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Mitsubishi GTO / 3000 GT : le missile nippon

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 16/08/2022

La fin des années 80 marque une nouvelle étape pour les constructeurs japonais. Jusque-là, ils s’étaient contentés de fournir l’Occident en placides berlines ou citadines, sans jouer d’autre partition que la fiabilité, le prix. Acheter une japonaise était un choix pragmatique avant tout et dans l’esprit (étriqué) de certains, la technologie nippone n’était sûrement pas au niveau des Européens : à tort. Pourtant, les marques japonaises avaient déjà démontré leur savoir-faire, mais il fallait désormais frapper les esprits une bonne fois pour toutes. Chacune se mit à produire sa propre sportive, séduisante et performante. NSX chez Honda, 300 ZX chez Nissan, RX7 chez Mazda, Supra chez Toyota… Pour Mitsubishi, la sportive démontrant sa technologie s’appellera, elle, GTO (au Japon) et 3000 GT (ailleurs).

La Mitsubishi HSX Concept présentée en 1989

On l’a vu, ce n’était pas la première fois que les marques japonaises tentaient de séduire les foules avec des sportives. Toyota s’était déjà lancé dans les années 60 avec la superbe 2000 GT (tiens, tiens !) ou bien Nissan/Datsun avec ses Fairlady (les fameuses 240, 260 et 280 Z). Mazda aussi, avec ses étonnantes Cosmo, prouvait au monde entier son excellence et son originalité technique. Quant à Honda, elle produisait dès les sixties les adorables S-Series. Malgré tous ces produits séduisants, les constructeurs japonais manquaient cruellement d’image et ne touchaient, forcément, qu’une clientèle experte ou bien désireuse de se démarquer… La majorité des gens imaginaient les voitures japonaises comme des déplaçoires, pas des usines à rêve. Mais avec l’évolution rapide des ventes “classiques”, notamment aux États-Unis, on pouvait enfin rêver, du côté du soleil levant, à monter en gamme et en réputation.

Des sportives en guise de démonstrateurs 

Ce nouvel horizon amena deux réactions parallèles : la création de divisions dites “premium”, comme Lexus pour Toyota, Infiniti pour Nissan ou Acura pour Honda, mais aussi le lancement de véritables sportives à même de démontrer la qualité des ingénieurs nippons ! Chez Mitsubishi, on se décida donc à lancer le projet d’un gros coupé à même d’aller titiller les meilleures sportives européennes à partir de la plateforme de la Sigma/Diamante et de son V6 de 3 litres. Dès 1989, le concept-car HSX était dévoilé au public, figeant le style agressif de la future voiture.

La soeur jumelle américaine, la Dodge Stealth

Pour s’assurer de la plus grande rentabilité possible du projet, Mitsubishi s’allia avec un constructeur américain, Chrysler. Cette alliance était d’autant plus logique qu’à cette époque, le groupe américain dirigé par Lee Iacocca possédait 24 % du constructeur japonais. La HSX aurait donc deux descendantes : la GTO pour Mitsubishi et la Stealth pour Dodge (marque du groupe Chrysler). Toutes deux seraient fabriquées au Japon, dans l’usine de Nagoya. La super sportive made in Japan fut présentée officiellement en 1990. Si la voiture fut bien vendue sous le nom de GTO au Japon, on préféra ne pas trop mettre en avant ce terme très “italien” et lié à Ferrari ailleurs : elle prit donc le nom de 3000 GT pour les marchés d’exportation.

Transmission intégrale et V6 Biturbo

Bien que développée sur une base de Sigma, la GTO n’était pas une traction, mais une transmission intégrale permanente, permettant une excellente motricité. À l’époque, ce type de transmission n’était pas si répandue que cela sur des sportives. Porsche s’y mettait, mais chez Ferrari ou Lamborghini, on restait attaché à la propulsion. L’avantage de l’intégrale restait tout de même de rendre la voiture particulièrement efficace au prix d’un certain poids. D’autant que la voiture, une 2+2, était assez longue avec son moteur à l’avant pesant entre 1 420 et 1 480 kg selon les versions. Pour encore plus d’efficacité dans les virages, la GTO était aussi dotée de quatre roues directrices !

Pour mouvoir tout cela, on choisit un V6 3 litres dans la gamme de motorisation du japonais. Seule la Dodge Stealth eut droit à la version à 12 soupapes de 164 chevaux. Au Japon et aux USA, la GTO/3000 GT et la Stealth récupéraient le 24 soupapes de 225 chevaux. Au Japon, suivant en cela le Gentlemen’s agreement, la version biturbo la plus puissante culminait à 280 chevaux quand aux USA on trouvait une version biturbo de 300 chevaux (VR4). En Europe, une seule version fut disponible avec 286 chevaux. De quoi largement s’amuser à l’époque tandis que le look séduisait la clientèle, du moins aux USA ou au Japon car en Europe, il paraissait un peu fade, manquant de caractère malgré son becquet et ses phares rétractables. Finalement, le style correspondait plus aux goûts américains qu’européens, loin des lignes élancées d’une Ferrari de la même époque, ou au style inimitable d’une Porsche 911 “964” puis “993”.

La 3000 GT VR4 américaine. Il existe aussi une rare version « roadster » à toit escamotable réalisée par ASC.

Succès au Japon et aux USA, échec en Europe

Effectivement, le succès ne sera pas au rendez-vous sur le Vieux Continent, expliquant que cette voiture soit tombée dans l’oubli quelques années plus tard. Mais cet échec européen est un trompe-l’oeil car au Japon et aux USA, la voiture fut un véritable succès : entre 1990 et 2000, Mitsubishi produisit 86 151 GTO/3000 GT et 65 303 Dodge Stealth, soit un total de 151 454 voitures. Pas mal pour une sportive relativement onéreuse (bien que plus accessible qu’une européenne). En 1994, une nouvelle version de 320 chevaux fit son apparition. En 1996, Chrysler cessait la commercialisation des Stealth, laissant toute la place à Mistubishi avec la GTO et ses soeurs qui reçurent un premier restylage, leur faisant perdre leurs phares escamotables devenus presque ringards dans les années 90. Conscient de l’échec européen, Mitsubishi cessa l’importation en 1998 mais persista au Japon et aux USA jusqu’en 2000.

La GTO / 3000 GT perdra ses phares escamotables au fil des ans

Aujourd’hui, les 3000 GT sont peu connues en Europe, profitant ainsi d’une décote appréciable pour des véhicules de qualité et performants. Attention cependant : il s’agit d’une voiture méritant un entretien rigoureux. Si parfois les prix sont bas, l’état réel des véhicules est parfois aussi “délaissé”. Attention donc aux véhicules passés entre des mains désargentées ou dans celles de fous du volant n’hésitant pas à malmener la boîte, d’autant que les pièces détachées restent onéreuses.

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