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Peugeot 405 : best-seller à tout faire

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 16/07/2020

Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. L’automobile en ce temps-là n’est pas encore dominée par de lourds SUV. Dans les années 80, tout juste voit-on apparaître une nouvelle catégorie, le monospace, emmenée en France par l’étonnant Renault Espace, mais la reine de la route reste encore et toujours la berline. Pour Peugeot, après avoir redressé la tête en lançant en 1983 une brillante citadine, la 205, il est temps de renouveler son offre sur ce segment. Pour remplacer la vieillissante 305, la marque au lion va surfer sur sa nouvelle image et frapper à nouveau un grand coup en présentant la Peugeot 405 qui deviendra un best-seller international.

Revenons en 1982 : cette année-là, PSA est encore en plein marasme après sa fusion catastrophique avec Chrysler Europe suivie d’une grave crise économique provoquée par le choc pétrolier de 1979. La nouvelle marque Talbot, créée à l’occasion, peine à atteindre les chiffres de vente du Simca d’avant fusion, les réseaux commerciaux doublonnent et se concurrencent : l’éphémère leader européen s’avère un colosse aux pieds d’argile. Heureusement, tout n’est pas noir et l’horizon s’éclaircit. C’est Citroën qui ouvre les hostilités en lançant une très réussie BX (qui contribuera fortement à la relance du groupe) tandis que chez Peugeot, on s’apprête à dévoiler le projet M24 sous le nom de 205. Mais à Sochaux, on envisage déjà la suite avec le projet D60.

Un ambitieux projet D60

Ce projet est ambitieux : il s’agit de remplacer en partie la 305, qui commence sérieusement à dater, mais aussi la 505, ultime propulsion de la marque. Entre la D60 et la 205 viendra se greffer une 309 sur le créneau des berlines compactes. Avec la D60, Peugeot compte acter son passage total à la traction tout en proposant une berline dynamique et élégante apte à conquérir le coeur des Français mais aussi hors des frontières. Si le design réussi de la 205 est issu du centre de style interne (sous la houlette de Gérard Welter, mais inspiré par un premier dessin de Gérard Godfroy, cofondateur de Venturi), celui de la D60, future 405, est confié à l’allié italien de toujours, Pininfarina.

Si la BX (signée Bertone) propose un style très carré, sa cousine 405, elle, joue la carte du dynamisme et de la fluidité. Le dessin de Pininfarina récupère à son compte la tendance stylistique de la 205, c’est pour en tirer toute la quintessence. Un style dans l’air du temps puisque l’officine italienne en proposera une déclinaison très proche à Alfa Romeo pour sa 164 contemporaine. Le style est figé en début d’année 1985 tandis que les premiers prototypes roulants (en tout il y en aura 43 exemplaires) sont fabriqués. L’aventure de la 405 prend forme tandis que la 205 cartonne dans le réseau commercial, tout comme la BX et que la 309 est lancée : l’avenir de PSA semble radieux malgré la fin programmée de la marque Talbot (elle cessera d’exister en 1986 en France).

Lancement en fanfare

En octobre 1986, la production des pré-séries commence à Sochaux, avant que ne débute la série en avril 1987. Le 18 juin, la 405 est enfin lancée commercialement et s’avère, elle aussi, un excellent numéro. Elle bénéficie de l’excellent travail effectué quelques années plus tôt sur la BX dont elle reprend les soubassements (mais pas la suspension hydraulique). Elle partage aussi avec sa cousine au chevron ses moteurs, uniquement essence au lancement : le 1 580 cc de 92 chevaux et le 1 905 cc décliné en deux niveaux de puissance, 110 chevaux (carburateurs) et 125 (injection). Trois niveaux de finitions sont proposés : GL en entrée de gamme, GR au milieu, et SR en haut de gamme. Entre des moteurs relativement puissants et un châssis affûté, la 405 s’avère une berline très bien née dont le physique élégant, mais plus consensuel que celui de la BX, séduit la clientèle. Chez l’ennemi de Billancourt, on a sorti la Renault 21 l’année précédente, une excellente voiture mais qui semble déjà datée face à la nouvelle lionne !

D’autant plus que Peugeot fait rapidement évoluer sa gamme pour élargir encore son marché. En septembre, soit trois mois après le lancement de la gamme, apparaît une nouvelle version de la 405, et non des moindres : la Mi16 avec son 1 905 cc porté à 160 chevaux déjà vu peu de temps avant sur la BX 16 soupapes. Avec ce nouveau modèle, Peugeot surfe sur la dynamique sportive engendrée par la 205 GTi tout en restant prudent : la Mi16 se pare de quelques atours sportifs (comme l’aileron arrière, des pare-chocs plus affirmés ou des jantes spécifiques) mais reste discrète et de bon goût. Parallèlement, un petit moteur 1 360 cc de 65 chevaux fait son apparition en finition GL.

Une gamme de plus en plus fournie

Début 1988, c’est au tour des moteurs diesel de faire leur apparition : un 1 905 cc atmosphérique de 72 chevaux et un 1 769 cc turbo de 92 chevaux. La gamme est enfin complète tandis que dans l’ancienne usine Rootes de Ryton commence la production des 405 à conduite à droite, signant l’arrêt de mort des dernières Talbot 1510 et Solara anglaises (ne restera plus que l’étonnant utilitaire Express à porter la griffe au T cerclé jusqu’en 1992 outreManche). Entre temps, la 405 décroche le titre envié (et commercialement important) de voiture de l’année 1988 ! Avec la BX, la 205 puis la 405 (sans compter les succès sportifs en rallye), le groupe PSA a effectué un redressement spectaculaire sous la direction de Jacques Calvet (mais aussi l’influence non négligeable d’un Xavier Karcher chez Citroën).

À l’été, c’est au tour de la version break d’être commercialisée. Elle réussit le tour de force de rester séduisante malgré son nouvel arrière. Peu de temps après, la 405 devient vraiment internationale puisqu’elle est lancée en septembre aux États-Unis pour épauler la 505. Elle y devient plus luxueuse et garde son charme malgré de nouveaux pare-chocs aux normes US. Malheureusement, elle ne réussira jamais à s’imposer aux USA : trop chère, sans image, peu adaptée à la demande locale, elle n’y fera que de la figuration jusqu’au retrait de Peugeot du marché américain fin 1991. Heuliez aura bien tenté de proposer une version 405 coupé destinée au marché nord-américain, sans succès. De même, le record de Vatanen à Pikes Peak n’aura aucune influence sur les ventes outre-Atlantique.

Une 405 dans sa livrée USA

Une production mondiale

Pourtant, malgré l’échec américain, la 405 poursuit sa conquête du globe : fin 1988, un accord est signé avec le constructeur iranien Iran Khodro pour une production locale. Ce dernier vendra la 405 telle quelle mais aussi des versions inédites, comme la 405 RD puis Roa “propulsion”, la Samand (lancée en 1996 avec une ligne “maison”), la Pars (une 405 restylée lancée en 2001) et même un étonnant pick-up nommé Arisun. La 405 sera aussi produite, entre autres, à Taiwan (à partir de 1989), en Égypte (aux côtés de la Pars à partir de 1992), ou même en Pologne (1992).

Pendant ce temps-là, la gamme a encore évolué : désormais, la 405 peut recevoir une transmission intégrale (X4), qui sera pourtant boudée par la clientèle. En 1992, toute la gamme reçoit un restylage bienvenu pour remettre au goût du jour une voiture qui commence à vieillir. Les modifications sont subtiles mais réussies tandis que de nouveaux moteurs essence remplacent les anciens : 1.6 litre de 89 chevaux, 1.8 litre de 103 ch, 2 litres de 123 ch ou 150 ch (Mi16). Mieux, une version ultra-sportive vient coiffer la gamme sous le nom de 405 T16 avec sa transmission intégrale et son 2 litres 16 soupapes Turbo de 200 ch (220 pendant quelques secondes grâce à l’overboost).

La Peugeot 405 T16 et son overboost permettant d’obtenir pendant quelques secondes jusqu’à 220 chevaux aux quatre roues !

Le chant du cygne

Au milieu de l’année 1994, la gamme est remaniée avec les finitions Sillage, Style et Signature. Cette simplification annonce sereinement la fin de la production de la 405, d’autant qu’en 1995, les finitions hautes ou sportives (STi, Mi16, T16) disparaissent du catalogue. Entre avril et novembre 1996, la 405 cesse d’être fabriquée en France. Elle durera jusqu’en 1999 en Argentine, mais continuera jusqu’à aujourd’hui en Iran, malgré les embargos successifs et envers et contre tout. Hors Iran, la Peugeot 405 aura été fabriquée à 2 490 963 exemplaires entre 1987 et 1996. Un succès énorme qui continue d’ailleurs à séduire en Asie puisque Iran Khodro la produit désormais aussi en Irak ou en Azerbaïdjan.

Aujourd’hui, la 405 reste tout à fait dans le coup malgré les années, devenant même une Youngtimer de choix, surtout dans ses versions sportives (Mi16, T16), ou spéciales (comme la série spéciale Roland Garros Break limitée à 500 exemplaires). Mais des versions récentes dotées des moteurs modernes pourront parfaitement faire l’affaire d’autant qu’avec le temps, l’équipement au départ indigent devient très complet. Elle est en tout cas un symbole des années 80 et 90, de ce temps où les berlines régnaient encore sans partage sur le marché. Elle aura marqué l’enfance (et particulièrement la mienne) de nombre d’adolescents qui découvraient alors une berline moderne en comparaison des précédents modèles familiaux.

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