Fiat Croma: la "Tipo 4" mal aimée !
Je n’ai jamais compris ce qui pouvait pousser un client à s’acheter une Fiat Croma ? Et pourtant, je suis sûrement mauvaise langue puisque j’adore la Saab 9000 (lire aussi : Saab 9000), saabisme oblige, mais aussi la Lancia Thema, surtout dans sa version 8.32 (lire aussi : Lancia Thema 8.32) et l’Alfa Romeo 164 (lire aussi : Alfa Romeo 164). C’est sans doute une sorte de snobisme qui me pousse à me moquer de l’une et adorant les autres, alors que ces 4 voitures sont sœurs. Car avant que Fiat ne regagne les cœurs de branchouilles parisien(ne)s avec sa nouvelle 500, la marque turinoise se traînait une image sacrément ringarde.
Comme quoi, l’image est importante, car après tout, ces 4 voitures, issues du même programme « Tipo 4 » afin d’abaisser les coûts, sont assez proches les unes des autres, partageant de nombreux composants. D’ailleurs, la Croma était fabriquée sur les mêmes chaînes de fabrication que la Lancia Thema, à Mirafiori, alors que l’Alfa 164 était montée à Arèse, et la Saab 9000 à Trolhattan ! Si l’on regarde les chiffres de plus près, on s’aperçoit d’ailleurs que la Croma arrive en 2ème position des Tipo 4, avec 438 000 exemplaires entre 1985 et 1996 : derrière la Saab 9000, mais devant ses sœurs italiennes Thema et 164 !
Bon, il est vrai qu’elle était aussi la plus « populaire » des quatre, commençant sa gamme avec un 1,6 litre carbu de 83 chevaux et un 2 litres (à carbu lui aussi) de 90 ch, sans compter des diesels 2,5 litres atmo de 75 ch et turbo de 100 ch (au lancement). Paradoxal pour un « haut de gamme » me direz-vous ? Pas tant que ça, si l’on considère qu’à l’époque, la « grande berline » était la voiture familiale par excellence, avant l’avènement des monospaces.
L’image médiocre de la Fiat Croma dans ma mémoire (et sans doute aussi dans la vôtre) s’explique aussi peut-être par sa ligne : oh, elle n’est pas moche, loin de là, et c’est tout de même l’ami Giugiaro qui s’y colla hein ! Mais elle est d’une banalité à pleurer, avec un avant de grosse Uno (ce qui n’arrange rien pour rehausser son image), et sa ligne 3 volumes (enfin 2 volumes et demi disent certains). Rien ne semble fait pour lui donner un peu d’exclusivité, et d’une certaine manière c’était fait exprès : le vrai haut de gamme du groupe, c’était la Lancia Thema (puis l’Alfa Romeo 164 lorsqu’elle sortira en 1988). La Croma devait donc capter une clientèle moins aisée, cherchant de l’espace, une certaine stature mais sans signe extérieur de richesse, et des qualités de grande routière : idéale pour les familles, mais aussi pour les VRP, la location, les taxis etc.
Fiat va d’ailleurs mettre le paquet sur l’offre diesel, en proposant à partir de 1988 un tout nouveau moteur 1,9 litre et 92 ch (94 ch à partir de 1992): première mondiale, il s’agit d’un moteur à injection directe, permettant une consommation moindre ! A ses côtés, un nouveau 2,5 litres turbo diesel apparaîtra en 1992, avec 118 chevaux à la clé. Etrangement, elle ne recevra jamais de version break (ce qui aurait du être sa vocation), laissant ce rôle à la Thema. En 1991, elle recevra un petit coup de bistouri pour rajeunir un peu sa silhouette, abandonnant son regard de Uno pour recevoir celui d’une Tempra ou presque (lire aussi : Fiat Tempra Coupé « do Brasil »).
Bon, avec tous ces moteurs « d’entrée de gamme », y’avait-il de la place pour un peu de sport avec cette Croma ? N’exagérons rien, mais Fiat proposa tout de même quelques versions aux motorisations plus péchues : un 2 litres injection de 120 chevaux et le même moteur avec un turbo offrant 155 ch (Turbo ie). Cette dernière version est la plus puissante des Croma importées en France, et peut-être une intéressante alternative car la Croma n’est pas excessivement lourde, avec un poids oscillant entre 1100 et 1200 kg selon les versions.
A partir de 91, la Croma reçut un lifting lui donnant un regard de Tempra plutôt que de Uno !Les italiens eurent plus de chance : à partir de 1993, la Croma reçut un V6 Busso de 2,5 litres et 162 chevaux. Mais jamais cette version ne traversa les Alpes : Fiat n’y voyait pas vraiment l’intérêt, le marché étant très réduit et la voiture en fin de vie (elle quittera les chaînes de fabrication en 1996). D’ailleurs, la Croma connut l’essentiel de son succès en Italie, jouant les figurantes partout ailleurs.
Après sa disparition, Fiat se garda de relancer une grande berline, par manque de moyen (une certitude) ou par sagesse (ça c’est moins sûr). Une descendance verra pourtant le jour en 2005, sorte d’hybride entre une Vel Satis (lire aussi: Renault Vel Satis) et une Lancia Thésis (lire aussi: Lancia Thésis), mais sans succès… Depuis Fiat se la joue monoculturel, avec une 500 déclinée à l’infini, et des Chrysler rebadgées. La nouvelle Alfa Giulia laisse entrevoir un peu d’espoir, mais à force d’être retardée, on va finir par croire qu’il s’agit de poudre aux yeux.
La phase 2 eut droit à une version V6, un Busso, qu’Agnelli affectionnait !Que dire aujourd’hui d’une telle voiture ? J’aurai tendance à vous dire de préférer une Saab 9000 (évidemment) ou une Thema (en Turbo, ou PRV ou bien idéalement V8 Ferrari), voire une 164 (en Quadrifoglio surtout)… Mais vu le coût extrêmement bas d’une Croma, les versions Turbo ie ou (encore mieux) V6 si vous arrivez à en trouver une en Italie pourraient être des daily voire des sleepers intéressants non ? A vous de voir !