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Alfa Romeo Zeta 6 : le retour de Zagato

Par - 23/05/2018

La Zeta 6, c’est un peu le début du renouveau pour Zagato, son passage aux années 80. Alfa Romeo n’en voulut pas, mais elle sera la matrice de la nouvelle tendance Z, mais remise au goût du jour, plus musclée, plus agressive, et plus dérangeante aussi. En bref, l’Alfa Romeo Zeta 6 remettra Zagato en selle, lui offrant une seconde jeunesse.

Le dessin du projet AZ6 Sperimentale de 1979, qui donnera naissance ensuite à la Zeta 6

En effet, dans les années 70, la carrosserie Zagato n’était plus que l’ombre d’elle-même. Dirigée par les deux fils du fondateur, elle faisait feu de tout bois pour tenter de survivre, notamment en produisant des voiturettes de Golf et des berlines blindées. Seul contrat « prestigieux » dans l’escarcelle, la production au compte goutte des carrosseries des Bristol 412 ne suffisait par à faire revenir le Z au centre du jeu. Il fallait se renouveler, proposer quelque chose de différent, et surtout renouer des liens avec Alfa Romeo, partenaire historique de Zagato qui l’avait pourtant un peu laissé tomber depuis quelques années.

La Delfino de Bertone, présentée en même temps que la Zeta 6

En 1979, Elio et Gianni Zagato, les deux boss, chargèrent leur designer attitré, Giuseppe Mittino, de travailler sur un projet de coupé que l’on pourrait proposer à Alfa Romeo. Ce sera le projet AZ6 Sperimentale, dont le dessin fut suffisamment convaincant pour que le projet progresse (lentement). L’idée d’un coupé plus exclusif sur la base de la GTV6 n’était pas pour déplaire à Alfa, qui finalement se décidera en 1982 à confier à Zagato l’étude d’un tel coupé. Mais dans le même temps, la firme italienne préféra ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, et commissionna aussi Bertone pour l’étude d’un grand coupé sur la base de l’Alfa 6.

Les deux propositions furent présentées au Salon de Genève en mars 1983. Celle de Bertone, signée du français Marc Deschamps (à qui l’on devra les Citroën Zabrus et XM), dénommée Alfa Romeo Delfino, se présentait sous la forme d’un coupé très géométrique joliment dessiné, mais assez sobre (trop?). Avec le recul, cette Delfino ressemble au coupé Subaru Alcyone XT lancé en 1985 et à son successeur Subaru SVX: Bertone aurait-il rentabilisé son étude en revendant le concept au constructeur japonais ?

Celle de Zagato en revanche, appelée Zeta 6, s’offrait des rondeurs en même temps sensuelles et agressives. Avec des airs de Porsche 928 selon les angles, elle inaugurait ce nouveau style Zagato, ramassé, musclé, bodybuildé, sans oublier le passé et son double bossage. Face au classicisme de la Delfino, la Zeta 6 opposait son air ramassé et explosif. La comparaison entre les deux coupés n’avait plus lieu d’être : la Zeta 6 remportait tous les suffrages.

En ce début d’année 1983, et après le succès de la Zeta 6 au Salon de Genève, les frères Zagato crurent avoir retrouvé leur bonne étoile. Alfa Romeo, impressionné par la proposition, envisagea sérieusement de la produire en série. Mais Zagato joua de malchance. Alfa Romeo n’était pas en grande forme à cette époque là, et jouait aussi sa survie, à une autre échelle. Si le projet Zeta 6 plaisait aux dirigeants du constructeur, ils avaient d’autres projets sur le feu. La firme disposait de moyens limités et s’était engagé dans une aventure qui devait lui permettre de sortir de l’ornière : l’Alfa Romeo Arna, lancée avec Nissan. Dans le même temps, l’IRI, l’organisme d’Etat propriétaire d’Alfa, cherchait à s’en défaire et tentait de présenter la plus belle mariée possible à Ford (ce sera finalement Fiat qui raflera la mise quelques années plus tard).

Après le refus d’Alfa, Zagato envisagea un temps de produire lui-même la Zeta 6 dans ses usines en surcapacité, mais renonça finalement devant les coûts et les risques d’un tel projet. Pourtant, la Zeta 6 relança les affaires du carrossier d’une manière étonnante. Victor Gauntlett, qui avait pris le contrôle de la firme Aston Martin en 1983 avait été impressionné par la proposition Zagato, et s’en était souvenu. Au moment de relancer la marque avec peu moyens, il se rappela du concept-car et proposa à Zagato de recarrosser une Aston V8 dans un style proche de celui du Zeta 6 (lire aussi : Aston Martin V8 Zagato). Ce fut d’autant plus facile que le nouvel actionnaire majoritaire entré au capital en 1984, l’armateur grec Peter Livanos, était tombé amoureux du Zeta 6, à tel point qu’il en acheta un exemplaire.

Car Zagato, pour les besoins de la compétition face à Bertone, avait construit deux prototypes. Le premier fut gardé par Alfa Romeo, tandis que le deuxième exemplaire fut donc racheté par le propriétaire de l’époque d’Aston Martin (avant qu’il ne revende à Ford). Elle restera aux mains de la famille Livanos jusqu’en 2010, avant qu’elle ne soit revendue à un collectionneur qui la possède toujours près de Londres.

Ce qui est sûr, c’est que le salon de Genève 1983 et le concept-car Zeta 6 relancèrent Zagato. L’année suivante, la carrosserie récupérait le contrat de fabrication de la Maserati Biturbo Spyder et de son dérivé coupé Maserati Karif. En 1986, c’était donc au tour d’Aston Martin s’offrir les services de Zagato, tandis qu’en 1989, Alfa Romeo renouait enfin avec son ancien partenaire et lançait l’étrange Alfa Romeo SZ. Enfin, cerise sur le gâteau, Zagato signait avec Nissan pour le dessin et la production de la fameuse Autech Stelvio.

La Lancia Hyena, lancée en 1992, est la Zagato qui ressemble le plus à la Zeta 6

D’une certaine manière donc, la Zeta 6 relança un Zagato en perte de vitesse, marquant la décennie 80 par son étrange design, dérangeant certes, mais non dénué de charme et dont le point d’orgue sera la Lancia Hyena en 1992, cette dernière étant la digne héritière de la Zeta 6. Les années 90 furent plus difficiles pour Zagato, mais cela, c’est une autre histoire.

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