BMW Z3 : à la poursuite de la MX5
En 1989, Mazda jetait un pavé dans la mare en lançant l’adorable MX5, recréant un marché abandonné par les anglais depuis quelques années, celui du petit roadster “so british” : branle-bas de combat chez les européens, furieux sans doute d’avoir laissé passer le coche. Le groupe Rover lancera provisoirement la RV8 avant de dégainer l’artillerie lourde avec la MG F et son moteur central. Fiat préférera jouer la carte de la Dolce Vita avec la Barchetta, tandis qu’Alfa Romeo jouait sur le style avec son Spider 916. Chez Mercedes on optera pour le SLK à toit rétractable. Du côté de Munich, BMW se mordait les doigts d’avoir raté l’occasion : en 1987, la marque à l’hélice avait présenté la Z1 dont l’esprit se rapprochait de la MX5… L’esprit seulement, car elle était plus lourde, plus moderniste, plus compliquée dans son approche et plus chère : une voiture forcément réservée à des initiés. Dès lors, le design Motorsport d’abord puis les forces vives de l’entreprise s’attachèrent à sortir une vraie concurrente, commercialisée en 1995 : la Z3.
Personne n’avait vraiment vu venir le petit roadster japonais. Sa portée universelle avait échappé aux constructeurs européens, englués dans une vision très centrée de la “petite GTI”, mais aussi aux américains, se concentrant sur les grands coupés 4 places ou leurs versions cabriolets destinés à cruiser en Californie. Or, ces deux marchés furent de grands consommateurs de petits roadsters MG, Triumph, Fiat, ou Alfa dans les années 50 puis 60. La déferlante Golf GTI dans les années 70 (accompagnée par la 205 GTI dans les 80’s) et l’abandon ou le délaissement du marché américain par bon nombre d’européens à cause des nouvelles normes de 1974 conduisirent à leurs disparitions…
La BMW Z1 Coupé Concept de 1991 préfigurait, quand à elle, la poupe du Coupé Z3 de 1999.Or, depuis les années 70, les japonais avaient compris que leur survie passerait par la création de produits universels, vendables aussi bien au Japon qu’en Europe ou aux USA. Dès lors, un marché de niche comme le roadster pouvait être mondial à condition de bien le positionner et donc, in fine, rentable. Voilà ce que démontra en 1989 la petite firme Mazda, créant un mythe ex nihilo, encore vivace aujourd’hui. En Allemagne, on comprend tout de suite que la Z1, finalement un peu lourde, sans accroche nostalgique et de toute façon limitée en volume, ne pourrait pas lutter. La division Motorsport qui vient de se doter d’un bureau de design, se voit confier la mission d’imaginer un “roadster à l’hélice”. Il en résultera un “Ur-roadster” comme on le surnomme, présenté discrètement en 1990. Si stylistiquement il reste très peu abouti, presque fait à la va-vite, les fondamentaux sont là. En 1991, le concept Z1 Coupé Concept qui mixe le style de la Z1 avec quelques détails du futur Z3, notamment sa version Coupé.
La direction de la marque semble de plus en plus convaincue de la pertinence du choix, d’autant que la concurrence, notamment anglaise et italienne, semble préparer la riposte. En outre, le département marketing a repéré le succès de la MX5 aux Etats-Unis, un marché sur lequel BMW veut se renforcer. Le projet qui mènera au Z3 accompagne donc un plan de développement plus large, avec la construction d’une usine aux Etats-Unis (Spartanburg, où Michelin en possède aussi une) prévue pour la production du futur roadster mais aussi de la BMW Série 3 E36 (qui sera ensuite remplacée sur les chaînes par le X5 en 2000).
L’objectif est clair : “conquest the USA first”. Conscients que ni le Ur-Roadster, ni le Z1 Coupé Concept ne séduiront tels quels les clients américains ou européens, BMW va revoir sa copie en confiant le style de la voiture au japonais Joji Nagashima. Celui-ci va exacerber et arrondir en même temps le nouveau style inauguré par la E36, réussissant à faire du néo-rétro à l’envers. Pour la base, il fallait un empattement raccourci : on choisira donc celle de l’E36/5, la Série 3 Compact, hybride entre train avant de E36 et train arrière de E30. Cette solution permettra en outre de faire baisser le prix, du moins sur le marché américain. Le projet prend alors le nom de E36/7 (plus tard E36/8 pour le coupé).
Avec le Z3, qui récupère le Z inauguré par le Z1 (qui à l’époque signifiait Zufunkt – futur en allemand – mais qui, avec le Z3 puis Z8, finira par désigner les roadsters chez BMW) la cible est claire : la MX5 qui se contente de petits moteurs (avec un coeur de marché à 115 chevaux. Pour cela, BMW va répliquer avec une offre correspondante : en 1995, la Z3 sort avec un 4 cylindres 1.8 de 116 chevaux puis rapidement un 1.9 de 140 chevaux. Evidemment, s’agissant d’une “béhème”, la presse internationale n’hésite pas à dire que le nouveau roadster est sous-motorisé.
Dès 1997, deux 6 en ligne viendront muscler l’offre allemande, avec un 2.8 litres de 192 chevaux et un 3.2 siglé du M porté de son côté à 321 chevaux (la version US, elle, se contentera au départ d’un 3.2 dégonflé à 243 chevaux). La mayonnaise commence à prendre, d’autant que les objectifs du constructeurs restaient mesurés (100 000 exemplaires au total).
Tout comme la MX5, l’essentiel n’était pourtant pas caché sous le moteur, mais plutôt l’excellent équilibre entre le plaisir de conduire, la vivacité, des moteurs suffisants, un poids léger et un look d’enfer. Surtout que la petite béhème fut révélée pour la première fois en 1995 avec James Bond à son volant dans l’excellent Goldeneye avec pour la première fois Pierce Brosnan dans le rôle titre (un placement produit payé au prix fort auprès du producteur Eon). Une série spéciale, tirée à 100 exemplaires, sera même produite peu après (avec notamment des sigles 007 sur la moquette et la même couleur bleue ciel).
En 1999, la gamme s’élargit avec une drôle de version “coupé”. En fait, une sorte de shooting brake fortement inspiré pour sa partie arrière du concept Z1 Coupé de 1991. Les motorisations évoluent au fil du temps, avec l’abandon des 1.8 et 1.9 des débuts pour un seul 1.9 de 118 chevaux en 1999. L’offre 6 cylindres s’élargit avec un 2 litres de 150 chevaux puis un 2.2 de 170 chevaux. Un 2.3 sera brièvement disponible en 1998/1999 avec 173 puis 170 chevaux, puis un 2.5 de 186 chevaux jusqu’à la fin de la carrière du Z3. Le 2.8 cèdera sa place en 2000 à un 3 litres de 231 chevaux. Quand au Z3M, il gagnera une poignée de canassons (325 ch) et de façon plus spectaculaire aux USA (320 ch au lieu de 243).
La généalogies des Z depuis la Z1 jusqu’à la nouvelles Z4 (produite en partenariat avec Toyota).Au total, 297 088 exemplaires du Z3 (dont seulement 17 815 coupés) seront produits entre 1995 et 2002, confirmant l’existence du marché relancé par Mazda. BMW décidera donc à lancer un successeur appelé Z4 et dessiné par le controversé Chris Bangle. Aujourd’hui, on trouve des Z3 à tous les prix et dans tous les états, accessibles en entrée de gamme et particulièrement chers et recherchés dans des configurations rares, comme la Z3M Coupé (6 291 ex). Selon LVA, une Z3 1.8 commence à 7 000 euros, tandis que la Z3 M Coupé grimpe à 42 000 euros. Entre les deux, il existe une telle palette de modèles que chacun pourra certainement y trouver son bonheur.