Trabant 601 Tramp : la Méhari est-allemande
En ce mois de novembre 1989, j’assistais fasciné à la chute du mur de Berlin. Si pour certains aujourd’hui cet événement n’en est qu’un parmi tant d’autres de l’histoire, il mettait fin pourtant à un équilibre qui me semblait immuable et dans lequel j’avais passé toute mon enfance : l’opposition entre l’Est et l’Ouest. Aussi, lorsque je vis la chute du mur quasiment en direct à la télévision, j’avais conscience que plus rien ne serait pareil. Si l’histoire et la politique m’intéressaient au plus haut point, je n’en perdais pas mon œil averti d’amateur automobile, et dans les scènes de liesses d’un Berlin enfin unifié que nous pouvions voir au JT de Jean-Claude Bourret sur la Cinq de Berlusconi, je remarquais tout de suite cette drôle de petite voiture dans laquelle 6 ou 7 personnes s’entassaient pour passer la porte de Brandebourg.
Le monde occidentale découvrait ainsi la Trabant, cette petite voiture populaire qui faisait la fierté de la République Démocratique Allemande (RDA). En RDA, deux constructeurs automobiles existaient encore en cette fin d’année 89 : Wartburg et Sachsenring (plus connu sous le nom commercial de Trabant). Wartburg produisait une voiture plus grande que la Trabant, et mieux connue des occidentaux puisqu’elle fut exportée notamment en Belgique et en Grande Bretagne. Mais la Trabant elle restait une petite inconnue pour nombre d’européens de l’Ouest. Remarquez tout de même que les pontes du régime est-allemand, Erich Honecker en tête, se gardaient bien de rouler dans l’une ou l’autre de ces marques nationales (lire aussi : La Stasi roulait en Citroën).
La Kübel, destinée aux forces armées et gardes frontières est-allemands.
Si nous la regardions d’un air goguenard puisqu’elle semblait sortie d’un autre âge (et d’un autre monde), n’oublions pas tout de même qu’à sa sortie en 1958 (la P50) et sous son format quasi définitif à partir de 1964 (la 601), elle était relativement innovante. C’est sa carrosserie qui faisait toute la différence, car faite dans un matériau unique en son genre : le Duroplast, avantage de poids puisqu’il pèse 30 % de moins que l’acier, ne connaît pas la rouille et résiste mieux aux chocs.
La Tramp, version civile « de loisir » de la Kübel, ne sera fabriquée qu’à 496 exemplaires.Cepdendant ce n’est pas la Trabant en particulier qui m’intéresse aujourd’hui, mais un modèle totalement incongru dans la gamme est-allemande : la Trabant 601 Tramp. Oui Tramp ! Quand on sait ce que cela signifie en anglais, on peut sourire hein ! Il s’agit là d’une sorte de Trabant Cabriolet. Enfin, d’une Trabant bâchée sans porte ni toit.
En fait la Tramp n’est qu’une déclinaison « civile » de la version militaire Kübel de 1966 destinée à l’armée (de couleur kaki) et aux gardes frontières (de couleur blanc cassé). Les deux modèles sont souvent confondus, surtout qu’il y a plus de Kübel que de Tramp, et les unes se font passer pour les autres.
La Tramp elle vise un marché précis : le véhicule de loisir, ce qui, dans cette RDA toute travailleuse, prête à sourire. Vus les délais d’attente pour une Trabant 601, souvent l’achat de toute une vie, il fallait avoir une place particulière dans le système est-allemand pour s’offrir une telle voiture. C’est sans doute ce qui explique son échec commercial : lancée en 1978, elle ne sera fabriquée (en version Tramp « civile ») qu’à 496 exemplaires.
Peut-être l’export était-il visé pour faire rentrer des devises, mais seuls le Danemark et la Grèce eurent droit à quelques modèles, sans succès là non plus. Impossible en revanche de dire combien de « Kübel » furent fabriqués entre 1966 et 1991. Ce sont souvent ces modèles là que l’on retrouve dans les petites annonces, aux alentours de 5000 euros.
A l’heure où l’Ostalgie fait toujours fureur en Allemagne, pourquoi ne pas s’offrir ce petit bout de guerre froide tout en épatant les copains ! Sachez aussi que de « fausses » Trabant cabriolet existent, réalisées soit par des particuliers, soit par des petits carrossiers. Mais seules les Kübel et Tramp sont officielles !