Aston Martin Cygnet : un flop bien mérité
Les réglementations sportives ou écologiques obligent parfois les constructeurs automobiles à créer des voitures extraordinaires, ou bien ratées, cela dépend. L’homologation en « Groupe A » dans les années 80 contraignèrent les constructeurs à produire 200 exemplaires civiles de leurs voitures de rallye, donnant naissance à des monstres de la route aujourd’hui très recherchés des collectionneurs. A l’inverse, l’obligation faite par l’Union Européenne aux constructeurs d’abaisser le niveau global des émissions en CO2 ont conduit Aston Martin, l’une des marques les plus mythiques du monde, à créer une voiture incongrue dans sa gamme, au positionnement marketing hasardeux, qui se révéla un véritbale échec dont la marque anglaise n’avait vraiment pas besoin : la Cygnet.
Persuadés qu’il y avait un marché pour une petite Aston Martin des villes, luxueuse et désirable, et décidés à respecter les obligations européennes, les têtes pensantes de Gaydon planchèrent donc sur la question. Pas question, par manque de moyen, de créer de toute pièce une citadine. C’est donc grâce à un partenariat avec Toyota que la Cygnet vit le jour. L’erreur d’Aston aura été de penser qu’il suffisait d’un peu de cosmétique, et d’un luxe inouïe, pour vendre comme des petits pains leur nouveau joujou. Optimistes dans l’âmes, les marketeurs s’imaginèrent même qu’ils pourraient se payer le luxe de ne vendre la voiture qu’à des propriétaires d’Aston Martin.
La fleur au fusil, et sans même penser à modifier le moteur de l’iQ (1,3 litres et 98ch), Aston Martin envisage une production de 4000 exemplaires par an (après avoir accepté d’élargir sa clientèle aux non propriétaires). De quoi largement faire baisser le taux moyen d’émission de CO2 de la marque. Mais il faut croire qu’il ne suffit pas d’artifice pour séduire les clients, aussi riches soient-ils. A 38 000 euros, on attends de sa petite citadine autre chose qu’une Toyota en habit de soirée. Lancée en 2011, la Cygnet restera au catalogue jusqu’en 2013 en ne séduisant que 150 clients cette année là (pour un total d’environ 800 voitures produites). A ce niveau de prix, et avec cette image de marque, il était interdit à Aston Martin de se moquer du client. C’est pourtant ce qu’il fit et le marché le lui rendit bien.
Aston Martin écorna son image, alors que le style Aston tournait un peu en rond, et que l’argent manquait cruellement pour envisager l’avenir. Ajoutez à cela l’échec relatif de la berline Rapide, qui reste en deçà des espérances, et vous obtenez un besoin d’argent frais qui oblige aux compromissions : lâcher 37,5 % de son capital à un fond italien, Investindustrial, contre 190 millions d’euros, 5 autres pourcents à AMG (en attendant plus?) et à trouver en ce partenaire allemand un motoriste pour l’avenir, n’ayant pas les moyens de développer ses propres moteurs. Espérons qu’Aston Martin aura compris la leçon, et qu’en matière de marketing (lire aussi : Aston Martin Vantage), de style et d’innovation, la marque saura se renouveler.