrai déchirement : on s’habitue à ces petites bêtes là. Dans la cour, une Alpine A110 sur plateau refaite à neuf me rappelle de ne pas passer trop rapidement du côté obscur de la force (celui des voitures neuves!).
Voyez comme on finit par s’habituer à l’exceptionnel : dîner avec le directeur marketing de Pirelli, l’excellent Alberico (un homme qui aime le Menetou Salon ne peut être mauvais), le directeur marketing de Jaguar, le tout aussi excellent Laurent (un homme qui conquiert l’Everest, et qui aime les Saab au point d’y avoir travaillé ne peut être mauvais), et Anthony Beltoise (un homme qui pilote comme il respire et qui respire la simplicité ne peut être mauvais) semble tout à fait normal, au point de parler de tout et de rien (et même de Boîtier Rouge) avec une totale décontraction. Savoir qu’un circuit nous attend demain n’est en aucun cas un problème : tout est normal… Enfin, en me couchant le soir, je m’aperçois que non, ce n’est pas normal, c’est hors-norme justement.
Le Vendredi 29 mai est une autre « limonade », permettez-moi l’expression. On rentre dans le dur avec un réveil aux aurores, pour atteindre le circuit à 8h15 ! Malgré l’horaire, le parking est déjà plein de voitures que vous rêveriez de voir séparément ! Là, y’en a plus de 50, des Ferrari, Lamborghini (Murcielago), Maserati, Porsche (dans toutes les versions possibles), Lotus, BMW, KTM X-Bow (lire aussi : KTM X-Bow), Mercedes, Jaguar (of course, et même une XKR!!!) et j’en oublie sans doute. A force de déambuler dans le parking et de les doubler (ou de me faire doubler, ce qui arrivera plus souvent), on finit par trouver cela tout à fait normal !
Première surprise : avant d’attaquer le « grand circuit », direction le petit, pour tester « quasi » en avant-première (je n’étais pas en Espagne pour les essais presse) les nouvelles XE de nos amis anglais. Moi je suis comme un diesel, et me balancer comme ça sur la piste me fout la pression : premier passage avec le plus puissante des deux, un 2 litres turbo de 200 ch, me fait obtenir un temps de merde. Hasard, coïncidence ou excuse, je passe la ligne d’arrivée avec les freins en feu et dois tourner sur le parking pour aérer tout cela… Deuxième passage avec le 2 litres Turbo diesel de 180 ch et j’améliore mon temps de 10 secondes !!! Mais rassurez-vous, j’ai terminé bon dernier !
Etrangement, c’est sur le grand circuit de Magny-Cours que je me suis senti le plus à l’aise. En montant dans l’Audi TTS montée en Trofeo R (avec seulement 310 ch et une transmission intégrale), j’ai compris dès les premiers mètres qu’elle m’irait. Il faut avouer que je retrouvais à mes côtés une vieille connaissance, Roland, qui m’avait déjà guidé au Castellet en janvier dernier (lire aussi : Toyota GT86) au volant de Toyota GT86, et qui connaissait mes capacités de pilote. Après un premier tour hésitant, et un deuxième encourageant, je terminais mon troisième tour avec brio (« avec qui ? »), mais surtout rassuré : j’étais capable de tenir le rythme, de circuler à haute vitesse malgré l’affluence sur le circuit, et de dépasser ou de me laisser dépasser sans encombre. Avoir un petit compliment de Roland en fin de tour en pouvait que m’encourager.
J’avais cependant pu mesurer la distance qui me séparait d’un vrai pilote. Car avant d’être lancé dans le grand bain du circuit, c’est à bord d’une Jaguar F-Type R propulsion et 550 chevaux que j’ai découvert la piste. Comme passager bien sûr, mais avec Anthony Beltoise comme conducteur. Comme on avait dîné la veille ensemble, on se connaissait un peu, résultat, on a tchatché… Erreur !!! Avez-vous jamais discuté avec quelqu’un au volant d’une voiture qui va à 245 km/h dans la grande ligne droite d’un circuit de F1, et qui vous regarde en même temps qu’il règle la climatisation, freine, enchaîne la chicane tout en tenant le volant à deux pouces (alors que vous êtes arrimés à tout ce qui peut servir de soutien). Etrange sensation, drifts dans les virages, dépassement de tout ce qui roule sur le circuit, deux tours à mettre dans le vent tout le monde, pour un retour à la base enthousiaste et frustré : « c’est donc si façile ? ».
Non ça ne l’est pas !!! Après le déjeuner (grave erreur le déjeuner qui endort), fallait que je m’y colle : direction le volant de la F-Type R, mais en version AWD (merci, c’était plus prudent). Avec 240 ch de plus que l’Audi TTS, on rentrait dans une autre catégorie. Je n’avais plus Roland à mes côtés, mais je connaissais le circuit. Difficile de se déconstruire, et mon instructeur a du cravacher pour m’obliger à faire ce que mon cerveau refusait : continuer à accélérer alors qu’en temps normal vous auriez déjà freiner ; passer des virages à des vitesses improbables pour votre cerveau habitué aux routes départementales ; « allez, on passe les 200 km/h dans la ligne droite » pour finir par atteindre 220 (25 km/h de moins qu’Anthony Beltoise, c’est énorme en course, mais très peu pour moi) ; affronter des chicanes dans un superbe bruit de V8 vrombissant ; vous êtes bon dernier, mais vous avez l’impression de vous être surpassé. Quel pieds !
Quand on y réfléchit, 550 chevaux c’est énorme. Combien d’entre vous, chers lecteurs, peuvent dire qu’ils ont conduit une voiture de cette puissance là, équipée de pneus adaptés, dans un environnement dédié, en ayant pu la pousser dans ses retranchements (enfin non, soyons réalistes, c’est « elle » qui nous aura poussé dans « nos » retranchements) ? Quelques uns sans doute, mais une infime minorité. Et croyez-moi : je ne refuse jamais une expérience sur circuit malgré mon appréhension (ce n’est pas toujours une partie de plaisir), car j’y découvre les capacités d’une voiture, de ses pneus, de ses freins, de son comportement, et à chaque fois cela me permet de mieux comprendre pourquoi j’aime la voiture : performance, odeur, son, maîtrise, sport, image et design, histoire ; une voiture sur un circuit met en connexion tous vos neurones, vous obligeant à un dépassement de soi intellectuel, physique et psychologique et à ressentir tout « autrement ».
Merci donc à Pirelli et à Jaguar, car ce type d’expérience est rare dans une vie !
A suivre : La Jaguar F-Type !!
Images: Paul Clément-Collin, Jaguar France et Pirelli