Dino/Ferrari 308 GT4: la quadrature du cercle !
Née en 1965, la Dino 206 GT, devenue 246 GT en 1969 (lire aussi : Dino 246 GT), tire sa révérence en 1974. Pour perpétuer la marque sœur de Ferrari, tout en cultivant sa différence, on décide à Maranello d’offrir un concept peu ordinaire à Maranello : un V8 central arrière, et 4 places, l’équation presque impossible. Tellement impossible d’ailleurs que Pininfarina déclinera la proposition d’en réaliser le dessin (il dessinera pourtant la Mondial en 1980, nous y reviendrons). C’est donc Bertone qui s’y colle, et son designer fétiche Marcello Gandini. Avec la 308 GT4, il s’agit donc d’une vraie rupture technique et stylistique.
Gandini a surpris tout le monde en présentant la Lamborghini Countach en 1971 (qui rentrera en production elle aussi en 1974). Pour la 308 GT4, il va rester fidèle à son style, beaucoup plus « carré » quand Pininfarina se distingue par ses courbes. Si la 308 GT4 n’est pas aussi révolutionnaire que la Countach, elle détonne franchement après la Dino 246 GT, et au milieu des autres productions Ferrari. Pourtant, malgré les difficultés liées à l’architecture et aux 4 places, Gandini propose une voiture équilibrée, et plutôt séduisante.
Pour Ferrari, la marque Dino est sensée être l’entrée de gamme, l’antichambre avant les fabuleux V12 badgés du cheval cabré. Outre cette 308 GT4, dotée d’un V8 de près de 3 litres (2927 cm3) offrant 250 chevaux, la gamme proposera aussi une 208 GT4, le même modèle mais avec un V8 de moins de 2 litres de 170 ch répondant aux exigences d’une législation italienne favorisant les « petits moteurs ».
Présentée fin 1973, la 308 GT4 rentre en production en 1974 pour une première série badgée Dino jusqu’en mai 1975. En cette année, Enzo Ferrari décide d’arrêter la marque qui porte pourtant le nom de son fils. Ferrari n’a pas les moyens d’entretenir deux marques d’une part. D’autre part, la crise pétrolière de 1973 a fait évoluer Enzo, qui n’est plus autant « à cheval » sur ses principes techniques. Il conçoit désormais qu’une Ferrari puisse être équipée d’autre chose qu’un V12 en position avant. Il voit donc son intérêt à proposer des petites sportives portant désormais la marque Ferrari. Adieu Dino donc, et la 308 GT4 reçoit son cheval cabré à partir de juin 1975, après un petit restylage.
La 308 GT4 restera en production jusqu’en 1980, après 2826 exemplaires (auxquels il faut rajouter 840 exemplaires de la 208 GT4, sa sœur de moins de 2 litres). Elle laissera la place à la Ferrari Mondial, dessinée elle par Pininfarina.
Il est amusant de voir qu’aujourd’hui, cette Dino devenue Ferrari, tant décriée par les afficionados à cause de sa ligne, de ses 4 places et de son statut de batarde, bénéficie d’un regain d’intérêt. Longtemps Ferrari la plus abordable, elle voit sa côte remonter pour dépasser les 45 000 euros. La faute (ou grâce?) à la spéculation actuelle concernant les modèles de collection. Par ricochet, tous les modèles Ferrari, même les plus ingrats, prennent de la valeur.
Mais il n’y a pas que l’effet « spéculatif » pour expliquer ce soudain rebond. Son statut de dernière Dino, mais aussi de première Ferrari à moteur central V8, lui donne tout son intérêt historique. Sa ligne spécifique, la seule réalisée par Bertone, lui donne un cachet particulier, surtout que le style est plutôt réussi. Certes, elle dénote un peu dans la généalogie, mais n’en reste pas moins une voiture performante, et ne déshonore pas le blason qu’elle porte, loin de là. Justement, elle est la preuve qu’attendait Enzo, la validation d’un concept que le fondateur de Ferrari a eu du mal à accepter avant d’en devenir l’apôtre : la 308, version 2 places dessinée par Pinifarina naîtra en 1975 et qui donnera naissance à une véritable lignée de petites bombe (328, 288 GTO, 348, 355 etc) qui deviendront l’ADN nouveau de Ferrari (lire aussi : Ferrari 208 Turbo et Ferrari 348).
Comme quoi, il ne faut jamais se moquer ! Malgré sa « différence », la 308 GT4 fut une voiture importante pour Ferrari. Une façon pour moi de vous dire que les ayatollahs sont souvent des conservateurs dont la courte vue les empêche de voir l’avenir ou d’admettre l’importance d’une révolution. Etrangement, la Mondial qui succèdera à la 308 GT4 connaîtra les mêmes critiques malgré son dessin Pininfarina (certaines justifiées, comme la faible puissance de son moteur au début). Et vous savez quoi ? J’aime la Mondial, étonnant non ?