Isuzu 117 Coupé: l'italienne aux yeux bridés !
La voiture dont je vais vous parler aujourd’hui devait paraître un peu plus tard sur Boîtier Rouge. Mais un défi lancé sur Twitter par Tangi, spécialiste de l’automobile à l’AFP passionné comme moi de voitures atypiques, me donne envie de vous en parlez plus tôt. La photo d’un coupé manifestement japonais (ses rétroviseurs sur le capot avant en étaient la preuve) servait de base à ce challenge. Ses doubles phares avant rectangulaires lui donnaient un air de Peugeot 504 coupé (lire aussi : Peugeot 504 Coupé), et certains osèrent d’ailleurs cette réponse pas si idiote que cela. Lorsque dans ma chambre d’hôtel en Espagne, je découvrais le défi, il ne m’était pas difficile d’épater tout le monde : il n’y a pas si longtemps de cela, j’évoquais pour vous l’Isuzu Piazza (lire aussi : Isuzu Piazza) qui n’était rien d’autre que le successeur de ce coupé « mystère ». Mon travail documentaire est un travail au long cours, chaque voiture se référant à une autre et m’offrant des possibilités d’histoires exponentielles. En travaillant sur la Piazza, j’étais inévitablement tombé sur l’Isuzu 117 Coupé, et il ne m’était pas difficile d’épater la galerie.
Mais pourquoi, me direz-vous, répondre qu’il s’agissait d’une 504 Coupé recarrossée (cela a existé, je vous en parlerai plus tard) n’était pas si idiot ? Tout simplement parce que l’Isuzu 117 Coupé en est la contemporaine (elle est apparue en 1968), qu’il s’agit d’un coupé 4 places issue du projet 117 qui donnera naissance à une berline, un break (Isuzu Florian Sedan ou SW), et donc ce coupé (qui sera le seul à garder la numérotation du projet), et qu’elle fut dessinée elle aussi par un artiste italien : Giorgeto Giugiaro (qui travaillait à l’époque pour Ghia).
L’Isuzu 117 Coupé se retrouve bien cachée dans les occasions du jeu Gran Turismo !Autre comparaison, elle est dans l’imaginaire japonais d’aujourd’hui l’équivalent de la française : le souvenir d’un gros coupé cossu, élégant, ayant marqué son temps. Aussi, les observateurs les plus avertis auraient pu gagner le challenge sur le simple fait d’avoir passé des heures à jouer à Gran Turismo : icône japonaise, elle figurait bien évidemment dans les innombrables voitures d’occasion japonaises du jeu, preuve de sa popularité là-bas.
C’est au début des années 60 qu’Isuzu lance le projet 117, avec l’objectif de concrétiser l’avenir de l’entreprise dans l’automobile. Dans les années 50, Isuzu n’était qu’un assembleur, fabriquant sous licence du groupe anglais Rootes l’Hillman Minx. Ce n’est qu’à partir de 1961 qu’Isuzu proposera son premier modèle « original », la Bellel. Le projet 117 devait offrir une descendance à ce premier coup d’essai, et pour être sûr d’avoir une belle brochette de voiture, Isuzu va s’adresser à Ghia, et à l’un de ses jeunes stylistes, Giugiaro. La 117 Sedan (qui perdra cette appellation) et la 117 Coupé seront toutes deux présentées en 1966 au Salon de Genève, et leur production commencera en 1967 pour la berline, et octobre 1968 pour le coupé.
Côté ligne, il n’est pas difficile de se rendre compte de l’élégance de ce coupé, tout à fait dans la ligne « italienne » de l’époque. Sans ses rétro-viseurs sur le capot, et son logo Isuzu, on aurait pu égrainer la longue liste des coupé italiens de l’époque (Fiat Dino en tête) en réponse au défi de Tangi. Du côté des équipements, Isuzu aura aussi fait fort, offrant à tous les niveaux de gamme les sièges en cuir, ou bien un tableau de bord en laurier camphre venu de Taiwan, autant de petits signes qui montrent que le Coupé 117 s’adressait à une clientèle huppée. D’ailleurs, jusqu’en 1973, la voiture sera fabriquée à la main, et en relative petites quantités (moins de 1000 exemplaires par an, pour un total de 2500 exemplaires en 4 années de production). Cette année-là, l’alliance capitalistique avec General Motors donnera enfin les moyens de ses ambitions à Isuzu, qui se lancera alors dans sa production de masse.
Dès lors, le Coupé 117 devint un succès, terminant sa carrière en 1981 avec 86 192 exemplaires fabriqués. Entre temps, il aura subi un facelift en novembre 1977. Adieu les doubles phares ronds, place à des doubles phares carrés. C’est cette version que Tangy présenta pour son défi mystère ! Elle perdra alors un peu de son élégance italienne, rentrant dans le rang. Mais à l’époque, ce lifting lui permit de rester dans le ton de la fin des années 70 et de l’aube des années 80. Elle suivait en cela l’air du temps, gagnant une calandre plus carrée, et des pare-chocs en plastique noir cassant un peu l’élégance de sa ligne (la 504 Coupé eut droit au même traitement). J’avoue cependant qu’il est facile de dire cela 40 ans après. A l’époque, tout le monde trouvait ce genre de restylage bienvenu, agréable et moderne.
Côté moteur, l’Isuzu 117 Coupé proposa une large palette. A ses débuts, seul le 1600 était proposé, en deux versions : simple (120 ch) ou double arbre à came (130 ch). La gamme s’élargira ensuite avec plusieurs versions d’un 1800 (100, 105, 115 et 130 ch) proposant aussi l’injection, puis un 1950 en fin de carrière (107, 120 et 135 ch). Il y en avait, vous le voyez, pour tous les goûts. Et même plus encore, puisque Isuzu proposera aussi sur ce charmant coupé un moteur diesel de 2,2 litres développant la puissance faramineuse de 73 ch ! Choix étonnant sur ce type de carrosserie, prouvant les capacités d’innovation du petit constructeur japonais.
Le Coupé 117 dans sa version restylée par GiugiaroCe charmant coupé n’aura jamais la chance de fouler officiellement le sol français. Il sera donc difficile d’en trouver un. L’exportation du Coupé 117 a toujours été limitée (quelques exemplaires en Asie, et en Australie, semble-t-il). Une idée de chasse au trésor qui pourrait bien motiver les plus fous d’entre vous non ?
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