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Borgward Isabella : l'inspiratrice !

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 07/04/2016

Dans les années 50, la construction automobile allemande n’a pas encore pris l’ascendant qu’on connaît aujourd’hui. Si Mercedes a d’ores et déjà retrouvé le rang qui était le sien avant-guerre, BMW n’a pas encore l’aura qu’on lui connaît aujourd’hui. Quand à Audi, il faudra attendre la fin des années 60 pour la voir renaître de ses cendres. En revanche, Opel fait figure de valeur sûre avec sa berline Kapitän. Au milieu de ces constructeurs survit encore une marque relativement prestigieuse : Borgward.

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Née de la fusion des marques Hansa, Lloyd et Goliath, la marque prend finalement au cours des années 50 le nom de Borgward pour ses modèles les plus prestigieux, pour ensuite recouvrir toutes les gammes. Pour remplacer la Hansa 1800, Carl Borgward va proposer une voiture moderne à traction et carrosserie ponton et monocoque, anticipant le marché de la voiture de taille moyenne mais positionnée haut de gamme qui fera le bonheur de BMW avec sa 1500 (lire aussi : BMW 1500): la Hansa 1500, surnommée en interne « Isabella ».

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Dotée d’un 4 cylindres de 1,5 litre (comme son nom le laissait supposer) développant 60 chevaux, la 1500 n’est pas une berline 4 portes, mais 2 portes. Un choix étonnant à l’époque, mais pas si idiot que cela, comme le prouvera BMW. Lancée en 1954, elle rencontrera un certain succès la première année, prenant définitivement le nom officiel d’Isabella au bout de quelques mois (à l’époque, le marketing se fait un peu au pif, et on n’hésite pas à rebaptiser une voiture peu de temps après son lancement) ! L’Isabella se positionne en termes de tarif entre l’Opel Kapitän et la Mercedes 180.

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En 1955, une version « Kombi » à 3 portes complètera la gamme pour le côté « utilitaire » (avec glaces ou tôlé), tandis qu’un superbe cabriolet fait son apparition ! Ce cabriolet (construit chez Karl Deutsch à Cologne), particulièrement sexy, offre en outre un nouveau moteur 1500, le TS, développant cette fois 75 chevaux ! Malgré la beauté de sa ligne, l’Isabella TS Cabriolet se vendra au compte goutte car à l’époque, les coûts de transformations et de rigidification de l’ensemble sont prohibitifs. En terme d’image, l’Isabella Cab’ est en revanche une réussite telle que Carl Borgward va décider d’en produire une version coupé, moins chère forcément !

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D’autant que les ventes de berlines/Kombi, après les premiers succès, déclinent dangereusement. Il est temps de renverser la vapeur et de relancer la gamme avec une nouveauté moins élitiste que le coûteux cabriolet. C’est ainsi que sort en 1957 l’Isabella Coupé, décidément l’une des plus belles voitures de son temps. Sa ligne élancée, ses rondeurs féminines, tout en gardant un look relativement sportif, lui donnent une classe folle, encore aujourd’hui.

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Malheureusement, il ne suffit pas d’un coupé, aussi beau soit-il, pour reprendre la main dans un marché ultra-concurrentiel. Comme Panhard en France, les moyens manquent et les difficultés commencent à se faire ressentir. Pour Borgward, il s’agit surtout de difficultés structurelles : sous-capitalisée, elle a du mal à faire face aux investissements que demandent l’industrie automobile déjà à l’époque. Par manque de temps et de moyen, la mise au point de l’Isabella se fera en cours de commercialisation, rendant les premiers clients « cobayes » de la marque. Le lancement de la fabuleuse P100 à 6 cylindres, prévu pour 1961, monopolise les capitaux disponibles, laissant l’Isabella sans évolutions majeures pendant de longues années.

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Surtout, Carl Borgward est l’homme à abattre pour laisser le champs libre à des entreprises plus structurée. Mercedes, déjà réputée, BMW qui renaît de ses cendres grâce à l’argent de la famille Quandt, Opel soutenu par son puissant actionnaire américain, et Volkswagen qui commence à imaginer sortir de sa culture de la Coccinelle, tous ont intérêt à voir disparaître ce concurrent inventif mais désargenté. L’ambitieuse P100 conduira Borgward à sa perte, tandis que ses créanciers ne lui laisseront aucune chance, refusant tout étalement de la dette. En 1962, Borgward disparaît après seulement 2267 exemplaires de la grande P100, mais 202 862 exemplaires de l’Isabella, véritable best-seller de la marque !

La Borgward P100 (au dessus), l'Isabella Coupé et le nouveau BX7 (en dessous)La Borgward P100 (au dessus), l’Isabella Coupé et le nouveau BX7 (en dessous)

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Carl Borgward ne se remettra pas de cette faillite retentissante, décédant en 1963 après avoir redevendu les droits de la P100 à une entreprise Mexicaine, la FANASA, qui va produire la Borgward 230 aux alentours de Mexico (lire aussi : Borgward 230). L’Isabella, elle, née en 1954, est trop vieille pour intéresser qui que ce soit, même dans sa fabuleuse version coupé. Elle disparaît donc en même temps que la marque… qui a annoncé son retour au Salon de Francfort 2015 avec un SUV très classique et sans rapport avec l’histoire de Borgward (lire aussi : Borgward BX7).


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Borgward 230 : l'aventure mexicaine
Mon intérêt pour Borgward, célèbre marque allemande aujourd’hui disparue, est revenu en deux temps cet été. Une vieille amie de ma mère, en villégiature dans la maison familiale, s’est tout d’abord piquée de me raconter les souvenirs d’automobiles de son père : deux modèles restaient vivaces à ses yeux, la Renault Colorale Prairie (lire aussi : Renault Colorale), et la Borgward P100 dont elle gardait un souvenir ému ! Quelques jours après, j’apprenais la « renaissance » de la marque allemande disparue depuis 1961 et sa retentissante faillite.
PAUL CLÉMENT-COLLIN - 11/09/2015
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