Safrane Biturbo : la plus rare des Renault
Après 8 ans de production et 780 000 exemplaires fabriqués, la R25 cède sa place en 1992 à la Safrane en haut de la gamme Renault et sur les chaînes de fabrication de Sandouville (lire aussi : Safrane). Mais pour affronter la concurrence allemande, et remplacer dans les cœurs la 25 V6 Turbo (lire aussi: Renault 25 V6 Turbo), Renault doit proposer mieux que le V6 PRV 12 soupapes 3 litres de 170ch. La marque au losange est obsédée par l’Allemagne, sa qualité de fabrication et son marché depuis quelques années, et utilise souvent des sous-traitants allemands pour réaliser certaines de ses petites séries (R11 Zender, lire aussi Renault 11 Zender, Renault 19 Cabriolet fabriqué chez Karman, lire aussi Renault 19 Cabriolet). C’est donc tout naturellement qu’elle se tourne vers des prestataires allemands pour réaliser ce qui deviendra l’étendard de la marque : la Biturbo.
Ainsi, c’est Irmscher qui s’occupera des modifications de carrosserie et de l’assemblage, et Hartge (réputé pour ses préparations sur moteurs BMW) qui s’occupera du moteur, en partant de celui de l’Alpine A610 (un V6 3 litres poussé à 250ch). Cette solution devait être (selon les devis) moins chère qu’une solution interne, mais finalement les coûts de développement de la voiture explosèrent. Il fallut près de deux ans pour mettre au point la voiture, avec quelques difficultés chez Hartge, entraînant aussi la participation du Berex, le bureau d’étude d’Alpine pour régler le moteur. La puissance obtenu au départ était de 280 ch après l’adjonction de deux turbos, mais le moteur fut dégonflé à 268ch, la boîte de vitesse d’origine Renault n’étant pas capable d’encaisser plus même après avoir été renforcée. Difficile aussi de faire passer une telle puissance sur les seules roues avant. La Biturbo reçut donc la transmission intégrale de la Safrane V6i Quadra (4 roues motrices permanentes).
Ainsi motorisée, et grâce à ses 4 roues motrices, la Safrane Biturbo avait une tenue de route royale dans un confort incroyable. Elle était proposée en deux finitions, RXE ou Baccara (et là cela devient le grand luxe), mais à un prix incroyable de 414 000 à 452 000 F, soit plus chère que ses concurrentes allemandes dotées de V8. Commercialisée de 1994 à 1996, seuls 806 exemplaires trouveront preneurs. Les clients fortunés préféraient souvent s’orienter vers des marques plus valorisantes. En outre, la Safrane, avec ses boucliers, sa sortie d’échappement et ses jantes 17 pouces, ne fait pas dans la discrétion, ce qui peut être pénalisant face à une telle clientèle. Renault s’attendait à de faibles volumes, ce qui avait motivé le recours à Hartge et Irmscher, mais pas à ce point là.
En 1994, Heuliez réalisa une version break de la Biturbo, baptisée Long Cours, qui n’était qu’un exercice de style, n’entrant jamais en production. Dommage car sa ligne était particulièrement réussie. Conservée dans la collection Heuliez, elle fût vendue lors de la faillite du constructeur des Deux-Sèvres (lire aussi: Renault Safrane Long Cours).
Ce record de vente fait de la Safrane la plus rare et la plus exclusive des Renault, tout en étant aussi la plus puissante et la plus rapide. On en trouve aujourd’hui entre 8 et 15 000 euros selon l’état et le kilométrage, mais sa rareté en fait un collector, et le prix des pièces peut vite la transformer en gouffre financier.
Une tentative de Laguna Biturbo, sur le même principe, fut proposé à Renault sans que la marque ne donne suite: avoir qu’une griffez « Biturbo » aurait eu de la gueule (lire aussi: Renault Laguna Biturbo).