Mini Designer (ADO20) : de la minijupe à la Mini tout court
Au milieu des années 80, pour maintenir les ventes de la petite Austin Mini (qui perdra sa marque en 1987 pour devenir Mini tout court) face à sa soeur Metro et pour cibler une clientèle jeune, chic et moderne, le groupe Rover se lance dans la multiplication des séries spéciales (à la manière de la DS3 ces dernières années) : Ritz, Sprite, Chelsea, Park Lane, Piccadilly viennent ainsi égayer le catalogue de la Mini et la grisaille des rues du Londres des années Thatcher. En 1988, cette politique se poursuit et Rover Group décide de faire un clin d’œil au Swinging London en réalisant une série limitée en collaboration avec la styliste Mary Quant : la Mini Designer.
En France, c’est André Courrèges que l’on célèbre lorsque l’on évoque la minijupe. En Angleterre, c’est à Mary Quant que l’on pense car, aujourd’hui encore, la chose n’est pas tranchée. Il est probable que la minijupe soit née spontanément dans l’esprit de ces deux créateurs au même moment tant elle était dans l’air du temps. Toujours est-il que pour nos meilleurs ennemis, Quant est la créatrice représentative du Swinging London des années 60. Sa boutique sur King’s Road, dénommée Bazaar, devient rapidement l’un des endroits les plus branchés de cette époque. S’y organisent de nombreux événements culturels, artistiques ou musicaux. Du côté de la mode, elle crée le fameux London Look, les imperméables en plastique et surtout la minijupe. Fan absolue de la petite voiture créée par Alec Issigonis, elle dit s’en être inspirée pour créer cette jupe ultra courte devenue ultra tendance en très peu de temps.
La rencontre de deux icônes des sixties
Mary Quant abandonne la mode dans les années 70 pour se consacrer notamment aux cosmétiques ; mais elle reste une icône outre-Manche. Si l’on ne sait pas qui, de Courrèges ou de Quant, inventa la minijupe, on sait en revanche qui des deux commença en premier les collaborations automobiles. Cocorico, cette fois-ci, c’est notre couturier national qui prend la main en lançant avec Matra et Simca la désormais fameuse Bagheera Courrèges en septembre 1974 (il œuvrera par la suite sur le Rancho, le Santana Samuraï et même la Citroën e-Méhari, entre autres). Pour Mary Quant, il faudra attendre 14 années et 1988 pour la voir s’intéresser à l’automobile.
Le choix de Rover pour une telle collaboration coule de source. La Mini comme Mary Quant sont des icônes des années 60, et la minijupe, on l’a dit, s’inspire selon la créatrice de la petite voiture britannique. L’association est donc évidente, et totalement cohérente avec la politique en cours chez Rover Group : faire de la Mini un objet de mode, un objet tendance, pour mieux la positionner face à l’autre petite voiture du groupe, la Metro. Certes, la Mini n’a plus la popularité qu’elle avait connue dans les années 60 et 70, passant de 56 297 exemplaires en 1982 à seulement 34 974 en 1985 mais peu à peu, elle remonte la pente grâce à ces séries limitées qui permettent, en outre, de vendre relativement cher un modèle déjà amorti et, d’une certaine manière, obsolète.
Mary Quant au volant de la Mini Designer, en 1988La politique des séries limitées
La Mini Designer est dans la lignée de cette politique : beaucoup de cosmétique, une collaboration judicieuse mais une ADO20 qui commence tout de même à dater. Dans un premier temps, Rover pense l’appeler Mini Mary Quant mais bizarrement, ce nom ne passera pas les fourches caudines de “groupes de clients”. Va pour Designer, tout en mêlant étroitement la créatrice à la communication.
L’extérieur est somme toute banal, et plutôt l’oeuvre des designers internes : la Designer n’est proposée qu’en deux teintes, blanche ou noire, tandis qu’un liseré blanc ou noir (selon la peinture choisie) longe la caisse jusqu’à l’aile arrière où se trouve un logo “Designer”. Pare-chocs, garde-boue et poignées de porte sont en plastique gris mat tandis que les rétroviseurs extérieurs sont noirs ! La petite Mini Designer s’offre aussi des enjoliveurs. Sous le capot, on trouve le 998 cc de 42 chevaux accolé à une boîte manuelle 4 vitesses. A l’avant, le logo est celui de Mary Quant et il n’est fait aucune mention à Austin ou Rover. Seul le logo Mini reste présent sur la grille de la calandre.
Une série qui vaut surtout pour son intérieur et sa signature
C’est à l’intérieur qu’on sent plus la patte de la créatrice : les sièges sont recouverts d’un tissu rayé noir et blanc, avec liseré rouge. Les contre-portes, elles aussi, récupèrent une bande noire entourée de rouge. Les ceintures de sécurité, elles, deviennent entièrement rouges. Le volant s’offre le logo de Mary Quant, une sorte de fleur stylisée. Ainsi gréée, la Mini Designer coûte 4 654 livres tout de même (environ 400 à 500 livres de plus que les autres séries spéciales de l’époque). La production est limitée à 2 000 exemplaires mais il semblerait que quelques unités supplémentaires aient été fabriquées à l’usine de Longbridge.
A priori, toutes les Designer sont à conduite à droite et furent réservées au marché intérieur. Si vous êtes nostalgique des années 60 tout en désirant l’originalité et une certaine modernité (ADO20), c’est sans doute cette Mini qu’il vous faut, mais les exemplaires se font rares et se dénichent uniquement outre-Manche.