Proton Tiara : l'AX du bout du monde !
Il n’y a pas que Bufori en Malaisie (lire : Bufori Geneva), et pour tout dire il s’agit d’un tout petit acteur par rapport aux deux grands constructeurs malais, Perodua (créé en 1993) et Proton, qui se battent chaque année pour la place de numéro un du marché. Je vous parlerais prochainement de l’histoire de Proton, mais sachez qu’il s’agit d’un constructeur créé de toute pièce en 1983 sous l’impulsion étatique. A sa création, Mitsubihi en est actionnaire à hauteur de 16 % et fournit ses véhicules en CDK (completely Knock down, des kits d’assemblage en fait).
Au début des années 90, à peine dix ans après sa création, Proton a gagné beaucoup d’argent grâce à ses Mitsu rebadgées et à une fiscalité très avantageuse pour les constructeurs nationaux. En 1994, Proton a vendu 127 000 voitures, dont 16 000 à l’export. Mais malgré ses succès, Proton est encore totalement dépendant de Mitsubishi qui rechigne à transférer sa technologie. Les dirigeants de Proton cherche donc un deuxième partenaire plus enclin au partage de technologies. Mais ils chercheront aussi à se doter de compétences techniques par le biais de la croissance externe : ils profiteront de la déconfiture de Romano Artioli et de Bugatti (lire aussi : Bugatti) pour racheter en 1996 Lotus et son expertise en ingénierie, véritable raison de son rachat, mais ça c’est une autre histoire.
C’est vers PSA que se tourne développer sa gamme hors Mitsubishi. Songeant au départ à une 306 ‘ portes, c’est finalement sur la Citroën AX que se porte l’accord signé en 1995 : PSA rentabilise alors une voiture déjà sortie de la gamme française (remplacée par la Saxo), tandis que Proton se renforce sur le marché des citadines alors totalement aux mains de son concurrent Perodua, spécialiste des petites voitures grâce à son partenariat avec le constructeur japonais Daihatsu (filiale de Toyota).
L’AX est donc restylée pour s’intégrer à la gamme Proton, et s’appellera désormais Tiara, c’est à dire diadème en français. En fait de diamant de la gamme, la Tiara sera un échec total. Trop différente du reste de la gamme très japonaise, uniquement motorisée par un petit 1,1 litres de 60 ch, elle ne rencontrera pas le succès. Surtout qu’un accord entre PSA et Proton en interdit l’exportation. Malgré un pic à plus de 14 000 exemplaires en 1997, les ventes retombent comme un soufflet, et début 1999, Proton jette l’éponge, après 30 000 exemplaires vendus là où les objectifs étaient de 20 000 exemplaires par an.
Un exemplaire de la Proton Tiara bien rangé au Conservatoire Citroën d’Aulnay sous boisIl faut dire aussi que l’arrivée de Perodua sur le marché avec des petites voitures Daihatsu a coupé l’herbe sous les pieds de Proton. En outre, la qualité de fabrication de la Tiara laissait à désirer par rapport aux modèles d’origine japonaise. Enfin, PSA ne sera pas plus coopératif que Mitsubishi en matière de transfert de technologie, usant de sa méthode habituelle à l’époque pour ses marchés exotiques : proposer des modèles anciens à la technologie dépassée (tout comme en Chine, ou Citroën vend à l’époque de vieilles ZX). Proton coupe les ponts, se rapproche à nouveau de Mitsubishi, et profite à plein de l’expertise de Lotus pour lancer une nouvelle citadine quelques années plus tard, la Saavy.
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Photos: Paul Clément-Collin, Niko Laperruque, et DR