Barkas B1000 : l'autre icône est-allemande
Le Kombi Volkswagen a la cote aujourd’hui, à tel point qu’il est devenu presque inaccessible. Pourquoi alors ne pas s’intéresser à d’autres « vans » moins consensuels, moins connus, et surtout beaucoup plus originaux. Je vous avais déjà parlé du Skoda 1203 (lire aussi : Skoda 1203), et un lecteur avis m’avait suggéré de vous parler aussi du Barkas B1000 est-allemand. Voici donc la petite histoire d’un van aussi connu à l’Est de l’Allemagne que le T1 Type 2 contemporain l’était à l’Ouest.
On a souvent l’impression que les produits venant de l’Est était en retard techniquement face aux à ceux de l’Ouest, et ce n’est pas toujours faux. Mais dans le cas du Barkas B1000 ce n’est pas tout à fait vrai. Certes, le Barkas B1000 se contentait (au départ) d’un 3 cylindres 2 temps d’origine DKW, mais pour le reste, il s’agissait d’une camionnette de conception très moderne et surtout plus pratique : moteur à l’avant, roues motrices à l’avant, libérant de la place à l’arrière pour toutes les évolutions possibles (notamment plateau), carrosserie autoporteuse, fond plat et bas facilitant le chargement, suspension indépendant à barres de torsion longitudinales à l’arrière, transversales à l’avant. En fait, tout l’inverse du T1 ce qui explique que pendant longtemps, le B1000 fit la fierté du « peuple » est-allemand. Ce n’est qu’avec le temps que le Barkas perdra ses avantages, évoluant peu au fil des années, jusqu’aux derniers modèles produits en 1991.
30 ans de carrière tout de même, pour un utilitaire sorti en 1961 par l’usine héritière des automobiles FRAMO, fondées par Jorgen Skafte Rassmussen (à qui l’on doit aussi DKW). Avec l’occupation soviétique, FRAMO était devenue une « compensation de guerre », nationalisée, et destinée désormais à produire des utilitaires, comme le V501/2 ou le V901/2. Devenue VEB Kraftfahrzeugwerk FRAMO Hainichen, l’usine prendra le nom de VEB Barkas Werke Karl Marx Stadt en 1958, afin de se débarrasser de l’histoire douteuse de FRAMO pendant la guerre, et de préparer le futur Barkas alors en gestation.
Les études concernant le Barkas commencèrent au début des années 50, mais il fallut attendre 11 années avant de voir apparaître le B1000. En effet, les besoins de l’Allemagne de l’Est avaient changé entre temps, tout comme les possibilités d’approvisionnement en acier venu d’URSS. Au bout de 5 ans, on changea donc de fusil d’épaule, optant pour une camionnette aux dimensions et au poids contenu, utilisant moins d’acier grâce à la structure monocoque. On opta aussi à ce moment là pour la traction, ce qui n’était pas si courant à l’Est. D’entrée de jeu, il était prévu que le B1000 se déclinerait en une multitude de versions : fourgon, fourgon mixte, ambulance, minibus, etc.
Côté moteur, le premier 3 cylindres 2 temps de 900 cm3 développant 28 chevaux fut vite remplacé, dès 1962, par un 991 cm3 de 42 chevaux (un moteur qu’on retrouvait aussi sous le capot des Wartburg 311/312, puis sur la Wartburg 353). Durant presque toute sa carrière, le B1000 se contentera de ce petit moteur, ce qui, vue l’offre en RDA, n’était pas un problème, mais qui le devint à l’export, au point que l’exportateur Belge tenta d’en diffuser des versions dotées d’un 4 cylindres diesel Ford… Mais la chute du Mur donna des complexes, montrant l’écart technique qui s’était installé entre temps, et on décida d’offrir au Barkas un 4 cylindres Volkswagen de 1.3 litres. Devenu B1000-1, il est le plus rare des Barkas, avec 1961 exemplaires seulement fabriqués entre 1989 et 1991, date de l’arrêt de la production. Westfalia en proposa même une version « camping », encore plus rare.
Un Barkas B1000-1 à moteur VW et carrossé par Westfalia en 1991Tout au long de sa carrière, le B1000 connaîtra des évolutions mineures, de ci de là. Il faudra par exemple attendre 1987 pour recevoir une porte latérale coulissante ! Même avec le moteur Volkswagen, il était dépassé au début des années 90. Après 175 740 exemplaires fabriqués, la production cessa le 10 avril 1991, laissant sur le carreau 2300 salariés. Il y eut pourtant le projet de continuer la production du Barkas en Russie : les machines outils furent démontées, prêtes à être expédiées, la documentation technique traduite en Russe, sur la foi de probables investisseurs qui firent pourtant faux bond, c’en était fini du Barkas.
Moins connu que la Trabant, et malgré son statut de fourgon commun de la sulfureuse Stasi, le Barkas (avec son nom rigolo dénommant la barque à rame la plus grosse possible destinée au transport de marchandise) est pourtant un symbole de la RDA : normal, pendant 30 ans, sans concurrence, il servit à tout, du minibus au transport de marchandises, aux pompiers comme aux ambulanciers, connaissant même une version « train touristique » à wagon connue sous le nom d’Express. Son histoire et ses spécificités en font donc une pièce de choix pour l’amateur de van, mais dépêchez-vous : son statut d’icône est-allemande fait grimper les prix. Rejoindra-t-il le T1 dans des zones tarifaires improbables ?