Dino : la marque du fils
L’histoire de la marque italienne Dino est un poil compliquée. En fait, quand on parle de Dino, il est important de préciser si l’on parle d’Alfredo « Dino » Ferrari, le fils d’Enzo, du moteur V6 créé (en partie) par celui-ci, du modèle Fiat qui en fut équipé, ou bien de la marque sœur de Ferrari (1965-1976). Vous voyez, tout cela n’est pas simple.
L’histoire commence comme souvent par un drame. Alfredo Ferrari, surnommé Dino, meurt prématurément en 1956 à l’âge de 24 ans, atteint d’une maladie génétique appelée myopathie de Duchenne (déficit de la dystrophine entraînant la dégénérescence des fibres musculaires, et notamment le muscle cardiaque). Dino, ingénieur de formation, avait créé avant sa mort un moteur V6 1,5 litres que l’ingénieur Vittorio Jano améliora ensuite (portant sa cylindrée à 2,4 litres) pour motoriser la Ferrari Dino 246 qui remporta le championnat du monde de Formule 1 en 1958. Ce moteur « mythique » V6 sera la marque de fabrique Dino.
Les 206 et 246 GT (ou GTS en Targa) ont une ligne à couper le souffle signée Pininfarina.Dans la deuxième partie des années 60, Ferrari veut s’engager en Formule 2, mais la réglementation impose que le moteur utilisé lors des courses doit équiper des véhicules produits à au moins 500 exemplaires, soit à peine moins que les capacités annuelles de Ferrari à l’époque. L’idée de diffuser largement un véhicule équipé du V6 Dino doit donc se faire en collaboration avec un grand constructeur. Si les négociations commencent avec Ford (qui lorgne sur Ferrari), c’est finalement avec le constructeur italien Fiat que l’affaire se fait : Fiat produira la Fiat Dino équipée du fameux V6 à partir de 1967, assurant l’homologation du moteur en F2. Elle sera produite jusqu’en 1972 à 7651 exemplaires.
La Fiat Dino Coupé permet d’accéder au moteur Ferrari à moindre coût.De son côté, Ferrari compte bien utiliser ce moteur pour son propre compte. Pour lui une Ferrari doit être équipée d’un V12 installé à l’avant, il n’est donc pas question de commercialiser le V6 sous cette marque. Il créera donc, en hommage à son fils, la marque Dino, et présentera en 1967 la Dino 206 GT. Pour faire la différence avec les modèles Fiat, la Dino recevra son V6 en position centrale arrière. C’est aussi un objectif clair affiché à tous : aller tailler des croupières à la sportive qui monte, la Porsche 911. La production ne commencera qu’en 1968, chez Scagliatti.
La Fiat Dino Spider, très élégante et différente du coupé.La 206 GT (V6 2 litres) puis la 246 GT (2,4 litres à partir de 1969) sont dessinées par Sergio Pininfarina (lui aussi « fils de ») et leurs carrosseries sont à couper le souffle. Pour moi, il s’agit de l’un des plus beaux modèles « Ferrari » : peut-être ais-je été influencé par Dany Wilde qui me faisait rêver tout autant que Brett Sinclair dans Amicalement vôtre ? Toujours est-il qu’elle seront produite en version coupé (GT) ou Targa (GTS) jusqu’en 1974, à près de 4000 exemplaires.
La Dino 246 GT sera la monture de Dany Wilde, en opposition au très britih Brett Sinclair et son Aston DBS.En 1974, c’est une toute autre Dino qui apparaît. La 308 GT4 n’a rien à voir avec les 206 et 246 GT puisqu’elle est équipée d’un moteur V8, une première pour Ferrari. Surtout, elle est la seule Ferrari (puisqu’elle en portera le nom à partir de 1976) à être dessinée par Bertone. Là où les 206 et 246 avaient des courbes très féminines, la 308 GT4 propose une ligne toute en coins. Née Dino en 1974, elle deviendra Ferrari en 1976, et tirera sa révérence en 1980 après 2826 exemplaires produits. Si Enzo Ferrari fait disparaître la marque Dino pour l’intégrer à Ferrari, c’est qu’il s’aperçoit qu’il est difficile pour un si petit constructeur de faire vivre deux marques. Surtout, il a su évoluer intellectuellement, et n’est plus si à cheval si ses principes techniques : ainsi acceptera-t-il cette architecture V8 Central arrière dans sa gamme. Ce sont d’ailleurs les modèles V8 qui assureront désormais l’essentiel de sa production.
La Dino 308 GT4, qui deviendra Ferrari en 1976, est signée quand à elle BertoneAinsi la marque Dino disparaîtra-t-elle ! Pendant longtemps, les Dino furent un peu snobées par les puristes, les considérant comme des sous-Ferrari bien moins prestigieuses. Mais depuis quelques temps, on les regarde d’un autre œil. Surtout les 206 et 246 à la ligne magistrale. La 308, elle, séduit par son originalité dans la gamme et par son statut de première V8. Bref, les modèles Dino sont à revisiter. Sans parler des coupés et Cabriolets Fia Dino qui permettent de rouler avec un moteur Ferrari pour un coût encore abordable.