Innocenti Mini (ADO15/ADO20) : une Anglaise chez les Ritals
Rouler en Mini est à la mode, et cela ne date pas d’hier. Je ne vous parle pas des “nouvelles” Mini façon BMW, mais des Mini tout court, fabriquées jusqu’en 2000 sous les marques Austin, Morris ou Rover. Si céder aux charmes de cette adorable Anglaise me tente régulièrement, difficile, pour mon esprit tordu, de me contenter d’une classique version originale. En effet, si les reprises musicales sont rarement meilleures, il arrive qu’une pépite fasse son apparition. En automobile c’est pareil : si vous désirez une Mini des années 60/70 à la finition presque parfaite, tournez votre regard vers l’Italie et prenez l’option Innocenti. Certes, pour l’originalité, certains — encore plus spéciaux que moi — n’hésiteront pas à fouiner en Espagne, à la recherche d’une rare Mini signée Authi. Pour ma part, j’opterai donc pour une autre cousine, transalpine plutôt que transpyrénéenne, l’Innocenti Mini.
Innocenti n’existe plus aujourd’hui, avalée puis digérée par Fiat après ses années De Tomaso. Sa dernière tentative, pour exister, consista à importer des Zastava en Italie dans les années 90 sous le nom de Koral. Avant, c’était avec la Nuova Mini (et notamment sa déclinaison sportive Turbo De Tomaso) que la marque tentait d’exister. Si la Nuova Mini exista, c’est bien grâce à la petite Anglaise du même nom qui fut fabriquée à Milan à partir de 1965 et dont le concept dérive (en plus moderne, plus anguleuse et plus pratique).
Une version sportive CooperEt la Mini devint Italienne
1965 donc. Cette année-là, chez Innocenti, on se décide à lancer la Mini Minor, version italienne, produite tout d’abord en CKD, de la petite Mini conçue par Alec Issigonis en 1959. Depuis quelques années déjà, la marque italienne produit sous licence des Austin A40 et c’est en toute logique qu’elle entreprend la fabrication d’une excellente concurrente à la populaire Fiat 500 lancée en 1957, mais qui n’en finit pas de séduire une Italie friande de mobilité en ces Trente Glorieuses bénies. Pour Innocenti, c’est s’attribuer une part du gâteau sans beaucoup investir. Pour BMC (qui fusionnera en 1968 avec Leyland Corporation pour devenir British Leyland Motor Corporation), c’est l’occasion de bénéficier d’un assembleur au sein d’une CEE qui se forme et dont l’Angleterre ne fait alors pas partie.
L’Innocenti Mini T (en haus) sera replacée par la Metallica (en bas).À Lambrate, devant le succès de la Mini Minor 850, on passe vite la seconde, optant pour une vraie chaîne de fabrication. Certes, les mécaniques et les carrosseries proviennent toujours d’Angleterre, mais de nombreux éléments locaux sont intégrés. Ainsi, les Mini italiennes diffèrent de leurs sœurs anglaises mais c’est surtout le positionnement qui est différent. A cette époque, la Mini “classique” est plus un objet de mode qu’un objet de luxe. En Italie, pour se différencier de la 500, la version italienne va adopter une définition plus haut de gamme : Innocenti va ainsi s’attacher à la qualité de fabrication et d’assemblage tout en proposant des intérieurs plus luxueux.
Une Cooper 1300 ADO20Une gamme luxueuse et sportive, un cran au dessus de l’Angleterre
Rapidement, la gamme est déclinée. À la Minor 850 du début (41,5 chevaux) viennent s’ajouter la Cooper 1000 de 56 chevaux en 1966, ainsi que la Mini T (break). En 1968, la Minor évolue légèrement, tandis que la Cooper passe à 60 chevaux. Une version Metallica (rien à voir avec le groupe du même nom) vient remplacer la T (qui, elle, conservait des boiseries décoratives extérieures). En 1970, la Minor devient Mini Mk3, évoluant légèrement. Sa version Mini Matic (automatique) est par ailleurs lancée.
En 1972, tout change : d’une part, British Leyland, appâtée par le succès, gobe Innocenti. La gamme Mini est alors remaniée, passant de la génération ADO15 à la suivante, ADO20. En entrée de gamme, les Mini 1000, 1001 et Export s’offrent désormais 44 chevaux. En haut de gamme, la Mini Cooper gagne encore quelques canassons, pour culminer à 67 unités. Geoffrey Robinson, nouveau directeur d’Innocenti depuis le rachat de 1972, découvre dans les cartons le projet de Nuova Mini initié par Luigi Innocenti. Séduit par cette proposition de modernisation de la Mini classique et inquiet des futures Autobianchi A112 et Fiat 127, il décide d’en précipiter le lancement, confiant à Bertone et Gandini le style de la future Mini (qui deviendra, pour beaucoup, la Mini Bertone).
Une version plus moderne signée Bertone achève la carrière de la Mini “classique” en Italie
Ainsi, la Mini Innocenti voit sa fabrication se terminer en 1974 pour laisser la place à une vision plus moderne, et plus italienne. Entre 1965 et 1973, 386 317 exemplaires tomberont des chaînes de Lambrate (plus quelques unités en 1974 sans chiffres connus). Les plus rares sont les Mini T et Metallica (3 620 et 3 385 exemplaires entre 66 et 70) ou Mini Matic (5 532 exemplaires) tandis que les Cooper restent assez courantes (36 766 unités en ADO15, 9 992 en ADO20 1300).
Bref, à l’instar d’une 1275 GT à la face avant plus originale, la Mini Innocenti offre une vraie alternative à la Mini britannique. Avec sa marque italienne plus exotique, sa qualité de fabrication, ses différences notables et son luxe intérieur, l’Innocenti s’avère très désirable. Moins facile à trouver, elle est particulièrement recherchée des amateurs (surtout en version Cooper). Mais, parfois, le hasard fait bien les choses. Jetez un œil de temps en temps, vous n’êtes jamais à l’abri d’une bonne surprise et d’une bonne affaire.