Citroën SM Opéra : le chant du cygne de la carrosserie Chapron
En 1972, Henri Chapron a 86 ans, et voilà quelques temps déjà que c’est sa femme Françoise qui tient les rênes de la fameuse Carrosserie Chapron. Après avoir décliné la Citroën DS à toutes les sauces (coupés, cabriolets, limousines, lire aussi : DS Lorraine) jusqu’à récupérer la fabrication officielle de la DS Cabriolet dite « usine » (lire aussi : DS Cabriolet Usine), le temps de la splendeur est passé, et il faut avant tout assurer la survie de l’entreprise. Le lancement de la Citroën SM en 1970 permet d’envisager un avenir plus serein, et des dérivés lucratifs.
En 1972 donc, on assiste au réveil de la vénérable carrosserie : après avoir présenté le cabriolet Mylord sur base SM, la commande par l’Elysée de deux véhicules d’apparats, des landaulets (lire aussi : SM Présidentielle) donne des idées à Chapron. L’essentiel du travail d’ingénierie a déjà été effectué pour créer les SM Présidentielles, et l’outillage est là : pourquoi ne pas lancer le modèle qui manque à la France en général et à Citroën en particulier : une berline de prestige.
Avec son V6 Maserati, sa ligne séduisante et moderne, et le talent des dessinateurs de chez Chapron, la SM est une excellente base pour un tel projet (lire aussi : Citroën SM). C’est en en octobre 1972, au Salon de l’Auto de Paris, que la SM Opéra est présentée au public. Et force est de constater que cette Opéra en jette. Longue, élancée, luxueuse, disposant de 178 ch grâce à l’injection électronique (200 ch pour certains modèles), elle a tout pour imposer enfin un haut de gamme français et peut croiser à 220 km/h dans un confort royal.
Image BonhamsC’était sans compter deux éléments : un tarif démentiel (165 000 francs en 1974) qui limite d’entrée de jeu son marché, et le premier choc pétrolier fin 1973, qui réduisit encore plus les possibilité. Enfin, comble de malchance, le rachat de Citroën en 1974 par Peugeot signe l’arrêt de mort de la SM pour laisser à la place à une très bourgeoise Peugeot 604 ! Maserati est revendue à la va vite à De Tomaso, adieu les V6 italiens, et wellcome au PRV qui n’équipera jamais la CX.
Chapron construira des SM Opéra jusqu’en 1975, mais au compte goutte, puisque seulement 8 exemplaires seront produits, ce qui fait de cette voiture un modèle ultra confidentiel. D’ailleurs, si l’envie vous prenait d’en acquérir une, prévoyez une sacré réserve bancaire, puisqu’un exemplaire vendu par la maison de vente Bonhams en 2009 atteignit le prix de 194 500 euros ! Henri Chapron quant à lui mourra à 92 ans en 1978, et sa femme réussit à faire perdurer, non sans mal, la carrosserie jusqu’en 1985, en équipant luxueusement des 604, ou en les blindant, sans plus jamais retrouver le lustre d’antan.