Citroën La Dalat: la perle de l'Orient aux origines africaines !
On connaît bien l’histoire de la Mehari, dont Citroën (ab)use aujourd’hui avec son ersatz électrique à la sauce Bolloré (lire aussi : Citroën Mehari et Citroën e-Mehari) mais pour bien faire, il aurait fallu creuser un peu plus dans l’histoire de Citroën. Bolloré, parti des bords de l’Odet en fabriquant du papier à rouler (OCB) ou du papier bible (que ma famille utilisait pour imprimer bibles et missels dans le Berry), s’est ensuite fait un nom en Afrique dans le transport, la logistique ou les plantations, particulièrement en Côte d’Ivoire… berceau de la Citroën Baby-Brousse.
En fait, la Mehari n’est pas, à sa sortie en mai 1968, si innovante que cela car depuis 1963, la Baby Brousse est fabriquée par les Ateliers et Forges de l’Ebrié et ses promoteurs, messieurs Letoquin et Lechanteurin sur la base de l’Ami 6 (lire aussi : Citroën Ami 6). Il ne s’agit pas d’un véhicule de loisir, mais bel et bien d’un véhicule utilitaire (en métal) dont Citroën va racheter les droits en 1969 pour lancer la FAF (Facile à fabriquer) destinée aux pays émergents. Voilà pour le raccourci généalogique.
Mais aujourd’hui, ce n’est pas la Baby-brousse qui m’intéresse (fabriquée à 31 305 exemplaires entre 63 et 79 en Côte d’Ivoire), ni même la FAF ou bien sa descendance grecque Namco Pony (lire aussi : Namco Pony), mais sa version vietnamienne, la Citroën La Dalat produite à Saigon à partir de 1970 !
Oui vous avez bien lu : au Vietnam. Depuis 1936, Citroën dispose là bas d’une filiale de distribution, la Société Automobile d’Extrême Orient, et malgré le départ des français d’Indochine, continue à exporter ses voitures vers la perle de l’Orient. Je vous le rappelle : depuis 68, Citroën fabrique la Mehari, et depuis 69, elle dispose des droits de la Baby-Brousse ! Le directeur de Citroën à Saigon, devenu Xe Hoi Citroën Cong Ty, Jacques Duchemin, se décide lui aussi à lancer sa FAF, en collaboration avec les Chantiers et Ateliers Réunis d’Indochine (CARIC) qui en assurent la production, et la nomme « La Dalat » (Dalat est une ville du Sud Vietnam, connue pour sa cathédrale et son marché).
La Dalat est donc une Baby-Brousse à la sauce aigre douce, une FAF façon nem, mais surtout une vraie indochinoise, puisque plus de 40 % de ses composants étaient fabriqués localement. Seuls les organes vitaux de la voitures étaient importés de France (moteur, transmission, direction, freins notamment).
Si la Mehari est petit à petit devenue une voiture de loisir, la Dalat est, elle, toujours restée un utilitaire, disponible en 2 ou 4 places, et en plusieurs carrosseries, pick up ou berline, fourgon ou minibus selon les désirs des clients friands de sa simplicité et des possibilités de carrosseries officielles ou non. Véhicule pas cher, et « façile à fabriquer », sorte de véhicule socialiste avant l’heure, il mourra pourtant sous les coups de boutoir du communisme. La chute de Saigon, et le départ des américains du Vietnam sonneront le glas de la Dalat, qui cessera d’être fabriquée en 1975 après presque 5000 exemplaires produits !
Aujourd’hui, il est amusant de croiser ces vestiges coloniaux dans les rues de Saigon ou de Dalat justement, et malgré les faibles volumes de production (moins de 1000 par an pendant 5 ans), il n’est pas rare de tomber sur une Dalat au Vietnam, aux côtés de vieilles Tractions qui font de la résistance dans un pays ou rien ne se perd, et tout s’entretient pour « servir ».
Le fameux marché de la ville de Dalat (ou Da Lat)Si vous avez l’occasion d’en sauver un exemplaire, faites le car les Baby-Brousse, FAF, Pony, Yalan ou Dalat ont tendance à disparaître de la mémoire collective pour ne laisser place qu’à sa glorieuse version Mehari !