CLASSICS
4X4
LUAZ
UKRAINE

LuAZ-969 : l'autre mythique tout-terrain soviétique

Par PAUL CLÉMENT-COLLIN - 24/03/2017

Si l’on vous parle d’un petit 4×4 de légende fabriqué en Union Soviétique, vous penserez immédiatement au Lada Niva (lire aussi : Lada Niva). Normal, il fut vendu à de nombreux exemplaires en Europe Occidental, ce qui contribuera beaucoup à sa notoriété. Pourtant, le Niva ne fut pas le seul petit 4×4 populaire dans l’ex-URSS. Car bien avant lui, un petit tout-terrain à succès fit son apparition, dans les années 60 : le LuAZ-969, dont voici l’histoire un poil compliquée.

Le LuAZ-967 produit à partir de 1961 donnera sa base technique au 969

Tout commence avec la guerre de Corée. Les militaires soviétiques se rendirent compte à cette occasion que leur lourd véhicule de liaison, le GAZ-69, était bien trop vulnérable : pas assez habile et en outre incompatible avec un usage aéroporté, car trop lourd. Dans ce contexte, il fut demandé à l’institut National d’Automobile d’étudier un petit véhicule tout-terrain, amphibie, et aérotransportable. Les ingénieurs planchèrent donc sur deux prototypes, le 049 puis le 049A, entre 1958 et 1959. Une fois le concept validé, la production fut confiée au constructeur ukrainien LuAZ (Usine Automobile de Lutsk), pour donner naissance en 1961 au LuAZ-967, petit 4×4 amphibie doté d’un V4 MeMZ de 887cc et 38 chevaux.

Les qualités évidentes de ce petit LuAZ-967 en feront la base d’un dérivé civil destiné à la motorisation de masse des zones agricoles… Dans l’URSS d’alors, la production automobile est rationalisée (enfin, ça y ressemblait). Les usines produisaient en fonction de leur spécialisation. LuAZ était spécialisée dans l’utilitaire et le militaire, c’est donc l’autre constructeur ukrainien, plus orienté « civil », ZAZ qui va se charger de développer une version civile dénommée ZAZ-969. Une première pré-série sortira en 1964. Mais rien n’est simple au pays des Soviets. Prévu pour être un tout terrain à traction à pont arrière enclenchable (et donc blocage du différentiel arrière, en gros une traction qui devenait 4×4), le ZAZ-969 sortira à ses débuts uniquement en traction, par manque de pièces disponibles (le LuAZ-967, à usage militaire, était alors prioritaire).

Le LuAZ-969 dans ses premières versions

C’est donc par accident que le ZAZ-969V deviendra la première traction de la production automobile soviétique, et dont la production commence en 1967. En tout, 7438 exemplaires « traction » sortiront des chaînes de ZAZ jusqu’en 1971. A cette date, l’organisation industrielle change : les pièces permettant de rendre le 969 véritablement tout terrain sont enfin disponibles, et l’organisation industrielle change : désormais, c’est LuAZ qui va le produire sous le nom de LuAZ-969. Dès lors, le petit 4×4 ne quittera plus l’usine de Lutsk.

le 969M est une version modernisée et plus confortable parue en 1979

En 1975, le LuAZ-969 reçoit une amélioration de son moteur, qui passe à 1.2 litres et 40 chevaux pour devenir LuAZ-969A (30 500 exemplaires). Mais la vraie star des 969 ne fera son apparition qu’en 1979, sous le nom de LuAZ-969M « Volin ». Outre quelques modifications techniques, il reçoit une carrosserie modernisée et quelques amélioration de confort (si l’on peut parler de confort), notamment des serrures, des vitres, et des sièges de Jigouli (lire aussi : L’usine Lada de Togliatti): le grand luxe quoi !

Le 969M pouvait aussi servir de véhicule de loisir à la jeunesse dorée moscovite en mal de sensation

Cette version M sera même exportée dans quelques pays d’Europe, et particulièrement en Italie entre 1986 et 1991, où l’importateur Martorelli le propose doté d’un moteur de Ford Fiesta à partir de 1988, ainsi qu’un diesel Lombardini. Mais globalement, l’essentiel de la production reste destiné à la clientèle de l’Union Soviétique : pas cher, pratique, multitâche, il va devenir l’automobile populaire dans les villages reculés de l’Oural, de la Sibérie, celui qu’on utilise pour la chasse comme pour les champs, un vrai véhicule à tout faire, tant qu’on a pas besoin de vraiment rouler sur une vraie route. Pas la peine d’envisager un trajet Moscou-Vladivostock avec, les longues distances, c’est pas son truc.

Populaire certes, le LuAZ-969M n’en est pas moins controversé. Si l’on loue ses qualités naturelles de franchisseur, sa maniabilité, beaucoup d’utilisateurs déploreront le manque de confort, et sa piètre qualité de fabrication. Sans parler du moteur jugé bruyant, et manquant de couple pour une utilisation tout-terrain (un problème qui sera corrigé au fil du temps). En 1990, la gamme va évoluer : le 1302 apparaît, avec un moteur de ZAZ Tavria de 1.1 litre et 53 ch, et quelques évolutions. Le 1302 va être décliner en différentes longueur pour des utilisations variées (pick up, benne, double cabine etc). L’équipement va lui aussi encore évoluer vers plus de confort, avec une meilleure isolation, et des sièges de Tavria.

La version 1302 plus utilitaire encore vient compléter la gamme en 1990

La production du 969 et de ses dérivés cessera en 2001, après un peu plus de 200 000 exemplaires produits. Populaire certes, le 969 était cependant limité dans son utilisation (essentiellement rurale), ce qui explique une production bien moindres qu’un Niva par exemple, au confort ô combien supérieur (c’est dire!). Pourtant, sa bonne bouille lui vaut la sympathie des ukrainiens, ou des russes, et même des occidentaux. A moins de tomber sur un rare modèle italien, c’est dans les pays de l’Est que vous aurez le plus de chance de le trouver, et particulièrement en Ukraine et en Russie. Pour une bouchée de pain, vous pourrez vous offrir un autre mythe de l’ex-URSS, bien moins courant qu’un Niva, et bien plus rigolo. Prévoyez cependant un usage très localisé (station balnéaire, maison de campagne familiale, chalet dans les Alpes).

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