Trekka : un pick up à moteur Skoda au pays des Kiwis
Alors que Skoda lançait son Kodiak, je me suis demandé si par hasard la marque tchèque n’avait pas déjà produit un tel véhicule dans sa longue histoire. En fait de SUV au sens propre (et je mets volontairement à part le Yeti), je n’ai rien trouvé d’autre qu’une curiosité totalement Boîtier Rouge, construite en… Nouvelle Zélande. Voilà donc l’histoire du petit Trekka, fabriqué au pays des Kiwis sur une base de Skoda Octovia.
La Nouvelle Zélande avait dans ces années-là une politique plutôt protectionniste en matière d’automobile, limitant le nombre de véhicules importés par des taxes et des quotas, et obligeant les constructeurs étrangers à passer par des assembleurs locaux pour écouler leur production en CKD afin d’échapper aux lourdes taxes et contraintes.
L’un de ces assembleurs s’appelle Motors Line, et son boss au début des années 60, Philipp Andrews, a l’intuition qu’il existe un marché pour un véhicule utilitaire robuste et passe partout, sorte de Land Rover en miniature. Surtout, le marché des véhicules agricoles est peu réglementé, contrairement aux véhicules destinés au particulier : pas de taxe particulière, ni de quota de vente. Andrews ne mènera pas seul le projet. Il revend Motors Line à Noel Turner, mais réussit à le convaincre de la viabilité du projet. Un autre néo-zélandais, Peter Risbridge, a lui aussi cette intuition, et a développé un prototype sur base Bradford, qu’il va prêter à Motors Line dans l’espoir de créer une co-entreprise.
Finalement, Motors Line va développer, sous la houlette de Colin French, son propre projet, assez proche de celui de Risbridge, mais sur une base de Skoda Octavia. En effet, Motors Line assemble déjà ce modèle pour le compte du constructeur tchèque Skoda : après tout, la petite entreprise néo-Z a déjà tout le matériel sur place. Comme l’Octavia, il s’agit d’une propulsion (malgré son look de 4×4), avec une boîte de vitesse manuelle à 4 rapports, avec un moteur tchèque 4 cylindres de 1221 cm3 développant 47 ch.
Pour le reste, tout change : la carrosserie réalisée en acier pour partie et en polyester pour certaines pièces, lui offre un look de pick up deux places. En option, on pouvait disposer d’un différentiel à glissement limité à l’arrière, pour une plus grande capacité de franchissement. Une grande partie des pièces étaient fabriquées localement pour en abaisser le coût. En 1966, le Trekka est prêt, et vendu à une clientèle locale ravie de pouvoir s’offrir un petit utilitaire bon marché, agile et robuste, qui plus est officiellement néo-zélandais.
La première année de production, plus de 700 exemplaires sortiront des chaînes, mais le succès des premiers instants va vite se calmer. Le 1000ème Trekka sort des ateliers de Motors Line en janvier 1968, et lorsque la production cessera en 1973, seuls 2500 véhicules auront été fabriqués. Il faut dire qu’entre temps, le gouvernement néo-zélandais aura changé de politique, libéralisant l’importation et la vente de véhicules dans le pays. Dès lors, le petit Trekka perdait son avantage concurrentiel et son intérêt.
Le Trekka sera aussi exporté vers l’Australie sans grand succès (seuls 46 exemplaires y seront vendus malgré l’obtention d’une exemption de droits de douane). Motors Line fondera aussi beaucoup d’espoir sur le marché indonésien. Un accord fut signé pour la production locale du Trekka, et un lot de 100 kits sera livré en 1971. Mais des problèmes de paiement feront capoter l’affaire, et seuls 3 exemplaires furent réellement montés et vendus là-bas.
Aujourd’hui, le Trekka est une affaire de spécialistes et de passionnés. Il existe un site très bien fait, dont viennent la plupart des photos et des informations, et il est possible de commander un livre sur l’histoire du Trekka. Si l’envie vous prend d’être un vrai original, en roulant dans un petit pick up néo-zélandais au moteur tchèque, alors c’est sur ce site que vous trouverez le plus d’informations.
Pour en savoir plus : http://www.trekka.co.nz
Photos : Trekka.co.nz / RD