Cimos Dak et Geri : le van yougoslave dont Citroën ne voulut pas !
A l’instar de Volvo (lire aussi : Volvo 244 DLS), Citroën a tenté de se faire une place au soleil dans les pays de l’Est, profitant d’une certaine indépendance depuis le retrait de la France de l’OTAN. Si notre beau pays restait membre d’un bloc occidental capitaliste, il avait le mérite de paraître « non-aligné ». Ainsi, Renault s’allia avec Dacia (lire aussi : Dacia 1100) et tenta de conquérir la Bulgarie (lire aussi : Bulgarrenault); on connaît bien l’aventure de Citroën en Roumanie avec Oltcit (lire aussi : Oltcit). De façon plus anecdotique, Citroën « fricota » avec l’Allemagne de l’Est en y exportant des GS (environ 5500 exemplaires) et quelques CX (lire aussi : La Stasi roulait en Citroën).
On connaît moins en revanche les aventures de Citroën en Yougoslavie. Malgré son statut de pays communiste, la Yougoslavie, menée d’une main de fer par Tito, avait une position particulière au sein du bloc de l’Est. C’est en effet le seul pays européen à s’être libéré tout seul, et le seul de l’Est à n’avoir pas eu recours à l’Armée Rouge, ce qui lui donnait une certaine indépendance, à tel point que le Maréchal Tito se déclara assez rapidement « non-aligné » comme on disait à l’époque. De ce fait, il devenait « fréquentable » pour les industriel de l’Ouest.
Cette « ouverture » paraissait une bonne idée pour Citroën, tandis que Tito tentait de développer l’industrie de son pays. Créée en 1955, la firme Tomos commença par fabriquer des cyclomoteurs (activité qu’elle maintiendra longtemps), mais la volonté politique de créer une industrie automobile changera la destinée de l’entreprise qui inaugurait en 1959 une usine d’assemblage à Koper, sur la côte adriatique de la Slovénie (alors membre de la Yougoslavie, pour les plus jeunes!). C’est dans le courant des années 60 (je n’ai pas la date exacte) qu’un accord sera signé entre Tomos et Citroën pour la fabrication en CKD de véhicules Citroën. C’est ainsi que la 2CV y sera fabriquée, mais aussi quelques exemplaires d’ID et de DS (notamment en version break pour les ambulances et pour la douane Yougoslave, on parle de 1000 exemplaires seulement au total).
Durant les années 60, les volumes de production restent faibles. C’est à partir de 1972 que la société prend une plus grande ampleur, important des Citroën de France (Méhari, CX) mais aussi fabriquant localement des Ami 8, des 2CV6, des GS, et des Dyane (sous le nom de Diana). C’est en 1972 aussi que la société prend un nouveau nom, Cimos, fruit de l’association entre Citroën, Iskra (fabricant de composants automobiles, notamment d’alternateurs) et Tomos. Désormais, les Citroën porteront toutes ce patronyme en Yougoslavie.
Les modèles fabriqués par Cimos étaient semblables aux Citroën de l’Ouest, mis à part la GS qui aura droit à des phares ronds. En revanche, en 1981, Cimos se mit à produire un modèle spécifique, la Dak, avec l’accord de Citroën, qui sous-estimait un peu son partenaire slovène. Citroën alla même jusqu’à promettre l’ouverture de son réseau mondial à la Dak, version utilitaire de la Diana yougoslave. Mais contre toute attente, Cimos réussit à sortir un produit intéressant, basé sur un châssis de Dyane non rallongé (contrairement à l’acadiane). Surtout, la Dak est plus moderne que l’Acadiane fabriquée depuis 1978 par Citroën sur un châssis de 2CV AK400 (et une face avant de Dyane).
Ce que Citroën prenait pour une plaisanterie devenait une éventuelle concurrente à son Acadiane. La firme refusa finalement à la Dak le droit d’être exportée, condamnant la voiture à une faible diffusion. Pire, la marque aux chevrons cessa toute livraison de pièces détachées à son partenaire yougoslave : la Dak, crime de lèse-majesté, signa la fin de la collaboration entre Cimos et Citroën. Malgré tout, la petite firme slovène réussit à produire jusqu’en 1985 sa Dak (grâce à une réserve de pièces détachées), et son dérivé Geri, version pick-up de la Dak. Au total, environ 2200 Dak et 900 Geri seront produites entre 1981 et 1985.
C’est cette année-là que Cimos cessera la construction automobile pour se recentrer sur la production de composants automobiles. La firme existe toujours aujourd’hui, réalisant un chiffre d’affaire de 340 millions d’euros et employant 5800 salariés. Ne reste plus en Slovénie que Renault pour y construire des automobiles.
On trouve encore quelques Cimos, et en particulier des Dak, en Slovénie. Il existe d’ailleurs un spécialiste de la restauration des Cimos, 2CVKEZA, qui saura vous aider à trouver votre bonheur. N’hésitez pas à vous rendre sur leur site : http://www.2cvkeza.com/
Merci à Rémy Allibert pour l’idée du sujet