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Monteverdi Safari et Sahara : alternative suisse au Range Rover

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 19/02/2018

L’industrie automobile suisse n’a jamais été la plus développée au monde, malgré un marché intérieur dynamique et très clairement orienté « haut de gamme » (tout simplement grâce au niveau de vie élevé des helvètes) et « tout-terrain » (puis transmission intégrale, le pays étant pour l’essentiel un pays montagneux et particulièrement enneigé en hiver). Monteverdi fut l’un des rares constructeurs du pays des années 60 aux années 80, et c’est inévitablement sur ces deux marchés qu’il tenta de s’imposer. Après une High Speed 375 très clairement sportive, le petit constructeur suisse tenta de répondre à l’autre grande demande, le 4×4, avec deux produits : le Safari (« de luxe ») et le Sahara (rustique).

C’est en 1976 que Peter Monteverdi lança le Safari, bien avant les berlines Sierra (en 1977, lire aussi : Monteverdi Sierra) ou bien Tiara (en 1981, lire aussi : Monteverdi Tiara). Malgré le succès d’estime de la 375, la marque basée à Binningen, près de Bâle, n’avait pas les moyens de développer à ses frais un tout-terrain totalement nouveau. Ce fut donc aux Etats-Unis qu’on alla trouver une base éprouvée : l’International Harvester Scout II (lire aussi : International Harvester Scout).

Le Scout avait en outre l’avantage d’être relativement méconnu en Europe, donnant ainsi l’impression d’un véhicule faussement nouveau, d’autant que Monteverdi eut la bonne idée de faire restyler le 4×4 pour lui donner un air plus personnel et plus européen, avec en ligne de mire le récent Range Rover (lire aussi : Range Rover). Pour re-dessiner le Scout et le transformer en Safari, Monteverdi fit appel à son fidèle carrossier italien, Fissore, qui réalisait déjà les carrosseries de la 375.

L’essentiel du travail porta sur les faces avant et arrières. Le Safari recevait une nouvelle calandre à double-phares, tandis que l’arrière recevait lui des feux de Peugeot 504 (la berline Sierra, elle, s’offrait des feux arrières de Renault 12, tandis que la Tiara récupérait des feux de Peugeot 505). L’intérieur avait droit à un traitement le plus luxueux possible sans retroucher le style initial : moquette épaisse, sièges en cuir, et toutes les options offertes sur le Scout II d’origine, notamment la climatisation).

L’International Harvester Scout II n’étant disponible qu’en 3 portes, il en fut de même pour le Safari, malgré un prototype d’une version 5 portes en 1979. Il faut croire que les 5 portes travaillaient beaucoup Peter Monteverdi, car, cette même année, il proposa à Land Rover sa vision d’un Range rallongé avec l’aide de Fissore : une version qui fut un temps au catalogue officiel du constructeur anglais avant qu’il ne produise son propre modèle (lire aussi : Range Rover Monteverdi Fissore).

Mais revenons au Safari. Pour l’offre moteur, Monteverdi proposait deux solutions : soit le moteur V8 International Harvester de 5.7 litres et 165 chevaux, soit un moteur Chrysler moins gros de 5.4 litres et 152 chevaux. Au tout début des années 80, Monteverdi réalisa un prototype de Safari doté d’un V8 Chrysler 7.2 litres de 305 chevaux, une version qui ne connaîtra jamais la série. Dès 1977, le Safari commença à être produit en Italie chez Fissore. Les débuts, encourageants, laissèrent entrevoir un succès plus grand que prévu. Monteverdi et Fissore entreprirent alors de moderniser l’outil de production pour augmenter la cadence. Pour accompagner ces investissements, Peter Monteverdi apporta de l’argent frais en échange d’une participation dans la Carrozzeria.

En 1977, il fut décidé d’offrir une version plus rustique dédiée à une clientèle plus professionnelle ou agricole. Pour faire baisser les coûts, la carrosserie du Scout fut largement conservée, à l’exception de la calandre. Seul le V8 Chrysler était disponible, et on pouvait aussi commander, en option, un moteur diesel, un 6 cylindres d’origine Nissan (que l’on trouvait aussi sur le Scout) de 3.3 litres et 90 chevaux à partir de 1979. Cette année-là, Monteverdi présenta aussi une version longue du Sahara, qui restera sans suite.

Le Sahara, version plus rustique, moins chère et plus proche de l’International Harvester Scout

Malgré de bons débuts, les ventes ne furent pas en rapport avec l’investissement consenti chez Fissore. Avec 350 exemplaires produits en 1979, on était loin du seuil de rentabilité, mettant gravement en difficulté Fissore et obligeant Monteverdi à en prendre le contrôle, brûlant par ailleurs du cash qui aurait été bien utile ailleurs. D’autant que cette année-là, la seconde crise pétrolière pénalisa grandement les gros moteurs V8 présents sous les capots des Safari et Sahara. Sans compter Land Rover qui lançait sa version 5 portes, privant Monteverdi de la petite manne de sa propre version, alors que les Safari restaient, eux, en 3 portes.

Les deux protos de 1979: en haut, le Safari 5 portes, et en bas, le Sahara LWB

Malgré cela, Monteverdi continua coûte que coûte à produire au compte goutte ses gros 4×4, et lançant même sa grande berline Tiara, une version grossièrement maquillée de la Mercedes Classe S W126. Pas de quoi renflouer les caisses, et Peter Monteverdi préféra fermer les portes de son entreprises comme de celle de Fissore avant de perdre sa fortune issue de la distribution de véhicules de luxe en Suisse (Ferrari, Rolls-Royce et Bentley).

La gamme Monteverdi avec les Sierra berline et cabriolet, et le Safari

Les chiffres de production du Safari et de son frère Sahara sont flous : Peter Monteverdi a souvent parlé lui-même de 3000 voitures produites entre 1977 et 1984. Sachant que 1979 fut l’année la plus florissante avec 350 exemplaires, tous modèles confondus (4×4, berline Sierra), on peut en déduire que ce chiffre est un peu exagéré. Cependant, on en trouve en occasion / collection un peu partout en Europe, à des tarifs relativement doux : de quoi s’offrir un tout-terrain différent, aux capacités de franchissement éprouvés et dont les pièces mécaniques sont faciles à trouver. Seules les pièces spécifiques de carrosserie seront un cauchemar pour le futur propriétaire, ainsi que les passages à la pompe, mais la distinction a un prix !

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