Top Gear saison 3 : entretien avec le Tone
Ce soir, la nouvelle saison de Top Gear France débarque sur RMC Découverte. Après deux saisons en progression (à mon sens) et un Road trip au Japon d’assez bonne facture (même si tout est toujours perfectible, la 3ème saison s’annonce plutôt intéressante. Pourtant, avant même sa diffusion, on voit fleurir les éternels commentaires sur cette version française jugée parfois trop proche (pâle copie disent certains) de la version anglaise, ou alors l’inverse (pas assez proche disent les autres), trop orientée divertissement et pas assez bagnole, ou bien justement pas aussi drôle qu’une telle émission devrait l’être, et j’en passe.
N’ayant jamais dit que j’adhérai à tout, et parfois même critiqué l’émission, force est de reconnaître les progrès du trio Tone/Jouanny/Lellouche. Je reconnais aussi qu’en fait, si Top Gear France me laisse parfois sur ma faim, l’émission a le mérite d’exister, et croyez-le ou non, je la regarde plus que les éternels Auto-Moto et Turbo, voire Direct Auto (de meilleure facture à mon sens que les deux premières).
Bref, comme à chaque fois, il me paraît opportun de laisser la parole à l’un des membres de l’équipe TG France, le Tone. Comme pour la saison 1, il s’est prêté au jeu de la rencontre (lire aussi : quand Tone rencontre Boîtier Rouge). Il faut dire que depuis 3 ans, on commence à se connaître lui et moi, et qu’une certaine confiance s’est instaurée entre nous deux. Et j’avoue qu’il me tient à cœur de faire comprendre aux « haterz » quel homme il peut être, sa culture automobile, et ses capacités de pilote (oui oui, vous verrez). Plutôt que de refaire le principe des questions réponses, voici plutôt le récit d’une matinée à discuter de tout et de rien ensemble, comme cela nous arrive à chaque fois que l’on se croise.
Après avoir commandé nos cafés en terrasse malgré le froid de l’hiver, Tone donne le ton en se moquant de moi : « alors, t’es pas parti en Croatie ? » … Non je ne suis pas parti, et j’enrage, mais avec lui, il n’y a jamais rien de méchant. Mi vexé, mi amusé, j’enchaîne sur ses détracteurs, les critiques bonnes ou mauvaises. « Dis-toi bien que j’ai du mal, encore aujourd’hui, à me regarder. Rappelle toi pour la saison 1, lorsque nous avions dîné ensemble en matant le 2ème épisode. Je déconnais tout le temps, ça me permettait de faire diversion ». Pas con. Je pousse le bouchon un peu plus loin et insiste sur ces commentaires sur Facebook. « Au début, j’y prêtais attention, ça me vexait, me touchait, m’embêtait » me répond-il. « Aujourd’hui, j’ai appris à ne plus m’offusquer, on ne peut pas plaire à tout le monde ». Pas faux, j’en sais quelque chose.
Lorsque j’évoque les deux premières saisons, et l’impression d’un jeu d’acteurs un peu forcé, il me reprend : « attends, n’oublie pas que je suis à la base journaliste, dessinateur, et musicien, pas acteur ni présentateur télé. Je ne réalise que maintenant quelle puissance a la télévision, et je suis parfois étonné d’être reconnu ». J’avoue que, l’ayant rencontré « en vrai » avant même de l’avoir vu à la téloche, j’ai du mal moi aussi à me dire que celui que je fréquente souvent va se poser une fois de plus dans le petit écran de mon salon pendant quelques mercredis. Il poursuit : « Philippe, qui lui est acteur, nous a beaucoup aidé, Bruce et moi, et cela se voit au fil des émissions, on s’améliore, on prend plus de plaisir, et surtout on se rebelle un peu en proposant à la production des choses moins écrites, plus libres, et plus personnelles. Mais tu sais bien qu’une licence telle que Top Gear est assez stricte, il faut respecter un cahier des charges, et un concept bien rôdé. Regarde le road trip au Japon, on était content que la chaîne l’accepte, et vraiment, on s’est marré à le faire, mais comme toute première, on n’est pas satisfaits, le prochain sera encore mieux. Là finalement on a mis de côté trop de choses sympas. Si tu prends la saison 3, pareil, on a tenté d’améliorer les choses, avec plus de culture. Et notre trio fonctionne, on est des vrais potes dans la vie ».
Je ne peux que confirmer, ayant pu voir les 3 ensemble lors d’un petit déjeuner. Ca vanne, ça chambre, ça titille… Et pendant qu’on boit notre café, le téléphone vibre : un SMS de Philippe. Tone en profite : « tiens, regarde Bruce. Tu m’as suivi un peu pendant le championnat Caterham. Et bien lui, en pleine nuit à Los Angeles, il m’a coaché, regardant et analysant la vidéo que je lui avais envoyé. Il m’a conseillé virage par virage, ligne droite après ligne droite, et sur chaque dépassement que j’avais fait. Crois-le si tu veux, mais j’ai beaucoup progressé, et je n’ai pas été ridicule, loin de là, finissant souvent sur le podium (en fait, à chaque course). Il m’est même arrivé de faire les meilleurs tours en course. Mais bon, moi, ce qui m’amuse dans la course, c’est le jeu. Si je pars dernier sur la grille, je suis sur-motivé et je dépasse tout le monde à un rythme effréné mais si je suis en tête, je roule à un train de sénateur. En fait, j’aime le challenge, et l’adrénaline du dépassement, plutôt que la gagne pure ».
Il faut croire que le Tone ne se débrouille pas si mal en pilotage, n’en déplaise à certain, puisque l’année prochaine, Caterham et GQ non seulement lui font encore confiance, mais le font passer dans la catégorie supérieure. Tone l’avoue : « mon objectif, c’est d’un jour pouvoir courir les 24 heures du Mans. C’est un rêve, certes, mais quel pied ! » Pour le reste, Tone reste humble, avouant que la course « c’est apprendre à piloter, sans aide électronique, et ressentir la bagnole. C’est une belle école, et le circuit t’apprend l’anticipation ».
Bruce d’ailleurs continue à le coacher, et parfois participe ! Il était le coéquipier du Tone pour la dernière course, en relais pour de l’endurance. Et l’animal de me regarder avec fierté en disant : « tu te rends, compte, j’étais qu’à une seule seconde de lui au tour, pas si mal pour un apprenti pilote » ! Mais notre discussion s’égare, et je recentre tant bien que mal sur Top Gear. «Tu sais, cette saison 3, on s’est vraiment poilé, mais surtout, c’était très physique : saut en parachute, cascades… Et si Bruce est mon coach en course, Philippe est mon coach en jeu, et n’hésite pas à me donner ses trucs d’acteur, comme ne pas avoir peur d’oublier son texte (ça revient tout seul si tu n’as pas peur). Pour cette saison, on commence vraiment à se lâcher. On se vanne mais c’est jamais méchant ».
Le Tone a de l’ambition. Lui qui a déjà tourné la saison 3 se projette déjà dans les saisons 4 et 5 : « pour les prochaines, on va encore plus s’investir dans l’éditorial, et bosser plus avec la prod’ ». J’en profite pour parler du trio anglais, désormais aux manettes de « The Grand Tour ». Le Tone l’avoue : « c’est super bien fait, y’a du budget, et regarde cette première séquence : ça m’a fait pleurer ». Mais pour lui, cette première émission n’est qu’un « teaser, le meilleur reste à venir ».
Inévitablement, notre conversation dérive à nouveau… et cette fois-ci, de quoi croyez-vous qu’on a parlé ? De bagnoles évidemment. Pour Tone, « la voiture la plus Top Gear, c’est la McLaren F1 ». « Bah ouais, tu comprends, on peut être tous les trois dedans, avec Bruce au volant. Et puis cette voiture, elle est moderne encore aujourd’hui, et très british en même temps ». Je suis obligé d’avouer que le choix de cette voiture est un bon choix. Je saute sur l’occasion pour lui demander son top4 bagnoles : « pour la 1ère, je reste chez McLaren, mais avec la 570S. Quel pied cette voiture ! On ressent tout, c’est une vraie supercar, elle provoque un peu, mais en toute discrétion, et surtout, elle est utilisable au quotidien. En 2ème, je mettrai la Rolls Royce Dawn, parce que j’adore Rolls, et que c’est vraiment une voiture pour voyager, un peu hors du temps et du monde. En 3ème, je place la Ford Focus RS, pour des raisons que je t’explique pas, tu l’as testée ». Il en reste une dernière, et là, le Tone m’avoue avoir vraiment aimé le Volvo XC90 en version T8 : « de quoi presque aimer les SUV ».
Inévitablement, il revient pourtant à ses premières amours, moins modernes, et sa fameuse E30 325iS. « Depuis la dernière fois, tu verras, elle a repris des couleurs, grâce au carrossier/mécano de l’émission, qui l’a rendue belle comme à sa sortie de concession. C’est ma seule voiture, et tu sais que j’aime aussi les youngtimers. D’ailleurs, tu verras dans la saison 3 une Peugeot 309 GTI 8 soupapes face à sa descendante 308 GTI ». Comme on est à Paris, j’en profite pour lui demander comment il fait avec son ancienne : « tu sais moi, je roule à vélo à Paris, et j’adore ça. Parfois, au feu rouge, je parle mécanique vélo, ou bien je conseille un p’tit jeune qui a mal réglé sa selle, ou son guidon. D’ailleurs, je m’aperçois que beaucoup de jeunes de 8-10 ans m’apprécient, et ce public là m’intéresse plus que les détracteurs jamais content dont tu parlais au début ». Je ne peux que confirmer, ayant rencontré deux petits fans lors d’une virée en Vendée. J’en profite pour lui dire que je leur avais promis de les faire venir à l’enregistrement de l’émission mais que j’ai laissé passé le timing malgré l’accord de la production : « fais les venir plutôt sur une de mes courses en Caterham, pourquoi pas au Mans, je suis beaucoup plus disponible, et j’aime bien cet esprit d’échange, on passera du temps ensemble » !
Cette dernière phrase vous permettra de comprendre qui est vraiment le Tone. On peut ne pas aimer Top Gear France, et je sais combien il est facile de pester, critiquer, ou s’énerver devant sa télé ou son ordi, mais depuis 3 ans que je le fréquente, je ne vois que gentillesse, humour, passion des bagnoles, réelle culture automobile, et une humilité qui commence à transparaître : « tu me connais, dans la vraie vie je suis comme ça, je surjoue toujours un peu, mais par timidité ».
Photos: RMC Découverte, Thomas de Saulieu et DR