Si vous rêvez d’une 911 mais que vous effectuez vos premiers pas dans le monde Porsche, les questions que vous vous posez sont sans doute multiples : quelle génération ? quelle version ? quelle carrosserie ? quel moteur ? À quoi nous pourrions vous répondre par une interrogation substantielle : pour quel usage ? Car la 911 – et cette polyvalence constitue la grande force du modèle –, en fonction de son typage, de ses caractéristiques et de son âge, peut très bien rouler tous les jours, ou bien ne sortir le week-end afin de limer le bitume des circuits ou, plus simplement, partir en balade sur quelque départementale ensoleillée. Et il vous est également loisible (même si c’est dommage) de préserver au maximum votre Porsche en ne parcourant que quelques centaines de kilomètres par an – ce qui est souvent le cas des exemplaires les plus anciens… Dans les lignes qui suivent, nous nous efforcerons de vous guider dans cette belle aventure et de vous apporter nos précieux conseils !
Une vieille dame toujours prête
À présent sexagénaire, la plus célèbre des Porsche a connu plusieurs vies et, entre la sportive austère des débuts et la confortable GT d’aujourd’hui, il y a un monde, même si les fondamentaux du concept originel ont heureusement été prorogés jusqu’à nos jours. Une 911, c’est donc toujours un flat six implanté à l’arrière, qu’il soit refroidi par eau ou par air, atmosphérique ou turbocompressé, et que l’exemplaire convoité date de l’année dernière ou totalise quatre ou cinq décennies d’usage. Cela posé, et comme nous l’énoncions plus haut, votre choix va avant tout dépendre de ce que vous souhaitez faire de votre Porsche. Bien sûr, toutes les 911 de route ont été conçues dans l’optique d’un usage régulier mais, à l’évidence, si votre projet consiste à prendre le volant de l’engin chaque jour que Dieu fait, l’option la plus pertinente consistera sans doute à vous orienter vers une voiture relativement récente – en d’autres termes, les versions « Classic » (1964-1973), si elles ne sont pas à proscrire dans le cadre d’une utilisation quotidienne, ne sont pas forcément les plus adaptées à un tel contexte, en particulier si vous circulez fréquemment en milieu urbain. La frêle carrosserie des premiers modèles est mal protégée contre la rudesse dont font preuve la plupart des conducteurs et, en comparaison de n’importe quel SUV compact, les 911 de cette époque semblent terriblement vulnérables.
Survivre sans se trahir
Par surcroît, l’objectivité commande de reconnaître que, si le charme vintage de ces autos est indéniable, certaines spécificités justement liées à leur âge peuvent rendre pénible la conduite dans certaines circonstances. Nous songeons par exemple à certaines fonctionnalités telles que le chauffage, le désembuage ou l’éclairage, plus symboliques que concrets et qui vous déconcerteront sans coup férir si vous n’êtes pas habitué aux particularismes des véhicules anciens, lesquels peuvent participer d’un charme décalé lors d’une balade dominicale au mois de juin mais aussi transformer n’importe quel embouteillage hivernal en enfer. En revanche, si vous considérez votre 911 comme une auto de collection et que vous prenez soin de ne pas l’exposer aux conditions de circulation les plus ardues, alors les « Classic » vous tendent les bras, avec l’avantage d’un design encore très pur et d’un habitacle dont l’élégance dépouillée ravira les esthètes… À la vérité, c’est à partir de la série G (1974-1988) que le modèle commence d’être compatible avec une utilisation courante – en particulier lorsqu’il s’agit des Carrera 3.2 présentées en 1984, et plus encore dans le cas des voitures équipées de la boîte G50, sensiblement plus agréable à manier que la précédente 915. D’une fiabilité proverbiale, la voiture dispose en plus d’un chauffage un peu plus efficace et, en fonction des options retenues par le premier propriétaire, de certains équipements de confort comme la climatisation, le toit ouvrant, voire les sièges électriques.
Du sport au grand tourisme
Toutefois, c’est réellement à partir du Typ 964 (1988-1993) que la 911 va commencer sa mue en devenant plus accueillante, plus facile à maîtriser et plus confortable. Nouvelle à 85 % en dépit des apparences – qui pourraient faire songer à un simple restylage –, l’auto témoigne d’une profonde mise à jour en adoptant, en série, la direction assistée et l’ABS dont l’absence, il est vrai, devenait de moins en moins tolérable à ce niveau de performances… et de tarif. C’est aussi à ce moment-là qu’apparaît la première Carrera 4, inaugurant une transmission intégrale alors révolutionnaire pour la 911 mais devenue aujourd’hui un grand classique du modèle. Peu à peu, la machine volontiers rétive née un quart de siècle auparavant devient fréquentable par le conducteur moyen et, malgré un âge déjà respectable – les premières 964 ont déjà trente-six ans –, cette génération de 911 ne vous décevra pas si vous recherchez un juste compromis entre une certaine modernité technique et la fidélité à l’esthétique des premiers modèles. La 964 est en effet la dernière 911 dotée des ailes avant d’origine, et donc respectueuse de la silhouette de ses aînées, ce qui ne constitue pas un argument négligeable pour les porschistes invétérés…
Dis-moi quelle 911 tu conduis, je te dirai qui tu es
La 993 (1993-1998) prendra le relais en amplifiant encore la démarche initiée par sa devancière : l’adoption de l’essieu arrière « LSA » (Leicht Stabil Agil) – innovation majeure de cette génération et que l’on retrouvera dans la 996 – confirmant la nouvelle vocation de la 911 qui, après avoir frôlé la disparition pure et simple à la fin des années 70, cherche à élargir sans cesse sa clientèle, ce qui implique de rendre l’auto toujours plus aisée à appréhender, sans pour autant l’affadir. Équilibre délicat que la 996 puis la 997, construites de 1998 à 2013, vont parvenir à préserver avec bonheur en multipliant les variantes, à tel point que, de nos jours, la gamme 992, héritière directe de cette lignée, est bien plus étendue et diversifiée que celles de beaucoup de modèles populaires. Il y en a vraiment pour tous les goûts, du cabriolet idéalement calibré pour les promenades en bord de mer aux redoutables pistardes que sont les GT2 et GT3, en passant par une Turbo devenue, au fil des générations, une rivale crédible pour les coupés de luxe signés Mercedes-Benz, Jaguar ou BMW !
La 996, comme une évidence
Vous l’avez compris, il n’existe pas de « mauvais choix » et, encore une fois, tout dépend de ce que vous attendez de votre Porsche. À titre d’exemple, les 2,7 litres des années 1974-1976 ne disposent que de 150 ch mais, si vous n’êtes pas un obsédé du chronomètre, elles peuvent vous offrir tout le charisme et les plaisirs d’une 911 pour une cote encore raisonnable. Ce qui est également le cas des 996 nées vingt ans plus tard, certes vilipendées par certains puristes – laissez-les dire : cette génération est sans doute l’un des meilleurs rapports prix/plaisir actuels, en particulier avec le moteur 3,6 litres. Et, pour une première acquisition, la 996 jouera avec beaucoup de talent le rôle d’initiatrice. C’est une 911 qui saura vous faciliter la vie et vous accompagner en douceur dans vos premiers kilomètres de porschiste, sans pour autant perdre une once de son caractère. Esthétique, sonorité, plaisir de conduite : tous les ingrédients de la légende sont réunis, avec en prime le charme typique des youngtimers. À notre humble avis, c’est très probablement le meilleur compromis pour une première 911… à vous de jouer, en n’hésitant pas à solliciter les conseils de notre équipe !
Texte : Nicolas Fourny