Simca 1100 : le reflet de son époque
On a tous dans le coeur ce vieil oncle Marcel qui roulait encore en Simca 1100 au début des années 80. Certes, elle n’était plus produite depuis 1981 et désormais les voitures sortant de Poissy s’appelaient Talbot, mais la 1100 n’était pas encore totalement has been sur les routes de France, et l’on pouvait en croiser à foison. Evidemment, la bouillante 1100 Ti se faisait plus rare, mais les placides berlines lancées en 1967 pullulaient encore, surtout dans les campagnes : normal me direz-vous, avec plus de 2 millions d’exemplaires produits en 14 ans. Voici donc l’histoire de cette Simca 1100 pas prétentieuse pour un sou, celle qu’on aimait tant.
Simca, malgré son appartenance au groupe américain Chrysler depuis 1962, complétait le quatuor de constructeurs français aux côtés de Renault, Peugeot et Citroën. Avec nos yeux des années 2000, Simca semble n’être qu’une petite marque alors qu’à l’époque, elle rivalisait avec les 3 autres à coup de voitures populaires (la Simca 1000) ou de voitures intermédiaires (1301, 1501). Il fallait pourtant, face à la déferlante des autres françaises à coup de voitures modernes et pratiques (la Peugeot 204, en particulier, lancée en 1965), envisager l’avenir autrement avec une voiture vraiment dans le coup.
Soutenue par Pigozzi, contre l’avis de Chrysler
C’est ainsi qu’est née la Simca 1100, une voiture intermédiaire (entre la 1000 et la 1301, sans parler des 1000 et 1200 S plus confidentielles), traction, moteur transversal, suspension à quatre roues indépendantes, et dotée d’un hayon. Le projet remontait au début des années 60, alors que Henri Pigozzi est encore en place malgré la montée progressive de Chrysler au capital. Contre vents et marées, il imposa la 1100 face au conservatisme américain (sous le nom de code 928), avant de finalement se faire débarquer. Son successeur, Georges Héreil, tint bon lui aussi : la petite 1100 était définitivement dans les tuyaux.
Pour accompagner le lancement de la nouvelle Simca, il fallait du neuf aussi sous le capot. C’est ainsi qu’avec elle naissaient les moteurs “Poissy” (un moteur qu’on retrouvera sur les 1309 et 1308, puis les Peugeot 309, certaines 205 et sur le fameux utilitaire de Citroën, le C15). La 1100 proposait à sa sortie en 1967 deux versions du “Poissy” : un 944 cc de 45 chevaux pour l’entrée de gamme et un 1 118 cc qui lui donnera son nom en deux niveaux de puissance (53 et 56 chevaux). La nouvelle petite Simca était disponible en 3 et 5 portes, mais aussi en version break et utilitaire.
Une rare version « coach »Best seller national
Trois ans plus tard, la gamme s’étoffait avec une version plus luxueuse et plus puissante, la 1100 Spécial (1 294 cc, 75 chevaux et double carburateurs, un moteur vorace) mais c’est surtout en 1973 que tout allait changer : Simca lançait sa 1100 Ti, une petite sportive dont le moteur (celui de la Spécial) était poussé à 82 chevaux grâce à deux carburateurs Weber double corps. Cette même année, la 1100 pétait les scores avec plus de 300 000 exemplaires vendus. Malgré son look étonnant (mais qui vieillit très bien), la petite Simca taillait des croupières aux Peugeot 204 puis 304, voire à la Renault 12.
Le flair de Simca, c’est d’avoir fait de la 1100 une voiture pratique (sièges avant rabattables, hayon), spacieuse, relativement performante, particulièrement fiable, moderne en somme, tout en restant abordable. Elle restera d’ailleurs au catalogue jusqu’en 1981 (en portant le logo Talbot à partir de fin 1979) malgré l’arrivée de l’Horizon au look plus moderne. Au total, elle se vendra à 2 134 900 exemplaires.
Une Simca 1100 Break, plus classiqueSes dérivés utilitaires (VF1 et VF2) seront à l’origine d’une idée de génie chez Matra (dont Chrysler Europe était actionnaire) : décliner la petite Simca en un étonnant véhicule de loisir, la Simca-Matra (puis Talbot) Rancho. Des années avant la mode des SUV, la 1100 se déclinait donc à toutes les sauces, y compris avec un look baroudeur. Cela n’empêcha pas Simca d’entrer dans la tourmente à la fin des années 70. Chrysler, alors mal en point et qui n’investissait plus vraiment dans sa filiale française, se décidait à vendre ses actifs en Europe : Simca, donc, mais aussi Rootes en Angleterre, ainsi que Barreiros en Espagne (qui produisait aussi la 1100 pour le marché ibérique). Croyant faire une bonne affaire, PSA raflait la mise. La 1100 était à son crépuscule, elle ne survivra au rachat qu’à peine une année.
De Simca à Talbot
Aujourd’hui, la 1100 trouve grâce aux yeux des collectionneurs. Amusante à conduire, amusante à bricoler, abordable à l’achat, parfois sportive (mais la TI commence à voir sa cote s’envoler), elle est la parfaite voiture de l’apprenti collectionneur amoureux de populaires. C’est aussi le parfait reflet de son époque, ces années 70 encore glorieuses où tout français pouvait enfin accéder à l’automobile, moderne de surcroît. Pour les amoureux de raretés, la version 3 portes fera l’affaire, ou bien une version américain appelée 1204 (oui, la petite Simca fut exportée outre Atlantique). A vous de voir.